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" Pourquoi n’est-il pas possible de se poser des questions sur l’IVG sans se faire traiter de fou furieux extrémiste? "
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Crispation

À l'occasion de la huitième marche anti-IVG, qui se tient ce dimanche à Paris, le bloggeur Koz analyse ce phénomène qui s'amplifie d'année en année et livre son sentiment quant à l'image controversée de ce mouvement.

 Koz

Koz

Koz est le pseudonyme d'Erwan Le Morhedec, avocat à la Cour. Il tient le blog koztoujours.fr depuis 2005, sur lequel il partage ses analyses sur l'actualité politique et religieuse

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Atlantico : La 8ème marche anti-IVG se tient ce dimanche à Paris, quel est le profil des manifestants ? N’y-a’il que des extrêmistes dans ce genre de cortèges ?  

Koz : Les manifestations anti-IVG rencontrent un succès grandissant. Chaque année, le mouvement s'amplifie. À l'origine, les marches étaient essentiellement initiées par les traditionalistes (rattachés à l’Église) et les intégristes (hors de l’Église), autrement dit des « pro-vie » associés à une droite radicale, voire extrême.
Cependant, ces dernières années, le public s'est élargi et diversifié. Il s'agit évidemment toujours de personnes aux convictions catholiques bien ancrées, mais qui ne partagent ni la virulence ni le discours d'une frange extrémiste.
Désormais, les marches anti-IVG ne sont plus des événements restreints. Ils sont par ailleurs de plus en plus soutenus par les évêques. 

Atlantico : Le soutien des évêques pourrait-il encourager les plus « modérés » des catholiques a afficher leurs positions et participer à ses marches ?

Koz : Il faut préciser qu’il n'y a pas un soutien global de la Conférence des Evêques de France. Chaque évêque décide du soutien qu’il entend apporter. L'implication grandissante de certains évêques est probablement en bonne partie due à l'impulsion des initiateurs du mouvement anti-IVG. Ils les ont mis, en quelque sorte, au pied du mur, dans un mouvement qui n’est d’ailleurs pas dénué de visées stratégiques afin, probablement, de crédibiliser leurs positions politiques et religieuses.

L’opposition à l’avortement est une conviction très largement partagée dans l’Eglise, mais il y a des façons de tenir cette conviction qui maintiennent à distance des personnes qui souhaitent l’exprimer sans transiger sur l’essentiel, mais de façon plus sereine. En effet, je pense que s’il y a encore un refus de la part de plus « modérés » de participer à ces marches, c'est bien parce que ces mouvements sont trop marqués par la droite dure, outre le fait que de nombreux catholiques en ont assez d’être systématiquement enfermés dans les mêmes débats.
En ce qui me concerne et en tant que catholique, je suis également contre l’avortement mais, par exemple, je n’emploierai en aucun cas des formulations telles que « loi inique » pour parler de la loi Veil, parce que je ne partage pas cette opinion. La finalité sanitaire initiale avait sa légitimité mais il y a bien longtemps que l’argument sanitaire est dépassé et qu’il sert de prétexte. Aujourd’hui, le soutien à l’avortement est idéologique et donne lieu à des élargissements incessants.


Il faut cesser de penser que les catholiques sont dans le registre de la dénonciation. A cet égard, comme à d’autres, ils se positionnent aussi du côté de la défense du plus faible : dans le cas de l'avortement, cela comprend la femme qui a pu être « victime » du comportement de certains hommes, mais aussi l'enfant à naître. Dans le cas de l’euthanasie, il s’agit aussi de défendre ceux qui, en fin de vie, sont en situation de faiblesse. Ce sont des enjeux qui ne devraient pas être marqués politiquement et qui devraient pouvoir être partagés à droite comme à gauche, chacun avec sa sensibilité.

Atlantico : Est-il envisageable en France d'avoir un discours et un échange serein sur la question de l'IVG ?


Koz : C'est en effet anormal de ne pas pouvoir parler sereinement de l'IVG, sans immédiatement passer pour un fou furieux ! S’affirmer opposé à l’avortement, c’est aujourd’hui l’assurance de recevoir une étiquette « infâmante » dans le débat public. Il y a un vrai tabou sur ce sujet, comme s’il s’agissait d’une vérité révélée, incontestable.
Le problème, c'est qu'actuellement le débat a été trop longtemps monopolisé par l'extrême droite dont le discours est marqué par la virulence et l'intransigeance. Cependant, il faut aussi reconnaître une responsabilité aux médias notamment, qui relayent surtout les discours les plus tranchés. C'est toujours les plus radicaux, qu'on entend. Et c’est souvent à eux que l’on tend le micro.
Tout l'enjeu de cette diversification (ndlr de la composition du cortège des anti-IVG) est donc justement de montrer qu’il est possible de soutenir cette conviction et de débattre sereinement !
C'est probablement aussi aux catholiques (ndlr les plus modérés) de prendre le risque et de s'avancer pour en parler calmement, et de manière argumentée, sans rester paralysés par la crainte d'être systématiquement étiquetés... Mais disons le franchement, c'est un travail de longue haleine.


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