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Le basket français peut-il enfin grandir ?
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Sportif

La finale du championnat Pro A se déroule aujourd’hui à Paris Bercy entre Nancy et Cholet. La salle devrait être remplie, mais c'est sans rapport avec le maigre engouement pour le basket français.

Philippe Verneaux

Philippe Verneaux

Philippe Verneaux est journaliste sportif et auteur de L'argent dans le sport (2005, Flammarion). Il anime le blog sportmood.fr.

 

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De la folie. Tony Parker, invité à Charenton-Le-Pont en septembre dernier pour inaugurer deux gymnases portant son nom, provoque un véritable raz-de-marée médiatique et surtout populaire. Des centaines de petits basketteurs en herbe, les yeux pétillants d’admiration, se précipitent pour voir la star des San Antonio Spurs. La ville tranquille de la proche banlieue parisienne est pour quelques heures en ébullition. La ministre des Sports, Rama Yade, ne manque pas l’occasion de faire sentir sa présence au côté du triple champion NBA… Ce seul événement local aura en tout cas fait plus de bruit que la finale du Championnat 2010-2011 entre Cholet et Nancy…

Et il est bien certain qu’aucun des protagonistes de ce dernier acte de la saison de Pro A n’aurait suscité un tel engouement. Parker est une exception, l’arbre qui cache la forêt bien effeuillée d’une discipline qui se cherche, en France, depuis… qu’elle y est née. A quelques reprises pourtant, avec les performances européennes de Limoges dans les années 1980 ou des Bleus aux JO de 2000, on a cru que le basket pourrait s’emballer définitivement. Pétards mouillés…

Les dernières saisons de Pro A ont été autant de fiascos médiatiques. Aucune chaîne d’envergure ne daigne y risquer le moindre euro de droit. Et contrairement au foot ou au rugby, le basket s’est retranché sur des fenêtres réduites, presque confidentielles.  Mais pourquoi ? Première évidence, et comme un panier dans la raquette parait banal au regard d’un tir à trois points réussi de dix mètres, le spectacle sur les parquets de l’hexagone s’est incontestablement appauvri depuis des années. Il a à tout le moins végété quand le grand cousin US s’est continuellement magnifié. Les franchises américaines et leurs méga stars (Bryant, James, O’Neal…) ont fait rêver les gamins des deux dernières générations, même à dix mille kilomètres de distance, via Canal + puis internet. Et les Parker, Diaw, Batum ou Turiaf, talents à peine éclos en France, ont vite échafaudé leur choix de carrière… Des agents sans états d’âme nationalistes ont très tôt fait de les convaincre d’un changement de vie, de notoriété ou de bien-être… financier, en traversant l’océan.

Les vedettes américaines, qui n’hésitaient pas à terminer une carrière en France il y a quelques saisons, ne le font plus, ou beaucoup moins. Car les équipes françaises souffrent désormais de malignité et d’insuffisance globulaire, c’est-à-dire d’asthénie financière. Sur ce plan, la comparaison avec les clubs espagnols, israéliens ou grecs, qui trustent les titres européens, est devenue presque risible. Le fossé s’est aussi probablement creusé en raison d’une caste dirigeante mal ou peu en phase avec son époque. Pas, comme au rugby, de Serge Blanco, exemplaire artisan du développement de son sport, et autant vendeur de son image, ou de Max Guazzini, capable par d’extraordinaires coup d’audace, de populariser le ballon ovale.

Du coup, le maillot bleu n’est plus trop à la mode. L’équipe de France a perdu de son intérêt au profit de l’attrait égotique ou du blason des Bulls et des Lakers. Malgré une somme de talents individuels, comme ceux précités, au moins aussi épatants que ceux qui forment les nations continentales les plus en vue, Russie, Lituanie, Italie, Serbie, Grèce, voire Espagne, la valeur du collectif n’en résulte pas forcément. Les Bleus savent certes briller, notamment lors des Championnats d’Europe et parfois même mondiaux, mais sans jamais affirmer leurs qualités jusqu’au bout. L’équipe nationale fait ponctuellement peur aux autres sélections. Mais on la sait suffisamment fragile pour venir lui glisser le petit grain de sable qui la fait finalement dérailler. Comme en cette occasion, et entre autres déceptions cuisantes, de la catastrophique dernière minute de la demi-finale de l’Euro 2005 face à la Grèce… Symbole absolu de l’éternelle scoumoune qui frappe les Bleus du ballon orangé et qui lui laisse invariablement la tête tout juste hors de l’eau.

A la perspective du prochain Euro, l’équation est parfaitement posée par Nicolas Batum : « Cette année, c’est plus qu’un simple tournoi avec un trophée au bout. Il y a la qualification pour les JO à la clé. On voit ce que font les autres sports, le hand qui monte, le rugby en plein boom depuis sept ans, la natation... Le foot excepté, on est l’un des sports qui comptent le plus de licenciés. Les filles ont déjà fait des choses bien. Mais on attend toujours un résultat marquant et l’impact de notre équipe. Si on fait quelque chose en Lituanie et qu’on va à Londres derrière, ça peut être énorme pour le basket français. »

Nos joueurs, techniciens et dirigeants, veulent-ils, désirent-ils réellement un avènement du basket tricolore ? Tous ces acteurs sont-ils assez forts et influents pour, par exemple, fédérer les volontés. Un Joakim Noah peut-il être par exemple convaincu d’intégrer l’équipe nationale à cent pour cent de sa motivation, ce qui semble aujourd’hui loin d’être le cas. La question n’est pas résolue, le contrat du pivot de Chicago en constituant évidemment la principale problématique. Tony Parker, Nicolas Batum, Rony Turiaf et consorts, souhaitent-ils sortir de leur tunique domestique pour endosser, sans papillon sur l’épaule, celle de leur lande natale ? De manière plus générale, le basket français peut-il s’extirper de sa torpeur ?

A ce jour, la réponse est sans équivoque. L’ancienne gloire limougeaude, Richard Dacoury, et futur conseiller de la Ligue nationale, le confirme : « On n’existe plus au sens économique. Personne dans la rue ne sait qu’il y a une finale Cholet-Nancy de Pro A à Bercy samedi. On va faire salle pleine comme tous les ans, mais est-ce que pour autant le basket se porte bien ? Je voulais intéresser Coca-Cola au basket, mais je me suis rendu compte qu’il n’intéressait absolument pas ce genre d’entreprise. »

Ce qui est donc sûr - mais est-ce la meilleure nouvelle ? - c’est que le basket français n’a pas, ou plus, grand-chose à perdre…

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