De quoi meurt-on aujourd’hui : les dix premières causes de décès en France comparées à il y a 100 ans<!-- --> | Atlantico.fr
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Les cancers (de toute origine) sont la première cause de mortalité en France.
Les cancers (de toute origine) sont la première cause de mortalité en France.
©Reuters

A l'article de la mort

Maladies cardiaques et cancers sont les plus importantes causes de décès en France. Il y a 100 ans, c'était de la pneumonie et de la grippe que l'on mourrait le plus. Analyse de ces évolutions et de leurs causes.

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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1) Cancers

Les cancers (de toute origine) sont la première cause de mortalité en France, représentant près de 30% de tous les décès (c’est la seconde cause après les infarctus dans la plupart des autres pays d’Europe). Les cancers le plus fréquemment tueurs sont le cancer du poumon (surtout chez l’homme, mais en forte progression chez la femme aussi, puisqu’il rattrape progressivement le cancer du sein en nombre de décès), le cancer du rectum et du côlon et le cancer de la prostate (chez l’homme). Le cancer du poumon est dans près de 90 % des cas dû au tabagisme (le plus souvent actif, parfois passif). Les cancers de la sphère ORL (larynx, gorge) sont souvent liés à l’association du tabac et de l’alcool. On pense aujourd’hui que l’obésité pourrait être à l’origine de nombreux cancers également. Les cancers sont de plus en plus fréquents avec l’âge. On sait cependant dépister précocement le cancer du colon, le cancer du col de l’utérus, le cancer du sein et le cancer du poumon en évitant ainsi qu’ils envahissent l’organisme ou se compliquent de métastases ou de décès. Les traitements du cancer sont lourds, souvent pénibles et coûteux, mais les progrès ont parfois été phénoménaux ces dernières années et l’on vient à bout d’un nombre toujours plus grand de cancers. La prévention, trop souvent négligée, permettrait d’éviter que surviennent de très nombreux cancers : à commencer par l’arrêt de la cigarette (que le fumeur peut avantageusement remplacer par la cigarette électronique pour diminuer considérablement les risques du tabac fumé) et une consommation modérée d’alcool.

2) Maladies coronariennes

Les maladies coronariennes représentent un peu plus de 20 % des décès, soit la seconde cause de mortalité en France (la première dans la plupart des autres pays européens, car la France a l’un des taux de mortalité par infarctus du myocarde les plus faibles au monde). L’infarctus du myocarde c’est la mort de cellules du muscle du cœur, et donc l’affaiblissement de la pompe cardiaque qui peut parfois conduire au décès, soit d’emblée, soit après plusieurs infarctus successifs. L’infarctus du myocarde est dû à des coronaires obstruées par des plaques d’athérome (de cholestérol) qui ne laissent plus passer suffisamment de sang et donc d’oxygène, le carburant des cellules. Les coronaires s’obstruent pour plusieurs motifs : l’âge, mais toutes les personnes âgées ne font pas d’angine de poitrine ou d’infarctus ; l’hypercholestérolémie ; l’hypertension artérielle ; le diabète ; le tabagisme. Pour prévenir les risques de maladies coronariennes et d’infarctus, il convient donc de lutter contre tous ces facteurs qui les favorisent, en particulier, la sédentarité, la cigarette, l’excès d’alcool, l’obésité, et aussi en soignant les maladies associées citées ci-dessus.

3) Accidents vasculaires cérébraux

Les accidents vasculaires cérébraux que l’on appelle dans le langage commun « les attaques cérébrales » sont une grande cause de handicap et de décès (6 % des décès). Le plus souvent ils surviennent chez les personnes âgées, mais parfois plus jeunes lorsqu’elles ont des facteurs de risque vasculaires, et ce sont d’ailleurs les mêmes, le plus souvent, que ceux décrits pour les maladies cardiaques (point 2). Il y a deux grands types d’accidents vasculaires cérébraux, ceux que l’on appelle ischémiques, parce que les vaisseaux s’obstruent et n’apportent plus la ration nécessaire d’oxygène au cerveau, dans un mécanisme similaire à celui de l’infarctus du myocarde évoqué ci-dessus ; et ceux que l’on appelle hémorragiques parce que les vaisseaux saignent dans le cerveau et l’inondent par zones entières. Dans les deux cas, les dommages causés aux parties du cerveau lésées peuvent être irréversibles et entraîner des paralysies des membres, des troubles de la parole, parfois même de la déglutition (difficultés à manger ou boire), voire de gravissimes troubles de la respiration ou de la conscience qui peuvent conduire au décès. Certains accidents vasculaires cérébraux peuvent presque passer inaperçus, ou causer peu de séquelles. Ils sont cependant un facteur favorisant la survenue de maladies d’Alzheimer, ou de formes apparentées de ces maladies.

4) Accidents

Les morts violentes en France sont essentiellement dues aux accidents de la voie publique (et aux suicides, voir ci-dessous). Chez le petit enfant, notamment de moins de trois ans, ce sont les accidents domestiques qui peuvent être la cause de décès, incluant les noyades en piscine notamment. Les accidents de la route ont fortement régressé ces dernières années en France. C’est grâce à la conjonction de politiques de prévention très volontaristes, visant à lutter contre les excès de vitesse, mais aussi à améliorer les infrastructures, la sécurité des automobiles, l’interdiction des poids lourds les week-ends et jours fériés, à renforcer les contrôles de l’alcoolémie. On sait moins bien lutter contre l’usage des téléphones mobiles et autres smartphones au volant, dont on pense qu’ils sont la cause de plus en plus d’accidents de la route (et du trottoir chez les piétons). La lutte contre l’alcool au volant, si elle a fait des progrès reste encore trop timide en France par rapport à la tolérance zéro de certains pays d’Europe du Nord, et donc on pourrait encore sauver des vies dans ce domaine.

5) Maladies d'Alzheimer

La maladie d’Alzheimer est en augmentation en raison du vieillissement de la population. Elle entraîne une perte de l’autonomie des personnes qui peut les conduire en institution. Les risques domestiques ou les accidents de la voie publique, la négligence de la prévention, la mauvaise observance thérapeutique et la perte progressive de modes de vie bons pour la santé sont autant de facteurs qui risquent d’abréger la vie des patients atteints de ces maladies. Beaucoup de ces maladies sont probablement en partie dues, au moins en partie, à des maladies cardio-vasculaires que l’on pourrait prévenir : le tabagisme, l’hypertension, le diabète, la sédentarité, l’hypercholestérolémie.

6) Diabète

Le diabète (sucré) est une maladie du pancréas qui ne sécrète plus assez d’insuline, l’hormone qui permet au sucre que l’on ingère et qui passe dans le sang d’entrer dans les cellules. Le résultat est donc l’hyperglycémie, c’est-à-dire l’excès de sucre (glucose) dans le sang et dans les urines. Au-delà, ce dérèglement du sucre dans l’organisme vient profondément altérer la paroi des petites artères, et cause des complications qui atteignent de nombreux organes. Ainsi, le diabète est la cause de cécité (perte de la vue), de maladies du rein (conduisant à la dialyse), d’artérites des membres inférieurs (conduisant à des amputations), et à des maladies cardio-vasculaires et des accidents vasculaires cérébraux. La sédentarité et l’obésité sont des facteurs de risque de diabète. On traite le diabète par de l’insuline injectable lorsque les médicaments par voie orale ne suffisent plus.

7) Pneumonie ou grippe

Les pneumonies et la grippe représentaient des causes de mortalité très fréquentes jusqu’au début du vingtième siècle et le restent dans les pays en développement. Elles figurent encore parmi les 10 des causes de mortalité les plus fréquentes en France (2 % de tous les décès). Elles surviennent essentiellement chez les personnes très âgées, parfois déjà atteintes de bronchites chroniques ou d’autres maladies chroniques (cardiaques ou rénales), et alors, c’est un peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase, l’équilibre précaire qui vient à se rompre. La personne âgée, fragilisée par d’autres maladies chroniques, contracte un virus grippal ou un pneumocoque ou tout autre infection saisonnière, et une complication survient : c’est une insuffisance respiratoire aigüe, une poussée d’insuffisance cardiaque, ou un problème métabolique qui se traduit par un état confusionnel venant aggraver une démence sénile par exemple. Ce type de scénario d’une fin de vie précipitée peut cependant être évité par la vaccination antigrippale et contre le pneumocoque.

8) Suicide

Il n’est pas simple de savoir à quoi est dû un suicide, résultante complexe de multiples facteurs sociaux, familiaux, médicaux. Cependant la France garde un taux de mortalité par suicides parmi les plus élevés d’Europe de l’Ouest, et les régions françaises les plus atteintes par le phénomène sont celles où la consommation d’alcool est la plus forte. Il est donc probable qu’il y ait un lien entre l’excès de la consommation d’alcool et le risque de dépression et de suicide. La France est aussi l’un des pays où l’on consomme le plus de psychotropes. Or, prescrire un anxiolytique sans antidépresseur chez un dépressif peut conduire à une aggravation de ses troubles, ne serait-ce que parce qu’ils sont mal soignés. Le diagnostic des maladies mentales est probablement insuffisamment fait dans notre pays. Malheureusement, on ne fait pas le diagnostic de dépression par une simple prise de sang ou une radiographie. C’est un diagnostic plus compliqué à porter, qui demande au médecin du temps et de la formation. Les maladies mentales sont fortement stigmatisées, tant en milieu professionnel que familial. Face à ces tabous de notre société, face aux traitements insatisfaisants, c’est une grande solitude et même souvent le rejet de la part de son entourage, qui attende la personne atteinte d’une dépression ou d’une autre maladie mentale. Que l’alcool vienne alors précipiter l’histoire triste d’une vie vers le suicide, et l’on comprendra qu’il faut un sursaut national pour combattre ce qui n’est pas une fatalité aujourd’hui et qui mérite toute notre compassion et tous nos efforts comme nous l’avons fait avec tant de succès contre l’infarctus du myocarde ou les accidents vasculaires cérébraux.

9) Les broncho-pneumopathies chroniques obstructives

On les appelait autrefois plus simplement les bronchites chroniques. Ici aussi, elles sont dues à plus de 90 % au tabagisme. Les grands fumeurs finissent par tousser, cracher le matin, puis toute la journée ; leurs bronches s’obstruent, deviennent irritables, entraînent des crises qui ressemblent presque à l’asthme. La maladie pulmonaire devient chronique et entraîne des conséquences sur le fonctionnement du cœur mis à trop rude épreuve. La pompe cardiaque devient insuffisante et des oedèmes apparaissent, le foie souffre. Ces maladies finissent par entraîner la mort par suffocation ou défaillance cardiaque. D’autres polluants atmosphériques peuvent être la cause de ces maladies respiratoires, lorsque l’exposition à ces polluants a été très intense et très prolongée, comme la silicose des mineurs qui heureusement a presque disparu aujourd’hui, ou l’asbestose des travailleurs de l’amiante est aujourd’hui interdite des processus de fabrication.

10) Néphropathies

Les néphropathies ou maladies du rein sont graves parce que les reins sont des organes de nettoyage et purification des toxines et impuretés du sang. Ils sont indispensables au fonctionnement de l’organisme. On ne survit pas longtemps sans reins. Plusieurs facteurs sont à l’origine de néphropathies : on a évoqué le diabète, l’hypertension aussi, l’hypercholestérolémie, certains médicaments peuvent donner des maladies du rein (certains antidouleurs ont été retirés du marché ces dernières décennies à cause de cela). Le traitement est lourd, coûteux et non dénué de risque, c’est la dialyse. Il est aussi possible de transplanter un rein d’un donneur compatible et de transformer ainsi la vie des patients atteints de néphropathies.

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