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Veut-on vraiment effacer toutes les inégalités face à la conception des enfants ?
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Editorial

Alors que la femme est, en matière de conception des enfants, toute puissante, l'homme n'a quant à lui aucune possibilité de choix.

Pierre Guyot

Pierre Guyot

Pierre Guyot est journaliste, producteur et réalisateur de documentaires. Il est l’un des fondateurs et actionnaires d’Atlantico.

 

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Hasard de calendrier ou flair de l’éditeur ? C’est alors que le débat sur le mariage pour tous - et dans la foulée sur le droit de toutes et tous à avoir un enfant - est en pleine actualité que l’avocate Mary Plard publie le fort intéressant ouvrage "Paternités imposées"[1]. Cette féministe revendiquée y raconte ses combats juridiques pour plusieurs de ses clients : des hommes qui un beau matin ont appris par un coup de fil, ou plus brutalement encore par une assignation en justice, qu’ils allaient devenir père… Plusieurs semaines, mois ou même années après ce qui ne fut souvent qu’une rapide étreinte entre adultes consentants - alors que jamais l’idée d’une relation "sérieuse", et encore moins celle d’avoir un enfant, ne fut abordée par les protagonistes - ces hommes ont vu leur vie profondément bouleversée, le regard de la société les accuser et, peut-être plus grave que tout le reste, leur libre arbitre nié.

Car c’est une étrange situation que celle de la femme face au choix de la conception. Trop souvent cantonnée à un rôle de faire-valoir dans de nombreux schémas sociaux, quasi systématiquement moins payée que les hommes à compétences égales, plus fréquemment victime qu’eux des agressions sexuelles ou de la violence conjugale, la femme est, en matière de conception des enfants, toute puissante.

A de rares et dramatiques exceptions près, elle peut aujourd’hui choisir de devenir mère ou non, choisir le moment où elle le devient, choisir celui qui sera le père de son enfant. Elle peut au contraire décider de ne pas garder un enfant, d’avoir recours à l’interruption volontaire de grossesse ou à l’accouchement sous X. En face, l’homme n’a, lui, aucune possibilité de choix. Et aucun droit. Il ne peut refuser de se soumettre à un test ADN si la justice le lui impose (tout refus est aussitôt traduit par une reconnaissance automatique en paternité), pas plus qu’il ne peut imposer à une femme de garder un enfant dont elle ne veut pas ou l’obliger à avorter.

Il n’est bien sûr pas question de permettre à un homme de forcer une femme à garder ou non son enfant, agression qui attenterait évidemment à l’intégrité du corps de cette dernière. Mais il est surprenant, à la lecture du livre de Mary Plard, d’observer combien les arguments de la justice et de la société contre ces pères contraints et forcés, sont identiques à ceux qui étaient avancés il y a 40 ans par les adversaires de la loi Veil sur l’IVG.

On reproche à ces hommes d’être "sexuellement libérés" (trop ?), parce qu’ils ont ou ont eu des relations sexuelles en dehors d’un schéma conjugal classique. Quelle différence avec ces femmes que certains députés n’hésitaient pas, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, à traiter de "salopes" parce qu’elles revendiquaient leur droit à vivre librement leur sexualité ? On reproche à ces hommes de ne pas s’être "protégés" (protégés de quoi ? Des maladies sexuellement transmissibles ou d’un enfant non désiré ?) Quelle différence avec celles qui étaient autrefois critiquées "parce qu’elles n’avaient qu’à prendre leurs précautions" ?

Faire le constat de cette situation ne permet pas pour autant d’y répondre. Rétablir un équilibre entre le droit des hommes et des femmes face à la conception d’un enfant est-il seulement possible ? De la même manière, si le sujet est bel et bien abordé dans le projet de loi sur la famille que le gouvernement promet avant la fin de cette année, il ne va vraiment pas être simple de répondre par une loi à l’exigence d’égalité entre homosexuels et hétérosexuels face au désir d’enfant.


[1] Paternités imposées, Mary Plard, Editions "Les liens qui libèrent"

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