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Scandale Archegos : après GameStop, 2e tempête majeure pour Wall Street en moins de 6 mois
Scandale Archegos : après GameStop, 2e tempête majeure pour Wall Street en moins de 6 mois
©JOHANNES EISELE / AFP

Marchés financiers

La bourse de Wall Street connaît de nombreuses difficultés ces derniers mois. Plus de dix ans après le scandale de Lehman Brothers, plusieurs banques sont sous pression depuis quelques jours à cause de problèmes liés au fonds américain Archegos, qui a perdu plus de 10 milliards de dollars et se retrouve au bord de la faillite.

Atlantico : En moins d’un an, la bourse de Wall Street enchaîne les difficultés avec un marché de plus en plus secoué par certains événements inhabituels. Le dernier cas en date concerne Archegos, que s'est-il passé ?  L'utilisation par Archegos d'un effet de levier d'ampleur est-elle en cause ? 

Sébastien Laye : Les marchés financiers, en plus des nouvelles épidémiologiques (infections puis campagne de vaccination), sont régis par les interventions de la Fed, et ce qu’on pourrait appeler le Powell put, à savoir la protection et la liquidité apportée par le banquier central. Quand la liquidité est ainsi assurée par une source externe, les revirements peuvent être rapides car il y a toujours, in fine, un investisseur en dernier ressort, qui peut assumer votre risque. Il n’est donc pas incongru de voir des évènements de liquidité brutaux affecter les marchés américains. Par ailleurs, le régulateur me parait endormi à la barre depuis quelques années : les années Trump débridées se sont soldées par un manque de supervision des acteurs financiers, et j’anticipe une reprise en main de ce sujet par la nouvelle administration. Cet épisode ressemble à l’accident LTCM des années 90, en ce qu’il a exposé un risque systémique, intrinsèque au système car non régulé, dont personne ne semblait avoir conscience. Archegos n’était pas régulé ou surveillé car ce n’était pas une banque ou un fonds : son fondateur, Bill Hwang, a été un jeune gérant star, un Tiger cub, mais à la suite d’un délit d’initié toute gestion de fonds externe lui avait été interdit. Il avait donc transformé son ancien fonds en une holding pour gérer sa fortune, un family office. Or les family office ne sont pas régulés car s’ils ne gèrent pas d’argent pour des tiers. Archegos était beaucoup plus gros que d’aucuns estimaient, et apparemment Bill Hwang était devenu secrètement une des personnes les plus riches au monde, puisqu’on estime, avant cette chute, que ses positions personnelles valaient près de 10 milliards. C’était des investissements en action, par le biais de positions acquises avec un considérable effet de levier, et une certaine opacité dont les banques clientes sont complices : les outils utilisés étaient des Total Return Swaps et des Contract for difference : au lieu d’acheter directement des actions, Archegos prenait des positions directes ou dérivés, dont la volatilité et l’espérance de gain (ou perte) est plus grande que sur les actions. Indirectement, Archegos contrôlait ainsi 50 milliards d’exposition : à ce niveau, tout léger repli peut décimer un portefeuille….

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Qu'est-ce que cette affaire nous dit de la manière dont les grandes fortunes utilisent leur argent ?

Nous ne sommes pas en présence d’une fortune classique, mais d’un ancien gérant jouant avec son argent.  Comme une autre légende de l’industrie du trading, Steve Cohen, Hwang posait un risque systémique important pour les marchés, plus qu’une banque, sans que le régulateur en soit conscient : ce dernier court après les acteurs, à chaque scandale, à chaque crise : après les banques, les fonds subprime, puis les hedge funds, les SPACs, demain les family office ? Mais il semble dépassé par les innovations financières.

Archegos a suivi l’affaire GameStop, mais ce dernier scandale semble ne pas être le dernier.  Est-ce la preuve qu'un changement d'ampleur est en train de s'opérer à Wall street ? Quel futur doit-on anticiper pour la place boursière ?

Ces deux scandales que vous mentionnez sont de facture très différente, le seul lien est à nouveau un environnement volatile crée par la liquidité amenée par la banque centrale. Les deux acteurs sont antagonistes, puisque Archegos est plus proche des hedge funds qui ont été contrecarrés par les petits porteurs, traitant des tires sur des plateformes tels que Robin Hood.  Ce scandale est beaucoup plus inquiétant pour la réputation de la bourse américaine. Je prédis que ce thème de la régulation, comme après 2008, va refaire surface : Biden ne l’a jamais mentionné pendant la campagne, et ce fut un sujet de campagne plutôt pour Elizabeth Warren durant la primaire. Le gendarme boursier, la SEC, devrait bientôt être mise sous pression ;

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