La chronique parlementaire : 50 nuances de sanctions pour députés<!-- --> | Atlantico.fr
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Raquel Garrido, aux côtés notament de Clémentine Autain, lors d'une réunion de la Nupes en février 2023
Raquel Garrido, aux côtés notament de Clémentine Autain, lors d'une réunion de la Nupes en février 2023
© AFP - Geoffroy Van der Hasselt

Chroniques parlementaires

La députée LFI Raquel Garrido vient d’être “sanctionnée” par son groupe parlementaire, qui a décidé de la priver, pendant 4 mois, de toute responsabilité interne. Elle ne pourra pas poser de question au gouvernement, ou être oratrice du groupe sur un texte.

Samuel Le Goff

Samuel Le Goff

Ancien assistant de députés, ancien journaliste parlementaire et aujourd'hui consultant, Samuel Le Goff fréquente le palais Bourbon et ses environs depuis 20 ans.

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Cela est techniquement possible, car ce sont les groupes qui désignent ceux qui s’expriment en leur nom, et les fameuses questions au gouvernement, qui permettent une belle exposition médiatique, sont également attribuées aux groupes, pas en direct à des députés. La sanction aurait pu être encore plus lourde, car ce sont également les groupes qui sont attributaires des places en commission permanente. Un président de groupe peut très bien déplacer un député d’une commission à l’autre. En 2014, le président du groupe PS, Bruno Le Roux, avait sorti les députés frondeurs des commissions sensibles et prestigieuses (Affaires sociales et Finances) contre leur gré.

Il aurait également été possible d’aller plus loin, en excluant la députée du groupe. C’est ce qui est arrivé à Adrien Quatennens en 2022, qui a siégé quatre mois sur les bancs des non-inscrits, avant d’être réintégré. En effet, pour qu’un député siège dans un groupe, il faut qu’il le souhaite, mais également que le groupe l’accepte. Il n’est pas rare que des députés se retrouvent ainsi exclus à titre disciplinaire, on a eu quelques exemples lors du dernier mandat. Martine Wonner, élue sous l’étiquette LREM en 2017, a quitté la majorité pour rejoindre le groupe LIOT, avant de s’en faire débarquer, pour avoir appelé les manifestants à attaquer les permanences des députés.

Ces sanctions venues des groupes parlementaires, autant gênantes qu'elles puissent l'être, ne privent pas le député concerné de ses pouvoirs et prérogatives. Même non inscrit, il peut déposer des amendements, participer aux débats et voter. Il est juste isolé et donc moins efficace dans l’exercice de son mandat.

Ces sanctions de groupes sont différentes de celles qui peuvent être prononcées par les instances de l'Assemblée, et qui peuvent être plus lourdes. Le Bureau peut prononcer des amendes, pouvant aller du quart à la moitié de l’indemnité, et une exclusion temporaire, qui interdit au député de venir dans l’enceinte de l’Assemblée, et donc d’exercer son mandat. La sanction maximale est la censure avec exclusion temporaire, qui entraîne la perte de la moitié de l’indemnité pendant deux mois, et l’interdiction d’entrée à l’Assemblée pendant 15 jours de session (ce qui donne globalement trois semaines de congé au député).

Enfin, la justice peut intervenir, avec une sanction radicale, la perte du mandat. En cas de condamnation pénale d’un élu, un juge peut prononcer la perte des droits civiques, qui entraîne automatiquement la déchéance du mandat. Une fois que la peine est devenue définitive (ce qui peut prendre du temps), le Conseil constitutionnel est saisi et prononce la démission d’office du député, qui entraîne une élection partielle.

Malgré cet arsenal, nous sommes encore loin des pays les plus en pointe, comme le Royaume-Uni, qui dispose d’un panel beaucoup plus varié. En cas de sanction disciplinaire d’un certain niveau de gravité (plus de 10 jours de suspension), une pétition est ouverte pour six semaines dans la circonscription du député. Si 10% des électeurs la signent, il est démis de son mandat et une élection partielle (à laquelle le sortant peut se présenter) est organisée. 

Plusieurs députés, sanctionnés pour des faits de harcèlement (moral et sexuel) sur leurs collaborateurs, ont ainsi été débarqués par leurs électeurs. La plus célèbre victime de ce système n’est autre que Boris Johnson. L’ancien premier ministre a préféré démissionner, la veille de la publication du rapport qui préconisait de le suspendre pour trois mois, pour avoir délibérément menti au Parlement, sur les fêtes organisées à Downing Street pendant les confinements. Cela aurait entrainé l’ouverture d’une pétition, qui n’aurait pas manqué d’obtenir les signatures nécessaires, rendant ainsi encore plus humiliant son départ de la vie politique.

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