Vers une hausse des prix de l'électricité : la facture du déni gouvernemental ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Jeudi matin, Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), a annoncé une hausse probable des tarifs de l'électricité de 10% à 20% pour début 2024. Une information démentie par Bruno Le Maire dans la journée.
Jeudi matin, Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), a annoncé une hausse probable des tarifs de l'électricité de 10% à 20% pour début 2024. Une information démentie par Bruno Le Maire dans la journée.
©DENIS CHARLET / AFP

Explosif

Jeudi matin, Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), a annoncé une hausse probable des tarifs de l'électricité de 10% à 20% pour début 2024. Une information démentie par Bruno Le Maire dans la journée.

Damien Ernst

Damien Ernst

Damien Ernst est professeur titulaire à l'Université de Liège et à Télécom Paris. Il dirige des recherches dédiées aux réseaux électriques intelligents. Il intervient régulièrement dans les médias sur les sujets liés à l'énergie.

Voir la bio »

Atlantico : Jeudi matin, Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), a annoncé une hausse probable des tarifs de l'électricité de 10% à 20% pour début 2024. Une information démentie par Bruno Le Maire dans la journée. Qui peut-on vraiment croire ?

Damien Ernst : En France, l’électricité est subsidiée. Dès lors, Emmanuelle Wargon souhaite traiter cette commodité électrique comme n’importe quelle autre, mais Bruno Le Maire se rend bien compte que c’est sociétalement explosif puisque les Français ont toujours l’impression que l’électricité est un bien public et que l’État ne peut pas en augmenter le prix. Les Français doivent se rendre compte qu’ils vivent dans une sorte de bulle par rapport à leurs voisins et que l’électricité doit être tarifée aux prix du marché, comme le pétrole ou le gaz.

Deux visions s’affrontent donc, une plus ou moins libérale, qui croit en les marchés et qui veut considérer la commodité électrique comme une autre, avec un prix régulé en dessous de celui du marché. De l’autre côté, Bruno Le Maire croit encore en cette vision d’un EDF société d’État qui assure une électricité bon marché dont le prix est régulé.

Il y a quand même, notamment avec la fin de l’ARENH, cette obligation pour EDF de vendre son électricité nucléaire entre 45 et 50 euros du MWh. On voit donc que la France va abandonner ses tarifs régulés. Je pense donc que les engagements tenus par Bruno Le Maire ne seront pas tenus et que la France entre dans une ère de l’électricité dérégulée.

À Lire Aussi

Nos réseaux électriques ne sont pas taillés en l’état pour la transition énergétique et personne ne s’en préoccupe vraiment

Derrière cette hausse des prix de l’électricité, dans quelle mesure peut-on voir la facture du déni gouvernemental ?

Le gouvernement va arrêter de subventionner l’électricité au travers d’EDF, qui gagne moins d'argent. L’objectif est clairement de renflouer les caisses d’EDF pour que l’entreprise ait une capacité financière propre pour investir dans de nouveaux projets nucléaires. Derrière cette augmentation des tarifs de l’électricité, il y a une volonté d’aligner les prix sur ceux du marché pour qu’EDF puisse avoir les capacités de réinvestir.

Le gouvernement français a fait le choix, dès le début des années 2000, de voter la dérégulation du secteur de l’électricité, afin de privilégier le marché européen. Le gouvernement, en raison de ces mesures, va dans ce mouvement qui aboutit à une augmentation des prix, sans adéquation avec le concept du libre marché. Lorsque l’on observe l’évolution du prix de l’électricité, on se rend compte que les ménages français sont clairement les grands perdants de cette affaire.

Alors que la structure du marché de l’électricité n’a pas changé depuis l’année dernière, comment une évolution positive pourrait-elle arriver en 2023/2024 ?

Le prix du gaz est toujours à 40 euros du MWh, ce qui détermine le prix de l’électricité. Comme ces prix sont toujours deux fois plus élevés que par rapport aux prix de référence, avant la crise du Covid, cela aboutit à une multiplication par 2 à 2,5 des prix de l’électricité. Le mouvement inflationniste que l’on a observé ces dernières années a également provoqué cette augmentation des coûts de l’énergie, ce qui ne devrait pas s’arrêter. 

Je pense que l’augmentation du tarif régulé est indispensable pour suivre l’augmentation du prix de l’énergie sur les marchés de gros. Sans augmentation des prix, EDF pourrait se retrouver dans de grandes difficultés financières, ce qui obligerait l’État à soutenir la compagnie. Il serait donc préférable de supprimer les tarifs régulés et l’ARENH pour ne pas se retrouver en porte-à-faux avec l’Europe.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !