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Les secrets de l’explosion du marché des livres express
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Fast Book

Le 9 mai prochain, les librairies recevront des dizaines de milliers d'ouvrages retraçant les campagnes politiques de Nicolas Sarkozy et François Hollande. Ces "quick books" bouclés dans l'urgence dès la fin de l'élection présidentielle plongent les Français dans les confidences politiques... et ils adorent ça.

Jean-Daniel Belfond

Jean-Daniel Belfond

Jean-Daniel Belfond est un éditeur français, fondateur en 1991 des Editions l'Archipel

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Atlantico : Beaucoup de "quick books" sont sortis durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, et d’ici le 9 mai, les librairies en recevront une grande quantité qui auront comme sujet la campagne les deux candidats. La France est-elle obsédée par la politique ?

Jean-Daniel Belfond : Les librairies ne seront pas assaillies par ces ouvrages comme on l’entend dire. Il faut bien réaliser de quel type d’ouvrages on parle. Les "quick books" sont des ouvrages bouclés à un moment précis, dans l’urgence, mais qui ont été travaillés pendant des mois. Nous avons demandé à deux couples d’auteurs de suivre chacun un candidat et de nous raconter en détails comment leurs campagnes se sont déroulées. Donc, ce n’est pas du commentaire politique, ce sont des instantanés, des off, des notes prises dans le vif qui permettent de mieux comprendre pourquoi une campagne a marché ou pas.

Si on regarde les ouvrages qui sortent, très peu de choses ressemblent aux publications que nous faisons. Un livre chez Flammarion intitulé Le Naufragé traite de Nicolas Sarkozy, un autre aux Editions du Moment a suivi le duel Sarkozy-Hollande. On a demandé à deux journalistes qui suivaient la campagne de façon précise de continuer à le faire pour leurs médias, quels qu’ils soient, mais aussi de réserver deux à trois heures par jour à l’écriture de leur journal, soit des notes intéressantes de ce qu’ils ont vu mais surtout qu’ils ne communiqueraient pas à leur média.

C’est pour cela que le quick book est intéressant car il permet, très peu de temps après les évènements, de rassembler une sorte de rétrospective de tout ce qui s’est passé depuis six mois, les interventions incontournables des uns et des autres, mais avec un travail journalistique et c’est souvent très plaisant à lire.

Cependant, ce sont des ouvrages consacrés à la politique, et il en sort beaucoup ces derniers temps. Existe-t-il un vrai public pour ce type d’ouvrages ?

Les livres de personnalités politiques ne se vendent pas, les lecteurs n’aiment pas ça car ils ont l’impression d’avoir une sorte de profession de foi et ils ne voient pas trop pourquoi débourser de l'argent pour connaître les pensées de tel ou tel personnage. Mais les livres qui racontent les coulisses d’une campagne politique intéressent. La même opération avait été menée en 2007, on avait publié un livre sur Ségolène Royal et un autre sur Nicolas Sarkozy, qui se sont écoulés respectivement à 40 000 et 25 000 exemplaires. En effet, les lecteurs ont l’impression de trouver dans ce genre de livres des informations qu’ils ne pourraient trouver nulle part ailleurs. Ils sont résolument différents du tout venant des ouvrages politiques.

Les journalistes, aux yeux des lecteurs, leur racontent des faits que les médias ne relatent pas. Ils donnent leur sentiment sur leur contact personnel avec l’homme politique et cela comprend des histoires inattendues, des réactions à chaud qui font de ces ouvrages des livres très vivants.

La personnalité de Nicolas Sarkozy en a fait un très bon client pour ce genre d’ouvrages. Pensez-vous que François Hollande intéressera autant les auteurs et les lecteurs ?

Tous les deux sont de bons clients et de bons professionnels. Ils ont bien entendu leurs différences, leurs qualités et leurs défauts mais restent des professionnels de la politique. D’ailleurs, il suffisait de les voir lors du débat télévisé, il n’y en a pas un qui a pris le pas sur l’autre, ce sont de vrais animaux politiques.

En revanche, nous avons pris le parti de faire deux tirages différents, 26 000 sur François Hollande qui entre à l’Elysée, et 10 000 sur Nicolas Sarkozy qui, lui, quitte l’Elysée. C’est normal, les gens sont plus friands de découvrir le nouveau président plutôt que l’ancien.

Justement, plusieurs ouvrages vont paraître dans un laps de temps assez court, le marché ne risque-t-il pas d’être saturé ?

La marché est déjà saturé par les médias, hier à 21h30, le JDD a fait une édition hors commerce, aujourd’hui c’est Paris Match, l’Express. L’édition, elle, repose sur des ouvrages d’en moyenne 300 pages qui approfondissent le sujet. Mais ceux qui gagnent sont ceux qui dégainent vite, il faut paraître en librairie rapidement car rien de se démode aussi vite que l’actualité. Les livres qui sortiront en juin sur l’élection présidentielle seront un peu démodés.

Vous avez précisé que c’étaient des journalistes qui rédigeaient ces ouvrages. Faites-vous attention à ce que leurs propos ne soient pas trop orientés, veuillez-vous à un certain équilibre de ce côté ou les auteurs ont-ils la main libre ?

Non, les auteurs sont équilibrés, et font attention à ce que leurs opinions politiques n’apparaissent pas de façon claire dans le livre, ce qui n’empêche pas d’être assez critique sur les candidats. Ces ouvrages ne sont pas des hagiographies, ce sont des livres de journalistes libres qui disent ce qu’ils pensent, et qui disent quand un candidat a été bon ou mauvais. Les faits sont relevés de façon tout à fait objective. Les journalistes sont engagés dans la recherche d’une certaine vérité.  

Cependant, il est toujours appréciable que l’auteur ait une patte, une plume qui mette en valeur ses propos pour que l’ouvrage ne soit pas plat et sans saveur.

Propos recueillis par Priscilla Romain

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