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Ceux qui voulaient changer le monde : les idées pour 2015 de Gaspard Koenig de Génération libre
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Libéraliser pour de vrai

Pour l'intellectuel et directeur du groupe de réflexion Génération libre, il est devenu nécessaire de restructurer la dette du pays pour rétablir les marges de manœuvres des pouvoirs publiques, instaurer un revenu universel pour relancer la consommation et endiguer la pauvreté, et enfin faire de la maîtrise des données personnelles un droit fondamental.

Gaspard Koenig

Gaspard Koenig

Gaspard Koenig a fondé en 2013 le think-tank libéral GenerationLibre. Il enseigne la philosophie à Sciences Po Paris. Il a travaillé précédemment au cabinet de Christine Lagarde à Bercy, et à la BERD à Londres. Il est l’auteur de romans et d’essais, et apparaît régulièrement dans les médias, notamment à travers ses chroniques dans Les Echos et l’Opinion. 

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Les gouvernements successifs, le nez dans des problèmes de plomberie, n’ont plus ni le temps, ni l’appétence, ni la moindre incitation pour penser à l’architecture de notre maison commune. En bons locataires, ils colmatent les fuites et accrochent des tableaux sur les taches, parant au plus pressé en attendant de donner les clés au suivant. Jusqu’à ce que nous, les propriétaires, décidions de reprendre les choses en main, et de discuter d’idées (vraiment) libérales telles que :

Restructurer notre dette

On peut profiter des taux d’intérêt bas sur les obligations d’Etat, artificiellement maintenus par des banques centrales hyperinterventionnistes, pour continuer à se gaver de dette en entretenant l’illusion qu’un jour, plus tard, la situation financière du pays s’améliorera, et que de toute façon personne ne nous demandera jamais de payer. La vérité, c’est que cette dette accumulée représente le hold-up parfait d’une génération qui a vécu à crédit sur le dos de ses enfants. Elle pèse sur la croissance, réduit à peau de chagrin les marges de manœuvre des politiques publiques, et constitue une promesse d’austérité à perpétuité.

>> Lire également Ceux qui voulaient changer le monde : les idées pour 2015 de Florian Philippot du Front national

Il faudrait donc sérieusement envisager, à l’échelle européenne, un "coup d’éponge général" (l’expression est de Chamberlain) : une restructuration de la dette négociée de manière ordonnée avec nos créanciers. L’idée fait son chemin : le rapport PADRE (pour politically acceptable debt restructuring in the eurozone), publié début 2014 par le très sérieux Center for Economic Policy Research, propose une restructuration des dettes européennes via la Banque centrale européenne.

Mécaniquement, le défaut – fût-il partiel – pénalisera la rente (en l’occurrence, les assurance-vies !) et redonnera des ailes aux actifs. C’est un arbitrage politique, un choix de société. Une vraie politique de la jeunesse.

Instaurer un revenu universel

L’invraisemblable usine à gaz des transferts et des allocations est un modèle de perversion sociale. Comment justifier qu’un pays représentant 15% des dépenses sociales mondiales ne parvienne même pas à éradiquer la pauvreté ? Pour être direct : comment, avec 400 milliards de transferts, peut-on croiser dans la rue des gens qui mendient quelques centimes ?

Il faut radicalement simplifier le système socio-fiscal en instaurant un impôt unique sur les revenus, finançant un filet de sécurité universel – d’autant plus nécessaire à l’ère du freelance, où le salariat cesse d’être la norme. Le degré premier de la liberté, c’est la garantie de pouvoir satisfaire ses besoins de base : logement, alimentation, habillement, énergie, communications, transports.

Techniquement, le revenu universel pourrait prendre la forme de "l’impôt négatif" imaginé par le très libéral Milton Friedmann dans les années 60, et repris depuis par des figures aussi variées que Martin Luther King ou Jeremy Rifkin. Il fusionne tous les dispositifs existants en une seule aide vraiment utile et responsabilisante : du cash, calculé en fonction d’un niveau de vie minimum. Admettons par exemple que le financement des besoins fondamentaux soit évalué à 1 000. Chacun recevra 1 000 en crédit d’impôt ("impôt négatif") et, pour financer le mécanisme, versera un impôt positif sur tout revenu perçu : si chacun dispose virtuellement du revenu universel, chacun y contribue également, l’Etat versant la différence entre impôt positif et impôt négatif. Ainsi, quelqu’un ne percevant aucun revenu touchera directement 1 000, tandis qu’un individu aisé devant 10 000 en impôts n’en paiera plus que 9 000. Entre les deux, toutes les situations peuvent être calculées de manière simple, transparente et automatique. Le système est par définition à l’équilibre : la société auto-finance son propre filet de sécurité. L’intervention du politique se réduit à déterminer le niveau de l’impôt négatif ; le choix collectif a pour seul objet la somme nécessaire à la survie, plus ou moins généreuse.

Cette idée est aujourd’hui en vogue chez de nombreux économistes et activistes. Elle est expérimentée en Inde et devrait faire prochainement l’objet d’une votation en Suisse. Espérons que la France sache reprendre le flambeau de l’innovation sociale.

Créer une Agence des Données

Au voleur ! Tous les jours, à chaque clic, on nous fait les poches. On nous vole notre intimité : nos données personnelles. A cet instant, cher lecteur, votre URL est probablement incorporée à de puissants algorithmes qui raffineront votre profil pour anticiper vos moindres désirs, et vous construire un monde virtuel où vous ne verrez que ce que vous souhaiterez voir, n’entendrez que ce que vous souhaiterez entendre, et finirez donc aveugle et sourd.

Si l’on n’y prend garde, nous deviendrons de la chair à information dans la moulinette du Big Data - ce que le penseur américain Jaron Lanier appelle les "Siren Servers", les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) & Co, machines à pomper des données gratuitement et à les exploiter sans contrôle.

Certes, ce sont des services privés auxquels nous adhérons librement. Certes, nous cochons régulièrement "J’accepte" sur des formulaires illisibles de cinquante pages. Mais n’invoque-t-on pas de manière abusive le droit de propriété (et donc de désaisissement) là où il faudrait raisonner en termes de droits fondamentaux ? Le réseau des données ne finit-il pas par devenir un bien commun ?

Voilà pourquoi Pierre Bellanger, patron de Skyrock et auteur de la Souveraineté numérique, propose de créer une Agence (publique) des Données, qui redonne à chacun un droit souverain sur ses propres données, et s’assure que les organismes collecteurs respectent un certain nombre de normes d’encryptage.

Voilà un domaine où l’Etat peut et doit intervenir davantage, pour remplir son rôle premier de protecteur des libertés individuelles.

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