Prix agricoles, pétrole, or…les matières premières au plus bas depuis plus de 10 ans à l’opposé de toutes les prévisions<!-- --> | Atlantico.fr
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L’indice boursier CRB (reprenant l'ensemble des matières premières) est au plus bas depuis plus de 10 ans.
L’indice boursier CRB (reprenant l'ensemble des matières premières) est au plus bas depuis plus de 10 ans.
©Reuters

Brut de décoffrage

L’indice boursier CRB (reprenant l'ensemble des matières premières) est au plus bas depuis plus de 10 ans. Pourtant, dans les années 2000, nombre d'experts expliquaient que, étant donné la hausse de la population mondiale et le poids des pays émergents, la hausse du prix des matières premières était un phénomène inexorable.

Philippe Chalmin

Philippe Chalmin

Philippe Chalmin est professeur d’histoire économique à l’Université Paris-Dauphine où il dirige le Master Affaires Internationales. Membre du Conseil d’Analyse Economique auprès du Premier Ministre, il est le président fondateur de CyclOpe, le principal institut de recherches européen sur les marchés des matières premières.

Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages, dont le récent « Demain, j'ai 60 ans : Journal 2010 - 2011 ».

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Atlantico : Comment comprendre la baisse de l'indice boursier relatif aux matières premières aujourd’hui alors que la situation économique mondiale, en dehors de l’Europe, s'est améliorée ?

Philippe Chalmin : Cela s’explique essentiellement car nous avons eu une longue période de cours élevés, pendant quasiment 10 ans, qui a incité les producteurs à développer leurs investissements. Les prix étaient élevés et ils ont motivé des investissements importants. Nous sommes arrivés dans une période où les productions ont augmenté de manière considérable, au moment-même où le principal facteur de la hausse précédente qui était la demande chinoise ne croit plus à la même vitesse. Nombre de marchés sont donc passés d'une situation déficitaire à une situation excédentaire. La baisse des prix que nous observons en découle. A cela s'ajoute d'ailleurs des considérations d'ordre géopolitique comme dans le cas du pétrole avec le revirement de l'Arabie Saoudite. Globalement, la chute des prix actuels est moins liée à la baisse de la demande chinoise, qu'à l'augmentation considérable des productions pratiquement pour tous les produits, de l'énergie au produit agricole.

Nous vivons un phénomène relativement classique dans le monde des commodités. Il s'agit d'un cycle, même si certains parlaient de super-cycles ce qui était absurde. On a eu une période assez identique de prix élevés dans les années 70 par exemple ce qui s'est là aussi traduit par des investissements importants. Et dans les années 80-90 les prix étaient déprimés. A moyen terme, les besoins sont toujours là, simplement il y a ce cycle de l'investissement qui joue.

En l'espèce, la grande interrogation est de savoir si cela ne sera qu'un ajustement passager ou si, du fait d'une aggravation de la crise chinoise, nous pourrions connaître une situation bien plus grave. A savoir, pour l'instant, l'autre grand pays émergent qu'est l'Inde n'est pas en mesure de remplacer la demande chinoise.

Est-ce une chute générale, ou certaines matières sont davantage concernées que d’autres ?

La chute est générale pour l’énergie avec des histoires un peu différentes selon qu'il s'agisse du pétrole, du charbon ou du gaz naturel. La chute est quasiment générale pour les métaux, et ce, même pour l'acier ou le minerai de fer. La chute est souvent importante pour les produits agricoles avec quelques incertitudes néanmoins liées à la situation climatique. On continue à s'interroger sur des perturbations possibles des productions dans le pacifique. Mais les éléments dont on dispose sur les récoltes de l'hémisphère nord sont tout à fait excellentes. A l'heure actuelle il n'y a pas beaucoup de produits qui ne soient pas affectés par ce courant de baisses. Dans la rubrique des exceptions, on peut citer le cacao et c'est assez marginal.

Les produits alimentaires sont au plus bas depuis plus de 6 ans. Est-ce dû à une offre trop forte ? Quelle conséquence pour les agriculteurs par exemple notamment en France ?

La baisse des prix agricoles est importante, elle l'est notamment pour le sucre, pour les produits laitiers, un peu moins pour les céréales et les oléagineux. C’est essentiellement lié au fait que nous avons eu pour l'instant des conditions climatiques exceptionnelles tant l'année dernière que cette année. Bien entendu, on ne sait exactement  si cela va durer. La crise agricole française est liée à bien d'autres problèmes qui ont à voir avec des changements dans la politique agricole commune (PAC), qui sont aussi à mettre en lien avec des conséquences sur des marchés plus segmentés comme par exemple l’embargo russe sur les fruits et sur les viandes. Dans les produits agricoles français, la situation reste à peu près correcte pour les céréales par exemple.

Quelles sont les perspectives, à la fois pour l'indice CRB et pour les produits alimentaires de manière générale ?

Pour le gros des produits, on peut estimer que le gros de la baisse a déjà eu lieu. Il en va de même pour la plupart des produits agricoles. Comme souvent, nous sommes en présence de deux inconnus majeurs qui sont le climat, facteur essentiel, et la Chine. Le climat reste plus aléatoire que la Chine ! Mais les météorologues sont comme les économistes !
Je reste relativement confiant sur la persistance de la croissance chinoise.
Contrairement à ce que beaucoup de journalistes écrivent en liant la chute des matières premières à la situation de la Chine, cette chute est liée à la surproduction émanant des producteurs à l’échelle mondiale. 

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