J-7 avant les municipales, J+7 de la semaine horribilis politico-judiciaire : qui peut raisonnablement attendre quoi<!-- --> | Atlantico.fr
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A une semaine des élections municipales, les affaires se multiplient.
A une semaine des élections municipales, les affaires se multiplient.
©Reuters

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A une semaine des municipales, les différents partis politiques sont tiraillés entre les affaires judiciaires et les campagnes menées sur le terrain par leurs candidats.

Jérôme Sainte-Marie

Jérôme Sainte-Marie

Jérôme Sainte-Marie est président de la société d'enquête et de conseils PollingVox.

 

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Atlantico : A 7 jours du premier tour des élections municipales, les socialistes avancent confiants vers le scrutin, comme l'a déclaré Harlem Désir, Premier secrétaire du PS. En pleine affaire Taubira, laquelle a menti en déclarant ne pas avoir été informée de la mise sur écoute de Nicolas Sarkozy, que peut raisonnablement attendre la gauche à l'issue des élections ?

Jérôme Sainte-Marie:  Le pouvoir espère casser la dynamique négative qui l’accompagne depuis le début du quinquennat. Pour cela il mise sur l’effet de contraste entre une relative stabilité du paysage politique urbain, et l’impopularité historique de l’exécutif, mais aussi du Parti socialiste, dont seuls 31 % des Français ont une bonne opinion, selon le barometre BVA/L’Express. Il demeure que les responsables socialistes se préparent sans le dire à la perte d'une trentaine de villes de plus de 9 000 habitants. Quels que soient les résultats, la gauche sera rendue après ces élections a ses tendances centrifuges : si l’intérêt de listes communes, comme a Paris où le Parti communiste accompagne Anne Hidalgo dès le premier tour, a modéré les critiques contre la politique gouvernementale, cela durera d’autant moins que les élections européennes poussent naturellement a la division de toutes les coalitions.

Harlem Désir est-il réaliste quand il déclare "Notre objectif c'est de conserver ces villes conquises en 2008. […] Nous avons transformé les villes, nous avons créé une sorte de modèle municipal de gauche fait d'innovation, de solidarité, […] avec de nouveaux modes de transport écologiques […] et l'objectif, c'est de conquérir de nouvelles villes" ?

Le secrétaire national du Parti socialiste aborde le scrutin avec une double inquiétude. Politique, parce qu’il ne peut ignorer l’impact du climat national sur le scrutin, et personnel, dans la mesure ou il est a la tête d’un parti qui, a l’exception des européennes de 2009, a gagné toutes les élections depuis 2007. Dès lors, il s’emploie a « relocaliser » l’enjeu. De fait, la commune demeure un espace politique préservé dans le climat général de défiance : une récente étude de LH2 nous montre 58 % des Français satisfaits de l’action de leur municipalité, et même 50 % satisfaits de l’utilisation qu’elle fait de l’argent public. Or, dans ce sondage, 70 % déclarent qu’ils vont voter avant tout en fonction du bilan de leur maire et de son équipe, 11 % sur la situation économique et sociale du pays, et 9 % sur la politique du gouvernement. Voilà qui peut nourrir le discours de Harlem Desir quant au supposé « modèle municipal de gauche », et son espérance d’une relative déconnexion du scrutin par rapport a la politique nationale. Cependant, si l’on considère que cette prime locale jouera aussi pour les maires sortants de droite – avec l’exemple extrême de Bordeaux, ville ayant voté majoritairement pour François Hollande mais dont 90 % des habitants apprécient Alain Juppé comme maire, et se préparent a le réélire au premier tour –, les perspectives de conquête de nouvelles villes par la gauche n’en sont que plus réduites.

Les élections se déroulent à peine deux semaines après la publication de "l'affaire Copé" par Le Point, par la divulgation des enregistrements par Patrick Buisson par Le Canard Enchainé et Atlantico, et par la révélation de la mise sur écoute de l'ex-président Nicolas Sarkozy par Le Monde. Dans ce contexte, que peut attendre la droite ?

Des victoires, tout simplement : à Strasbourg, à Amiens, à Valence, à Toulouse et dans nombre d’autres villes. Leur impact psychologique dépend d’un éventuel succès défensif a Marseille, ou Jean-Claude Gaudin a refait une grande partie de son retard dans les secteurs décisifs de la ville. Il s’agit pour elle aussi de briser une spirale descendante et de stopper l’attraction qu’exerce le Front national sur ses electeurs. En d’autres termes, elle doit enfin réussir à apparaître comme le debouché politique du mécontentement des Français. En une période où l’UMP n’était appreciée que de 37 % des Français, avant « l’affaire Copé », il y a urgence. D’autant plus que selon les premieres etudes realisées sur le sujet, par exemple par BVA pour Le Parisien, l’image de Nicolas Sarkozy en est egalement affectée.

Selon une enquête BVA pour i>télé « CQFD » et le Parisien, 81 % des Français estiment que les affaires affectent l’ensemble de la classe politique française, et 69 % (contre 54 % il y a trois ans) pensent que la corruption y est bien présente. L'issue des élections municipales est-elle remise en cause par cette semaine horribilis ?

Ma réponse est très claire : selon moi, très peu, voire pas du tout. Les raisons sont multiples. Tout d’abord, l’opinion est installée depuis longtemps, un quart de siècle, dans un jugement exagérément sévère sur les élus. L’étude annuelle sur la confiance menée par Ipsos montrait cela avant cette vague d’affaires, qui ne concernent d’ailleurs pas les pouvoirs locaux, a l’inverse de celles que l’on a connu au début des années 1990. Par ailleurs, dans la composante nationale du vote municipal, l’essentiel tient en l’incapacité du gouvernement à tenir ses promesses sur l’emploi, la fiscalité et la justice sociale. Enfin, les développements récents touchent aussi certains ministres, donnant à l’opinion l’impression d’un match nul. Donc l’élément stratégique du prochain scrutin, la sur-abstention des sympathisants de gauche, n’en sera pas changé. Et l’effet paradoxal de cette exaspération de l’opinion, l’attirance pour les listes FN et donc la possibilité de nombreuses triangulaires salutaires pour le PS, non plus.

Propos recueillis par Marianne Murat

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