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Quand le recours à la transparence finit par masquer la dilution de la notion d'intérêt général
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Éditorial

Pour faire la transparence sur les comptes de l’UMP, Jean-François Copé s’est engagé à mettre à disposition "l’intégralité de toutes ses pièces comptables, des factures et autres justificatifs". Une belle résolution qui risque, comme pour l'affaire Cahuzac ou celle des profanateurs du cimetière juif de Carpentras, d'être jetée aux oubliettes une fois le coup de com' politique terminé.

Pierre Guyot

Pierre Guyot

Pierre Guyot est journaliste, producteur et réalisateur de documentaires. Il est l’un des fondateurs et actionnaires d’Atlantico.

 

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L’air grave, le teint pâle et la voix nouée par l’émotion de Jean-François Copé ont participé hier à cette curieuse sensation de Grand-Guignol qui n’était pas sans rappeler les gesticulations de l’avocat Gilbert Collard sur un plateau de télé, agitant au début des années 90 une enveloppe censée contenir les noms des profanateurs du cimetière juif de Carpentras ou, plus récemment, le décalage entre les promesses de François Hollande de rendre public le patrimoine des ministres et des parlementaires au lendemain des aveux de Jérôme Cahuzac et la loi finalement votée par les parlementaires concernés.

L’enveloppe de Gilbert Collard n’a jamais été descellée. Les députés et sénateurs ont lutté et obtenu que leur patrimoine soit rendu bien moins accessible au public que ce que le président de la République laissait entendre au printemps dernier (Il faudra pour les consulter se rendre en préfecture et leur publication est passible d’une amende de 15.000 euros). Pour la transparence des comptes de l’UMP, Jean-François Copé s’engage cette fois à mettre à disposition « l’intégralité de toutes ses pièces comptables, des factures et autres justificatifs », mais commence par entasser tous ces documents dans une pièce fermée à double tour. Il préconise plus de clarté, mais refuse de répondre aux questions après la lecture de sa « déclaration solennelle ».

Une fois de plus, la sacro-sainte transparence est exhibée et exigée par des politiques qui sitôt leur coup de com’ terminé s’empressent de jeter sur elle un voile opaque. Hier, Jean-François Copé a enchaîné si rapidement les deux étapes que le résultat final est d’un rare ridicule. Surtout, il a montré que la vieille ficelle qui consiste à associer à la notion de transparence la légalité, la vérité et l’honneur - comme le concevaient les philosophes des Lumières face aux démocraties occidentales naissantes, lorsque la moralisation de la vie publique passait par la disparition des secrets royaux et l’exigence de l’exposition au grand jour des gouvernances - commence à sérieusement s’effilocher.

Tout simplement parce qu’à trop invoquer la transparence - de surcroît sans la pratiquer ! -, les responsables politiques rappellent aujourd’hui à la société qu’elle se focalise trop sur le remède et qu’elle en oublie le principal : la maladie. La transparence est devenue une qualité de substitution qui s’impose à nous parce qu’elle en remplace d’autres, devenues presque insolites. L’idée de l’intérêt général, la vérité, l’intégrité sont des vertus sinon en voie de disparition, au moins en voie de raréfaction. Le recours à la « transparence » ne peut suffire seul à combler le vide qu’elles sont en train de laisser.

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