Pourquoi la France a besoin de (beaucoup) plus de robots tout en devant se préparer aux destructions d’emplois non qualifiés qu’ils entraîneront<!-- --> | Atlantico.fr
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La France dispose de moins de robots que l'Allemagne ou à la Corée du Sud.
La France dispose de moins de robots que l'Allemagne ou à la Corée du Sud.
©Reuters

R2-D2 et C-3PO au secours de la France

Si la France a des déficits à régler, il y en a un qu'il ne faut pas oublier : celui du nombre de ses robots, très inférieur à celui de l'Allemagne ou de la Corée du Sud. L'équation selon laquelle plus de robots est égal à moins de travail est fausse. Pour créer de l'emploi, un pays (et les entreprises qui la composent) a besoin de productivité, de compétitivité, et donc de croissance.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Dans un pays frappé par le chômage de masse, la perspective du remplacement progressif des salariés par des robots n’est pas forcement accueillie avec le sourire. Car la réalité de l’économie française est que son niveau d’équipement robotique est à la traîne, aussi bien par rapport à la concurrence européenne que mondiale. Le potentiel de développement y est donc très important.

En 2012, La France comptait en effet un stock d’environ 34 000 robots, contre 311 000 au Japon. Pour une comparaison plus régulière, il suffit de mesurer le nombre de robots pour 10 000 ouvriers dans chaque pays; 122 en France contre 339 au Japon, près de 400 en Corée du sud ou 261 en Allemagne. L’écart est lourd, très lourd, et représente dès lors un réel potentiel de développement.

Aujourd’hui, le grand remplacement des salariés par les vilains robots ne serait pas encore une réalité. Il s’agit de la conclusion d’une étude menée par Collin Lewis et visant 76 entreprises ayant eu massivement recours à la robotique. A elles-seules, ces sociétés ont pu créer 294 000 emplois au cours des trois dernières années. Le cas d’Amazon est ici le plus remarquable. La société comptait 28 300 employés en 2010. Elle a alors choisi de procéder à l’acquisition de 10 000 robots. Amazon emploie aujourd’hui 117 000 employés, soit un solde positif de 89 000 salariés en 3 ans. Si la corrélation ne suffit pas à prouver la causalité, il est assez difficile de soutenir que les robots installés chez Amazon ont détruit les emplois existants. L’histoire ne dit pas combien d’emplois ont pu être détruits chez la concurrence.

Mais plutôt que de détruire des emplois, la situation actuelle indique que la robotisation tend à "déplacer" les emplois. Les tâches routinières sont assurées par la machine et le travail humain se trouve déplacé vers des tâches inaccessibles aux robots, uù la "qualification humaine" a encore son rôle à jouer.

Bien évidemment, le développement de la robotique en France aura pour conséquence de renforcer la productivité de l’industrie du pays. Une telle intensification permettra de générer une demande supplémentaire pour une main d’œuvre qualifiée à la gestion de ces unités, ou à leur conception. Cette nouvelle donne pourrait également inciter des entreprises françaises à relocaliser leur production sur le territoire. Lorsqu’un robot vendu aujourd’hui au prix de 20 000 $ est capable de fournir un travail 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, pendant 15 ans, plus aucun pays émergent ne sera capable de rivaliser, à terme. Ce qui explique aussi la volonté croissance de la Chine de se robotiser.

Dans un pays comme la France, ou le coût du travail est élevé, la conséquence de l’ère de la robotisation sera de créer des emplois moyennement ou hautement qualifiés, mais aussi de détruire des emplois faiblement qualifiés. Une situation qui ne peut encore trouver de réponse satisfaisante. Si la formation semble bien être la seule ressource qui puisse permettre à une personne de se qualifier aux nouveaux emplois demandés par les entreprises, il convient de préparer la société à un tel bouleversement. Les territoires de l’éducation et de la formation ne pourront se contenter de demi-mesures. La priorité est claire ; permettre à chacun d’accéder à son plein potentiel. Yakafokon. Mais il serait illusoire ou romantique de prétendre que chacun pourra accéder à un emploi d’ingénieur ou de neurochirurgien.

Si la France veut créer des emplois, elle ne pourra le faire que sur la base d’entreprises prospères et productives. Le cas d’Amazon est tout aussi révélateur sur ce point. Si la société a créé autant d’emplois au cours des dernières années, c’est qu’elle a pu renforcer sa position au niveau mondial, prendre des parts de marchés à ses concurrents, et ce notamment en raison de sa robotisation. Si le statu quo n’a pas de sens, si le refus de s’équiper aurait pour conséquence de s’exposer à une concurrence toujours plus vive, il est nécessaire et urgent de se préparer aux conséquences. Car si l’avantage évident est de pouvoir extraire à terme les hommes des travaux les plus pénibles, durs, ou routiniers (les robots vont aussi dans les mines), l’automatisation ne s’arrêtera pas là. En effet, selon les économistes Frey et Osborne, 47% des emplois actuels sont susceptibles d’être automatisés dans les 10 à 15 années à venir. La tendance n’est donc pas mineure, elle constitue une révolution.

A lire également, le nouveau livre de Nicolas Goetzmann :Sortir l'Europe de la crise : le modèle japonais, (Atlantico éditions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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