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Pétrole : les 5 choses qu’il faut savoir sur la décision de l’Arabie Saoudite de  réduire sa production
©FAYEZ NURELDINE / AFP

Couper les vivres

Pour maintenir les cours du pétrole, l'Arabie saoudite a annoncé, dimanche 2 avril, de nouvelles baisses de sa production pour un volume total de 500 000 barils par jour.

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec est un spécialiste de l’énergie et en particulier du pétrole et professeur à l’Ecole du Pétrole et des Moteurs, où il a dirigé le Centre Economie et Gestion. 

Il a publié plusieurs ouvrages et de nombreux articles sur des sujets touchant à l’économie et à la géopolitique de l’énergie et en particulier Exploitation et Gestion du Raffinage (français et anglais), Recherche et Production du Pétrole et du Gaz (français et anglais en 2011), l’Energie à Quel Prix ? (2006) et Géopolitique de l’Energie (français 2009, anglais 2011).

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L'Arabie saoudite a annoncé ce dimanche des réductions importantes de sa production de pétrole à partir de mai. Comment expliquer cette soudaine décision dans le contexte actuel ?

Jean-Pierre Favennec : A priori cette décision est surprenante lorsque l’on sait que la demande de pétrole reste soutenue. Cependant un certain nombre de facteurs sont à prendre en compte :

  • Déjà en octobre dernier l’OPEP + (les 13 pays de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole plus les 10 pays – au premier rang desquels la Russie -avec lesquels l’OPEP cherche à contrôler de manière collective la marché pétrolier)  avait décidé de réduire sa production de 2 millions cde barils par jour, équivalent à 2 % de la production mondiale et à 5 % de la production de l’OPEP +. Cette mesure était destinée à faire face à une éventuelle baisse de la demande, qui aurait pu être la conséquence d’une récession mondiale. Cette mesure, condamnée en particulier par les Etats Unis qui craignaient une hausse du prix de l’essence avant les élections de « mid-term »  n’a pas eu d’impact sur les prix..

  • Le prix moyen du pétrole en 2023 est pour l’instant inférieur au prix moyen de 2022, largement soutenu par les effets du conflit en Ukraine. Le Etats producteurs veulent éviter une baisse sensible de ces revenus. Tous les pays du Golfe ont des plans de développement dont le financement repose sur les ventes d’hydrocarbures

  • Le rapprochement entre l’Arabie Saoudite et l’Iran récemment effectué sous l’égide de la Chine a montré l’importance grandissante de Pékin dans la région. La réduction de la production décidée par quelques pays producteurs (au premier rang desquels l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis qui ont une influence très grande dans la région) n’a pu se faire qu’avec la « permission » de la Chine, qui importe chaque jour plus de 10 millions de barils de pétrole soit plus de 10 % de la production mondiale. La Chine doit contrôler les prix du pétrole pour éviter une explosion du coût de ses importations

  • L’annonce répétée par plusieurs pays, et en particulier par les pays Européens de vouloir réduire leur consommation d’hydrocarbures entraine une réaction naturelle de certains pays producteurs qui limitent leur production pour ne pas engorger les marchés.


Faut-il s’inquiéter de la hausse des prix du baril qu’a entraîné cette annonce. Faut-il craindre qu’elle dure ?

Le prix du pétrole a immédiatement réagi à l’annonce de l’Arabie Saoudite et a augmenté de plus de 5%. Le prix actuel est un retour au prix observé en moyenne depuis le début de l’année. Il n’est pas du tout certain que la hausse se poursuive. Le marché reste bien approvisionné par nombre de pays producteurs qui n’ont pas été associés à la décision de réduction de production portée par quelques pays seulement

Un prix voisin de 80 / 90 dollars par baril est sans doute satisfaisant pour les producteurs

A quel point les prix de l’essence vont-ils s’en ressentir ?

Mathématiquement le coût des carburants est augmenté de quelques centimes par litre. Le prix des carburants reste actuellement élevé, non pas du fait du prix du brut mais en raison de la forte augmentation de l’écart de prix entre le brut et les produits pétroliers (la marge de raffinage), conséquence de la guerre en Ukraine. La Russie est un très important producteur, non seulement de brut mais également de produits pétroliers et les sanctions ont entrainé une certaine pénurie d’essence et de gazole et la nécessité de réorganiser les circuits d’approvisionnement avec pour conséquence une augmentation des prix des produits pétroliers importés par les grands consommateurs.

Il est peu probable que la réduction de production décidée par certains pays producteurs ait un impact important sur les prix à la pompe.

En ces temps de crises énergétique et sociale, quel va être l’impact de cette réduction de production sur la France et plus largement l’Europe ?

Cet impact devrait être limité car le prix du brut reste actuellement inférieur à ce qu’il était fin 2021 et début 2022. La légère baisse des consommations, liée aux prix élevés des carburants, sera également un facteur amortisseur.


Peut-on transformer cette situation en opportunité pour la France et l’Europe ? 

Les écologistes se réjouiront peut-être de cette hausse qui va limiter la consommation de produits pétroliers et favoriser le développement des renouvelables.  Mais cette tendance est déjà une tendance de fond.

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