Copwatch : quand le pouvoir politique reste impuissant face au web<!-- --> | Atlantico.fr
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Certains hébergeurs et fervents défenseurs du site Copwatch ont hébergé ledit site sur une nouvelle adresse et les sites miroirs se sont multipliés sur le Net, créant ainsi un réel "effet Streisand".
Certains hébergeurs et fervents défenseurs du site Copwatch ont hébergé ledit site sur une nouvelle adresse et les sites miroirs se sont multipliés sur le Net, créant ainsi un réel "effet Streisand".
©Flickr/CC árticotropical

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Fin 2011, le site internet américain "Copwatch" avait nourrit la controverse dans son adaptation en France. Bloqué en octobre dernier, le site a été accueilli par d'autres hébergeurs sur une nouvelle adresse. La lutte serait-elle sans fin ?

Antoine Chéron

Antoine Chéron

Antoine Chéron est avocat spécialisé en propriété intellectuelle et NTIC, fondateur du cabinet ACBM.

Son site : www.acbm-avocats.com

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Le site internet "Copwatch" dont l’objectif revendiqué est de stigmatiser les violences policières et de dénoncer les liens que certains membres des forces de police entretiennent avec l’extrême droite, fut l’objet de critiques acerbes de syndicats policiers et du gouvernement.

En effet, les noms, photographies et adresses de centaines de policiers y étaient publiés, exposant parfois les fonctionnaires de police à des difficultés dans leur vie privée.

Une action en référé devant le Tribunal de Grande Instance de Paris avait été initiée par le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, à l’encontre, non pas des hébergeurs du site, mais des fournisseurs d’accès à internet (FAI), afin qu’ils bloquent certaines pages du site internet qui relayaient des propos diffamatoires ou divulguaient sans autorisation des données à caractère personnel.

Le ministre de l’Intérieur a obtenu gain de cause du Tribunal en date du 14 octobre 2011. Du fait de l’impossibilité matérielle et technique de rendre inaccessible quelques pages du site, le président du TGI de Paris a ordonné aux FAI le blocage total de l’accès au site.

D’aucuns auraient pu penser que l’affaire aurait été close, mais comme pour d’autres affaires (Arrrgh, Wikileaks, Stanjames…), certains hébergeurs et fervents défenseurs du site Copwatch ont, en effet, hébergé ledit site sur une nouvelle adresse et les sites miroirs se sont multipliés sur le Net, créant ainsi un réel "effet Streisand".

Par conséquent, du fait de la résurgence du site Copwatch, le ministre de l’Intérieur a annoncé en date du 24 janvier 2012 avoir saisi une nouvelle fois les tribunaux.

Dans le cadre de cette nouvelle procédure dont l’audience se tiendra le 7 février 2012, Claude Guéant se prévaut du décret d’application de la loi n°2010-476 du 12 mai 2010 qui vient d’être promulguée il y a quelques semaines. Ce texte permet d’enjoindre aux FAI de bloquer un site litigieux par le système de nom de domaine (DNS), plus efficace que le blocage URL.

Cependant, les ordonnances judiciaires sont relativement inefficaces au regard de "l’effet Streisand". Conscients de cette difficulté, les demandeurs à l’action vont très certainement anticiper ce phénomène en présentant des demandes plus larges qu’initialement, afin de couvrir le blocage du site et de ses miroirs.

En ce sens, une proposition intéressante a été présentée par les industries du cinéma dans un litige les opposants aux sites de téléchargement illicites Allostreaming.com, Alloshowtv.com, Alloshare.com et Allomovie.Leur demande consisterait à enjoindre les FAI et moteurs de recherche à créer "un partenariat" avec une société chargée de surveiller les changements ou modifications d’adresse internet des sites litigieux.

Les titulaires de droits ont suggéré que cette tâche soit confiée à la société TMG qui est un des prestataires de service mandaté officiellement par l’Hadopi pour collecter les adresses IP des internautes agissant sur les sites de téléchargement illicites.

Autorisation du juge

Selon ce système, les sites seraient identifiés par leurs "paramètres clés" et un "dispositif logiciel", qui permettrait à TMG de suivre les modifications d’adresse du site litigieux et de les signaler aux FAI. Il est également proposé qu’un certificateur de l’Association de Lutte Contre la Piraterie Audiovisuelle (ALPA) soit chargé de contrôler la procédure. Il ne serait donc plus nécessaire d’obtenir une autorisation du juge à chaque réapparition du site.

Au visa de l’article 6.I.8 de la LCEN et L.336-2 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que le juge des référés a le pouvoir d’ordonner "toutes mesures propres  à prévenir ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne"), il peut être envisagé que cette mesure soit effectivement ordonnée. Il convient de noter par ailleurs que cette proposition a bénéficié du soutien des Autorités.

En tous les cas, le juge devra déterminer si le blocage automatique de nouvelles adresses IP est une mesure adaptée et proportionnée à la préservation des droits de la défense. En outre, le législateur et le Conseil constitutionnel devront avaliser cette procédure dans laquelle une société privée aurait vocation à se substituer à l’Autorité judiciaire.

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