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Philippe Rodet : “Pour être efficace, le concept de 'management bienveillant' doit être porté par le sommet de l'entreprise”
©Flickr/Victor1558

Bien-être et travail

Dans son dernier ouvrage co-écrit avec Yves Desjacques, "Le management bienveillant", Philippe Rodet nous explique comment il est possible, grâce à ce type de management, d'améliorer notamment la créativité et l'engagement en entreprise, tout en réduisant le stress.

Philippe Rodet

Philippe Rodet

Philippe Rodet a exercé la médecine d’urgence dans le cadre du SAMU et de l’assistance en réalisant des rapatriements sanitaires dans plus de cinquante pays. Homme engagé, il a participé à des missions humanitaires au Burkina-Faso, en Roumanie et à Sarajevo pendant la guerre.

Passionné depuis plus de vingt ans par l’interaction entre le stress et la motivation, il publie en 1998 L’ardeur nouvelle aux Editions Debresse et Le bonheur sans ordonnance aux éditions Eyrolles en janvier 2015. Son dernier ouvrage, Le management bienveillant, co-écrit avec Yves Desjacques, vient de paraître aux éditions Eyrolles. 

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Atlantico : Comment définiriez-vous la notion de "bienveillance" ? 

Philippe Rodet : En quelques lignes, je vais essayer de faire apprécier l'évolution du concept de bienveillance à travers trois grands auteurs : Aristote, Thomas d'Aquin et Emmanuel Kant.

Pour Aristote, être bienveillant, c’est par principe souhaiter gratuitement du bien aux autres. Pour Thomas d’Aquin, être bienveillant, c’est vouloir agir pour le bien d’autrui. Pour Emmanuel Kant, être bienveillant est un "devoir d'humanité", indépendant des variations de notre humeur et de nos affinités. Agir pour le bien d'autrui est un "devoir d'humanité". 

Quels moyens préconisez-vous pour introduire la bienveillance dans le management d'une entreprise ? Quels effets positifs sont attendus ? 

Dans l'entreprise, le comportement bienveillant consisterait donc à agir pour le bien d'autrui. Mais, qu'est-ce que le bien d'autrui ? Ne serait-ce pas agir pour que la personne humaine se réalise dans son travail et qu'elle soit en bonne santé ?

A tous niveaux, cela pourrait passer par le fait de fixer des objectifs accessibles avec un juste niveau d'effort, de faire en sorte que ces objectifs soient riches de sens aidant ainsi à se sentir utile, d'exprimer de la confiance en accordant suffisamment de liberté d'action, de témoigner de la gratitude source d'estime de soi, d'exprimer de la considération, d'être cohérent, de faire preuve d'empathie, de s'efforcer d'être perçu comme juste, de savoir reconnaitre ses maladresses, etc. Grâce à de nombreuses études, on sait comment ces comportements sont générateurs à la fois de succès et de santé.

On agirait donc bien pour le bien d'autrui, qu'il s'agisse de l'actionnaire, du dirigeant ou du collaborateur. Et au-delà de la santé et du succès, on irait chercher un phénomène éphémère mais, ô combien, précieux : le bonheur ! N'avons-nous pas remarqué que les pays où le bonheur individuel est le plus élevé sont les pays où les relations humaines sont de grande qualité, où nombre de personnes agissent pour le bien d'autrui ?

En tenant compte de l'organisation actuelle du travail et de la hiérarchie en entreprise, comment peut s'insérer le management bienveillant pour qu'il soit efficace ? 

Pour être efficace, le concept de "management bienveillant" doit être porté par le sommet de l'entreprise. C'est parce que le président adhère, c'est parce que le Comex se mobilise que les managers accepteront l'idée de faire des efforts pour adapter leurs comportements. Une fois cela réalisé, il est indispensable d'associer aux formations des incitations afin que chacun s'engage. Au bout de quelques semaines, les managers perçoivent l'intérêt de leurs nouveaux comportements et désirent les mettre en œuvre.

En résumé, il semble indispensable de commencer par la tête de l'entreprise et de mettre en place, en plus des sensibilisations, des incitations.

Quel bilan peut-on dresser, en l'état, de ce management bienveillant en France ? 

De plus en plus de grands groupes, mais aussi des plus petites structures, s'intéressent à ce mode de management. Dans un contexte où le niveau de stress progresse - passant de 40% à 61 % de personnes concernées en dix ans - et où la motivation baisse - entre 2013 et 2014, le pourcentage de collaborateurs démotivés est passé de 40 à 52% - le management bienveillant est en mesure d'améliorer la santé et l'engagement.

Qu'auraient à gagner les entreprises à véritablement adopter ce type de management ?

Si l'on augmente les émotions positives en donnant du sens, en fixant des objectifs au bon niveau, en accordant un juste niveau d'autonomie, en exprimant de la gratitude, des encouragements et si l'on effondre les émotions négatives en faisant l'effort d'être perçu comme juste, en reconnaissant ses maladresses, en évitant le mépris et l'incohérence, etc. , on va favoriser la sécrétion de deux hormones : l'ocytocine et les endorphines.

L'ocytocine diminue le niveau  de stress, augmente la générosité et l'empathie - et donc la cohésion des équipes - et améliore la créativité.

Les endorphines rendent la sécrétion de dopamine possible. La dopamine est l'hormone de la motivation et du plaisir. La motivation renforce l'engagement et le plaisir diminue le niveau de stress.

Grâce au management bienveillant, on irait donc chercher une meilleure santé avec moins de stress, des relations entre les personnes plus agréables,  de la créativité et de l'engagement. 

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