Fiscalité : les petites entreprises crient à l'injustice<!-- --> | Atlantico.fr
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les bénéfices des PME plus taxés que ceux des grandes entreprises.
les bénéfices des PME plus taxés que ceux des grandes entreprises.
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Quand Goliath écrase David

Les bénéfices des PME seraient taxés à 39 % contre ... seulement 19 % pour les grandes entreprises, d'après un rapport de la Direction du Trésor. Un système fiscal à deux vitesses dont les petites entreprises voudraient avoir la peau.

Jean-Eudes du Mesnil

Jean-Eudes du Mesnil

Jean-Eudes du Mesnil est secrétaire général de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME).

 

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Atlantico : Un rapport de la Direction du Trésor révèle que le taux implicite d’imposition pour les PME est de 39 %, contre 19 % pour les grandes entreprises. Est-ce que vous confirmez ces chiffres ?

Jean-Eudes du Mesnil : Cette notion de taux de taxation implicite sur les bénéfices qui est mentionné dans le rapport, c’est simplement un ratio économique (entre les recettes d'impôt sur les sociétés perçues par l'Etat et leur excédent net d'exploitation, NDLR ). C’est quelque chose de nouveau, dont  j’entends parler pour la première fois.

Sur le constat, on est entièrement d’accord, même si pour nous les chiffres qui font référence en la matière sont ceux, légèrement différents, du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) : on était à un taux de taxation de 27 % sur les PME, à 8 % pour les grands groupes, et à 13 % pour les entreprises de moins de 2 000 salariés.

Nous sommes davantage gênés par les deux types d’explications données par la Direction du Trésor et reprises dans l’article des Echos pour expliquer cet écart : d’une part, la déductibilité des intérêts d’emprunts, et d’autre part le fait que les petites boîtes n’aient pas la même durée de vie que les grandes – beaucoup disparaissent rapidement – et donc que les mécanismes de report des déficits sur les bénéfices futurs ne peuvent pas exister de la même façon dans les petites entreprises que dans les grandes.

Ca ne suffit pas ! L’idée qu’on en a, c’est qu’il y a bien un écart de taxation entre les grands et les petits, et qu’il y a une politique d’optimisation fiscale de la part des grands entreprises. Prenons l’exemple précis du crédit impôt recherche : il profite, certes, aux PME, mais il profite encore davantage aux grandes entreprises, alors que c’est une mesure qui coûte cher, à hauteur de 5 milliards d’euros par an.

Est-ce que l’on peut parler d’une injustice fiscale entre petites et grandes entreprises ?

Je ne sais pas s’il y a une injustice en tant que telle, mais l’accumulation de mécanismes, de niches, de systèmes dérogatoires aboutit à un résultat tel qu’au bout du compte on s’aperçoit que les grandes entreprises sont moins taxées que les petites. On leur offre des possibilités de payer moins d’impôts, que les PME ne sont pas en capacité d’utiliser parce qu’elles n’en ont ni les moyens, ni les connaissances, ni l’expertise, et qu’elles n’ont pas non plus la surface pour jouer d’un territoire sur un autre.

Il ne s’agit pas de dire que les grandes entreprises doivent payer plus d’impôts, mais de demander un système égalitaire dans lequel il n’y aurait pas de distorsions de concurrence par la fiscalité. D’autant qu’il y en a aussi d’autres.

On a fait une enquête récemment sur l’accès aux marchés publics. On s’aperçoit que 80 % des PME considèrent que dans les commandes publiques l’Etat privilégie les gros groupes par rapport aux PME. Qu’on ne nous dise pas que l’on ne peut rien faire là-dessus. C’est quand même l’Etat qui décide.

De la même façon, il est plus dur pour les PME de faire du lobbying au niveau européen car leur représentation est plus éclatée, alors que grandes entreprises ont des relais et des lobbyistes qui sont plus efficaces et qui ont des moyens supplémentaires. Les PME n’ont que les quatre représentants de la CGPME à Bruxelles qui font des moulinets avec leurs petits bras !

Vous demandez une réforme radicale de la fiscalité sur les entreprises ?

Ce que l’on a demandé la semaine dernière au Premier ministre à Planète PME, c’est que l'on arrive tout simplement à une progressivité de l’impôt sur les sociétés. C’est-à-dire que, plutôt que d’avoir comme à l’heure actuelle un taux marginal et un taux réduit, on puisse avoir un vrai impôt progressif avec des tranches de chiffre d’affaires qui serait beaucoup plus égalitaire.

La réponse de Christine Lagarde a été claire et nette : dans l’immédiat, ce n’est pas à l’ordre du jour, et en plus on rentre dans une période électorale. Voilà. Elle nous laisse peu d’espoir mais cela ne nous empêchera pas de continuer à le demander et à finir par l’obtenir.

Il faut peut-être aussi réorienter certains mécanismes dans un sens plus favorables au PME. C’est le cas récemment du crédit d’impôt sur l’intéressement, dans la dernière loi de finance. Précédemment, vous pouviez avoir un crédit d’impôt à hauteur de 20 % des sommes distribuées dans le cadre de la mise en place d’un nouvel accord d’intéressement dans toutes les entreprises. Dans le dernier projet de loi de finance, ils ont modifié la donne, ils ont placé la barre à 30 % des sommes distribuées, mais uniquement pour les entreprises de moins de 50 salariés.

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