Rebond de l’industrie française en février : simple éclaircie ou début de renaissance ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Rebond de l’industrie française en février : simple éclaircie ou début de renaissance ?
©

Chiffres

La production industrielle française a redémarré en février, en hausse de 0,7% par rapport à janvier, tirée par une augmentation de la production manufacturière (+0,8%).

Jean-Pierre Corniou

Jean-Pierre Corniou

Jean-Pierre Corniou est directeur général adjoint du cabinet de conseil Sia Partners. Il est l'auteur de "Liberté, égalité, mobilié" aux éditions Marie B et "1,2 milliards d’automobiles, 7 milliards de terriens, la cohabitation est-elle possible ?" (2012).

Voir la bio »

Atlantico : La production industrielle française a redémarré en février, en hausse de 0,7% par rapport à janvier, tirée par une augmentation de la production manufacturière (+0,8%). Est-ce le signe d'une inflexion conjoncturelle ou les prémices de la reprise?

Jean-Pierre Corniou : Il est beaucoup trop tôt pour tirer des leçons d’informations portant sur un seul mois. D’ailleurs en zone euro la production industrielle a baissé de 0,4% en janvier. Les paramètres économiques de l’Europe occidentale ne laissent pas présager une année 2013 euphorique avec une croissance légèrement supérieure à zéro et des capacités de production industrielle utilisées à moins de 80%. Mais les gouvernements s’accrochent à l’espoir que quelques fractions de points de croissance pourraient être le signal de la sortie d’un tunnel de cinq années déprimantes pour les pouvoirs publics comme pour les acteurs économiques. Toutefois l’économie n’étant qu’anticipation, il suffit d’un signal même très faible pour redonner espoir aux acteurs économiques.

Techniquement, dans un contexte de crédit peu cher et malgré cela une faible demande de crédit des entreprises, il n’y a que trois motifs raisonnables de penser au redémarrage de la demande : l’épuisement des stocks qui conduit, tôt ou tard, à une demande de reconstitution de stocks, l’obsolescence technique et l’usure, qui au-delà de l’allongement volontariste de la durée de vie des équipements conduit nécessairement à une demande de renouvellement, comme c’est le cas sur le marché automobile, et enfin l’innovation qui réduit artificiellement le cycle de vie des produits et équipements en anticipant la demande de renouvellement. Ces trois moteurs classiques vont agir avec certitude en 2013 et plus vraisemblablement 2014, mais il est difficile d’en prévoir l’ampleur. En termes d’emploi, ils vont faire sentir leur impact en premier lieu sur l’intérim dont l’industrie représente 45% des effectifs. Les chiffres de février 2013 confirment ce sentiment d’amélioration avec une croissance de 2,6% de l’intérim dans l’industrie entre janvier et février.

Globalement dans un marché mondial en croissance douce de l’ordre de 3%, comme en 2012,  la croissance française reste atone, la demande des ménages attentiste et les prévisions d’investissement des entreprises très plates.

Quelles sont les industries françaises en croissance aujourd'hui?

L’industrie française est perçue comme un secteur en régression. C’est une image déformée par le  prisme des réductions d’emplois. Mais la réalité est beaucoup plus complexe car la France demeure un des rares pays au monde à disposer d’une compétence globale couvrant la quasi totalité des besoins d’un pays industriel moderne, à l’exception de l’électronique et de l’informatique grand public. Mais c’est un secteur qui a perdu sur le territoire national plus de deux millions d’emplois depuis 1980, dont des centaines de milliers d’emplois dans les dernières années de crise. Aussi c’est une image négative qui domine l’opinion masquant toute embellie, tout îlot de prospérité relative. Or le système industriel étant totalement interdépendant, une meilleure performance d’un secteur, même très ciblée, a une influence positive. Bien que dans un contexte attentiste, la santé du seul secteur aéronautique a un effet bénéfique sur des milliers d’entreprises et sur de nombreux bassins d’emplois qui ne se limitent pas aux seuls sites d’assemblage. Ainsi l’industrie aéronautique, qui génère 250000 emplois, dont 37% d’ingénieurs et cadres, est bien répartie: Ile-de-France : 35%, Midi Pyrénées : 25%, Aquitaine 10%, PACA 8%, Pays de Loire 5% et Centre 3%. La bonne tenue des commandes d’avions civils a directement généré des milliers d’emplois nouveaux dans ces régions.

Toutefois cette réussite de l’ensemble du secteur aéronautique est isolée dans le contexte macroscopique industriel français. Il n’y a pas de raison de penser que l’automobile connaîtra une embellie en 2013, on table même sur une baisse de l’ordre de 6%. Les autres secteurs industriels - chimie, acier, verre, papier - très liés à la demande globale resteront en retrait en 2013 par rapport à une année 2012 médiocre.

Si en termes sectoriels globaux les indicateurs sont pessimistes, cela n’empêche pas de nombreuses entreprises françaises d’opérer de belles performances en croissance et en rentabilité. Cela tient à leurs stratégie mondiale, qui compense l’atonie de la zone euro par de meilleures performances asiatiques ou sud-américaines, à des acquisitions réussies, à leur capacité à exploiter les perspectives du développement numérique, à leur puissance d’innovation qui leur confère une image  positive.

Parmi les entreprises industrielles françaises de taille moyenne qui incarnent ces vertus, il faut citer le groupe SEB, leader mondial du petit électro ménager, qui a continué à croître en 2012 pour dépasser quatre milliards de CA. Gemalto a cru de 9 % en 2012 et prévoir une croissance à deux chiffres en 2013 dépassant 2,2 milliards de CA,  en fondant son développement sur la sécurité des transactions, électroniques. Legrand, spécialiste des infrastructures électriques et numériques du bâtiment (4,5 milliard de CA)  a connu une croissance de 5% en 2012 et réalise un quart de son chiffre d’affaires avce des produits nouveaux. Somfy, leader mondial de l’électrification des ouvrants,  a cru de 3,9% en 2012 et approche un milliard de chiffre d’affaires.

Ces entreprises ont en commun une politique de croissance réaliste et prudente, une maitrise d leur endettement, des dirigeants engagés sur le long terme et une stratégie d’innovation continue et de qualité perçue.

Certes les grandes entreprises françaises ne sont pas non plus en retard de performance. Les équipementiers automobiles Valeo ( CA en croissance 2012 de 8%), Plastic Omnium (+14%), Faurecia (+7,3%), Michelin (résultat opérationnel en croissance de 25%), l’électricien Schneider Electric, Sanofi, Air Liquide, Alstom tirent leur performance de leur présence mondiale comme de leur capacité à développer l’innovation et à maîtriser les coûts.

Ces exemples démontrent que l’image de l’industrie reste déformée dans l’opinion avec des  stéréotypes tenaces. L’industrie française, mondiale, innovante, leader existe. Elle se renouvelle avec aux côtés de grands groupes historiques leaders mondiaux dans leurs secteurs des firmes actives et en pleine croissance.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !