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La baisse de l’euro risque de renchérir le prix de nombreux produits.
La baisse de l’euro risque de renchérir le prix de nombreux produits.
©Reuters

L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

La baisse de l’euro réclamée à cor et à cri par les membres du gouvernement depuis six mois est amorcée. Elle va se confirmer. Cependant, on va s’apercevoir que cette baisse n’a rien d’un remède miracle. Au contraire, c’est une mauvaise nouvelle, voici pourquoi.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Arnaud Montebourg et toute la gauche de la gauche, les frondeurs du PS, les chefs syndicaux de la CGT et de FO, certains syndicats patronaux… n’ont  pas cessé de protester contre la valeur de l’euro, trop cher. Ce beau monde n’a pas cessé de réclamer des actions pures et dures du coté de la BCE, comme si la banque centrale détenait toutes les clés pour sortir de la crise. Ils ont crié tellement  fort que le président de la République, François Hollande, est allé protester à Francfort, que Manuel Valls est sorti de sa prudence pour dire qu'il faudrait un autre rapport de change. Même les ministres de l’Économie sont allés jusqu’à "penser" à haute voix. Et bien, ils  pourraient dire qu'ils ont été entendus : l’euro a déjà baissé depuis un mois. Il vaut moins de 1,29 dollars aujourd’hui et ça va continuer. Prenons les paris, personne ne va crier victoire, la baisse de l’euro est une mauvaise nouvelle.

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D’abord pourquoi l’euro est-il orienté à la baisse. L’euro baisse, parce que la BCE a baissé les taux directeurs à un niveau ridicule : 0,15%. L’euro est une monnaie qui ne vaut plus rien en termes de rémunération. Parallèlement, l’Europe est en panne de croissance. Par conséquent, s’il n’y a pas de croissance, l’investissement en euro est stérile. Pas de croissance, pas de rendement. Toutes ces raisons font baisser l’euro. Les investisseurs apportent encore des financements au déficit parce que les européens paient leurs impôts, donc le placement en euro ne rapporte rien mais il est sécurisé par le sérieux des contribuables. Ça peut ne pas durer.

Ensuite, est ce que la baisse de l’euro va continuer. Oui, oui et oui parce que les taux d’intérêt sur l’euro sont nulsou presque alors que les taux sur le dollar remontent. La FED retourne sa politique monétaire, freine la distribution de liquidités et remonte ses taux d’intérêt. La réserve fédérale et la BCE vont évoluer à contre cycle. Le dollar mieux rémunéré va monter, l’Euro lui va baisser. Les capitaux internationaux vont se détourner de l’Europe et s’en aller aux États-Unis.

Enfin quelles sont les conséquences de ce changement de braquet ?  En France, certains vont s’en réjouir en pensant que la baisse de l’euro va servir de remède miracle et doper l’économie, l’activité, la croissance et l’emploi. Ils nous expliqueront l’air très savant que la baisse de l’euro va améliorer la compétitivité des produits français  à l’étranger. Ils se trompent évidemment. Pour que ça marche, il faudrait être capable d’exporter. Or, la France n’exporte pas, en dehors des produits de luxe ou le facteur prix n’est pas primordial. Les Japonais n’achètent pas des sacs Vuitton parce qu'ils sont moins chers.

Pour que ça marche, il faudrait une structure économique très saine et très renforcée. Ce n’est actuellement pas le cas puisque les réformes nécessaires n’ont pas été engagées.  Le seul pays en Europe qui peut profiter d’une baisse de l’euro, c’est l’Allemagne qui exporte déjà, peut être trop, en dehors de la zone euro. En revanche, la baisse de l’euro va renchérir les importations, le pétrole, les automobiles, les articles textiles, les produits alimentaires. Pour soutenir la consommation, on aurait pu trouver mieux !

Mais le risque le plus grave que Bruxelles redoute, c’est la fuite des capitaux sur le dollar. La plupart des pays européens, tous sauf l’Allemagne, ont besoin de financer leur déficit de dépenses publiques et leur dette. Si les capitaux préfèrent s’orienter sur les États-Unis plus rémunérateurs, les taux de marchés appliqués en Europe vont monter. Si les taux de marchés augmentent en Europe, la crise de la dette mettra à mal les banques et tous le système. Les banques sont déjà en mauvais état en dépit des profits déclarés, qui ne sont que le résultat d’une spéculation sur les liquidités distribuées par les banquiers centraux. Si Mario Draghi la semaine dernière n’a pas publié le résultat des stress tests que l'on a fait passer aux banques, c’est évidemment parce que ces résultats sont extrêmement mauvais.

Tant que la BCE et la FED ne seront pas synchronisées, le risque sera présent. La Banque centrale européenne fait tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir l’activité et apporter des liquidités. Elle va très rapidement se retrouver en porte-à-faux. La FED va remonter ses taux, la BCE ne peut absolument pas le faire sauf à étrangler ce qui reste des économies européennes.

La seule solution, que les États à la traine donnent des preuves de gestion budgétaire plus rigoureuses. C’est la première mission confiée à Pierre Moscovici arrivé mercredi à Bruxelles. Face à la France, c’est pour lui "mission impossible".

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