Pourquoi il ne faut pas laisser l’Afrique centrale devenir le trou noir de la sécurité du XXIe siècle<!-- --> | Atlantico.fr
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Il ne faut pas que l'Afrique centrale devienne le trou noir de sécurité du XXIe
Il ne faut pas que l'Afrique centrale devienne le trou noir de sécurité du XXIe
©Reuters

Tribune

De la République démocratique du Congo au Nigeria, en passant par l’Ouganda, le Mali ou la Centrafrique, l’Afrique centrale offre un condensé des défis sécuritaires du XXIe siècle. Des défis qui représentent une menace globale et qui doivent permettre l’émergence d’une unité politique africaine. Une tribune du président de la République du Congo Denis Sassou-Nguesso.

Denis Sassou-Nguesso

Denis Sassou-Nguesso

Denis Sassou-Nguesso est un militaire et homme politique congolais. Il a été président de la République populaire du Congo de 1979 à 1992 et est le président en exercice de la République du Congo depuis 1997.

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Comme une gangrène, la violence et l’insécurité progressent en Afrique centrale. Si la situation à l’Est de la République Démocratique du Congo, longtemps explosive, a baissé d’intensité ces derniers mois, elle demeure fragile et incertaine.

Aux confins de la République Centrafricaine, de la République Démocratique du Congo et de l’Ouganda, l’Armée de Résistance du Seigneur de Joseph Koni est toujours aussi active et redoutable pour les populations civiles.

Le long de la bande sahélienne, de la Somalie à la Mauritanie en passant par le Mali, la nébuleuse terroriste a depuis longtemps pris ses marques et au Nigeria, la secte Boko Haram tente de régionaliser son action en direction du Cameroun et peut-être demain de la République Centrafricaine.

Enfin, la crise sociopolitique et sécuritaire que connaît la République Centrafricaine demeure préoccupante, malgré les initiatives de sécurisation et de paix prises par la Communauté des Etats de l’Afrique Centrale, l’Union Africaine, la France, l’Union Européenne, les Etats-Unis et les Nations Unies. L’insécurité et les violations graves des droits de l’homme y persistent. On considère qu’entre 10 et 20% des quatre millions de Centrafricains ont été déplacés à cause de la crise en cours.

Autant de situations dramatiques qui se nourrissent mutuellement et pourraient à terme, sans actions concrètes, contaminer l’ensemble du continent. Si l’aide logistique occidentale est indispensable pour lutter simultanément contre ces différents foyers d’instabilité, les Africains détiennent les clés pour faire bouger les choses, comme en atteste la mobilisation des forces africaines lors des récentes opérations de maintien de la paix en Centrafrique et au Mali.

Il faut à ce titre saluer l’activisme de l’Union Africaine et des différents partenaires africains qui ont permis ces derniers mois de faire baisser la tension dans plusieurs zones de conflits de la région.

La médiation africaine a permis de négocier en décembre 2013 à Nairobi, la fin de la lutte armée de l’ex-rébellion du M23, qui sévissait dans l’Est de la République Démocratique du Congo. Dans le même temps, dans la même partie Est de la République Démocratique du Congo, le désarmement des combattants de l’Armée de Libération de l’Ouganda et des rebelles rwandais des FDLR se poursuit et montre des signes encourageants.

L’Afrique mène également les négociations en vue d’un processus de paix en Centrafrique et c’est à Brazzaville que les belligérants ont signé un Accord de Cessation des Hostilités.

Mais nous devons aller plus loin, et la mise en place en 2015 d’une "Force d’intervention rapide" africaine doit être le gage de notre capacité commune à intervenir pour stabiliser la sous-région et le continent.

Nous devons aussi et surtout réfléchir aux causes profondes de ces instabilités sans éluder nos responsabilités respectives.

Comme nations indépendantes, la plupart des pays africains n’ont qu’une cinquantaine d’années d’existence. Si cette relative jeunesse ne doit pas constituer, pour nous Africains, une excuse à nos erreurs et à nos défaillances, la rappeler permet de situer les faits dans une perspective historique. Je voudrais ici insister sur la nécessité de considérer la dimension temporelle lorsque l’on juge les pays africains. Les soubresauts que nous vivons reflètent la prime enfance de nos nations en devenir, de nos Etats en constitution, de nos institutions en voie de consolidation, de nos démocraties en cours de maturation et de nos économies en instance d’émergence.

La notion de sécurité doit dépasser les questions de défense pour s’intéresser à la viabilité même de nos Etats et aux questions ayant trait à leur développement politique, économique et social.

L’insécurité est souvent la conséquence de plusieurs autres problèmes, notamment la pauvreté et l’injustice. La pauvreté est peut-être le premier facteur d’insécurité. L’Afrique doit faire face au titanesque défi de la construction simultanée de la nation, de l’Etat, de la démocratie, du droit et de la bonne gouvernance. Cela devrait inciter nos partenaires à plus de patience, de réalisme, de pragmatisme et peut-être d’humilité dans leur appréciation de nos jeunes pays.

Par ailleurs, le concept d’Etat-Nation si ancré dans la culture philosophique et politique européenne est une idée récente en Afrique où le découpage arbitraire du Continent, lors de la Conférence de Berlin de 1885, et la Colonisation qui s’en est suivie, ont fait de nos pays des entités ethniques fragmentées.

Ces réalités énoncées, il n’en est pas moins urgent de nous mobiliser pour combattre le fléau de l’insécurité qui gagne chaque jour un peu plus de terrain en Afrique centrale.

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