Traces de microplastiques dans l’eau en bouteille : un alarmisme sans véritable fondement scientifique<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Environnement
Une étude sur l’eau en bouteille a été très largement relayée dans les médias et sur les réseaux sociaux ces dernières semaines.
Une étude sur l’eau en bouteille a été très largement relayée dans les médias et sur les réseaux sociaux ces dernières semaines.
©Denis CHARLET / AFP

Pollution

Des chercheurs ont calculé la teneur en nanoplastiques contenue dans une bouteille d'eau. La grande difficulté dans le cas de l’analyse des micro et des nanoplastiques réside dans la manière dont les échantillons sont préparés afin de réduire le risque de contamination.

François Galgani

François Galgani

François Galgani est responsable de projet à l'Ifremer et spécialiste d'écotoxicologie marine. Il est particulièrement concerné par les effets toxicologiques des pollutions à caractère industriel sur les organismes marins.

Il est par ailleurs  spécialisé dans le suivi des déchets en mer et sur le littoral, leur dégradation et leurs impacts  sur la faune marine. A ce titre, il coordonne un groupe européen en support à la mise en place de la directive Stratégie pour le milieu marin.

Voir la bio »

Atlantico : Une vaste étude sur l’eau en bouteille, qui serait massivement polluée par des nanoparticules de plastique, a été très largement diffusée dans les médias ces dernières semaines. N’y a-t-il pas un problème de méthode à travers cette publication ? Selon certains experts, une solution de référence, le blanc, aurait été utilisée et permettrait de prendre en compte les éventuelles contaminations liées à la méthode de préparation des échantillons. Cela aurait-il pu fausser les travaux de cette étude ?

François Galgani : Il y a deux points dans l'article, c'est la mise au point d'une méthode, le premier point le plus important. Et aussi l'utilisation pour montrer que ça marche sur des échantillons. Sur la méthode, on sait fabriquer des nanoparticules, c'est-à-dire qu'on voit que ça fait des anneaux plastiques, de l'ordre de 100 nanomètres, on peut les tester, regarder la toxicité. On prend la solution qu'on a préparée, on teste sur des animaux ou autre, peu importe, mais une fois qu'ils sont dans la nature, personne ne sait si vous voulez doser in situ et mesurer des nano plastiques et donc l'originalité de la méthode qui a valu d'ailleurs cet article, c'est que ça permet de descendre et de visualiser de manière individuelle chaque particule. C’est remarquable. À partir du moment où ils descendent à des particules de l'ordre de 100 nanomètres, ce qui n'était pas possible avant, cela ouvre la voie à la détection in situ dans les milieux naturels, que ce soit dans l'air ou dans l'eau. Nous n’avions pas véritablement de technique pour visualiser individuellement chaque particule. 

Ensuite, ils ont utilisé cette méthode pour montrer que ça marchait sur des échantillons. Ils ont pris des bouteilles de plastique, ils ont testé et ils arrivent à des concentrations très importantes. Et c’est là où on peut discuter sur le fait que le blanc n’est pas la solution parfaite, sans qu’il y ait réellement de contrôle. Alors on aurait pu diminuer les concentrations qui sont annoncées, ça j'en conviens. Ça dépend en fait des résultats du contrôle. En somme, il y a une méthode, mais le nombre de nanoparticules de plastique n’est peut-être pas aussi important. 

C’est un gros progrès sur le plan technique. Sur les applications de cette solution, il y a peut-être encore des discussions, mais malgré tout, ça veut dire qu'on est capable de montrer qu'il y a beaucoup de particules dans l'eau, quel que soit le chiffre. C'est ça qui compte, si vous voulez. Et là, pendant quelques années maintenant, il va y avoir des gens qui vont vous dire que c'est plus et moins selon la marque, selon le pays, selon la source, etc. Et puis après, il y a des gens qui vont aller en mer, il y a des gens qui vont aller directement prendre l'eau du robinet. 

Est-ce que la difficulté liée aux problèmes de quantité de particules par litre qui est impactée par l’eau du blanc ne remet pas en cause le calibrage de la méthode d’analyse et la portée des résultats ?  

C’est la première fois qu'on présente cette technique. Elle peut évidemment évoluer, s’améliorer. Je ne pense pas qu’il faille contester la méthode. Il faut contester, discuter plutôt sa mise en œuvre, qui pourrait donner des chiffres inexacts. 

Alors que la méthode utilisée est innovante et au regard des conclusions assez alarmistes de l’étude, est-ce qu’il n’y a pas eu un emballement médiatique autour de cette étude ? Les journalistes n’ont-ils pas suffisamment bien vulgarisé scientifiquement les principaux enseignements de cette étude ? N’y a-t-il pas un risque de provoquer de la panique chez les consommateurs ? 

Nous avons les techniques pour dire d'abord qu'il y a des nanoparticules, ça on ne peut pas le contester et surtout qu'on va affiner les chiffres à l’avenir. Ayant été associé à des opérations de communication sur la quantité de microplastiques en mer, je sais que les chiffres sont discutés, discutables, ça va de quelques milliers de milliards à quelques centaines de milliers de milliards de microplastiques présents dans les océans.

Donc, vous voyez, c'est très variable parce qu'on n'a pas suffisamment d'échantillons, parce que c'est long. C'est comme pour le climat, si vous voulez une simulation entre la montée des eaux, tout le monde ne sera pas d’accord sur les chiffres, même si nous savons que cette montée des eaux n’est pas discutable. Concernant le consommateur, il faut simplement leur dire que ce sont des chiffres provisoires et ne pas dramatiser la situation.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !