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Olympique de Marseille : Autopsie d'un échec
©BORIS HORVAT / AFP

Calvaire marseillais

La crise et le marasme sont là, les déconvenues se suivent pour l'un des clubs les plus populaires de l'hexagone. Voici pourquoi.

Olivier Rodriguez

Olivier Rodriguez

Olivier Rodriguez est entraîneur de tennis et préparateur physique. Il a coaché des sportifs de haut niveau en tennis. 
 
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Pour l'Olympique de Marseille, l'année 2019 débute comme s'était achevée l'année 2018: Par des échecs à répétition.

A mi-saison, le bilan est catastrophique et commotionnant: après s'être fait proprement éjecter de la Ligue Europa dès les phases de poules (sans gagner le moindre match), l'OM, sixième de Ligue 1, est déjà éliminé de toutes les coupes nationales. Le club est actuellement sur une série de 9 défaites en 13 matchs, toutes compétitions confondues. La pire humiliation étant la plus récente puisque c'est une équipe de National 2 qui a eu raison des marseillais en Coupe de France, la semaine passée. Ce n'est plus une photographie, c'est une épreuve. La chute est d'autant plus terrible qu'elle succède à un exercice précédent presque réussi. En finissant quatrième du dernier championnat et en atteignant de manière homérique la finale de la Ligue Europa, le club phocéen pouvait porter un regard optimiste sur la suite des évènements, en étant réellement ambitieux. Une question s'impose: comment ceux qui tutoyaient les sommets, sans toutefois les atteindre, se sont-ils transformés en représentants d'espoirs déçus ?

Ausculter les succès du précédent exercice nous oblige à commencer par rendre grâce au coach marseillais. L'an passé, Rudi Garcia a concrétisé le rêve secret de tous les entraîneurs: celui qui vise à obtenir le meilleur de ses joueurs et de son équipe. Il réalisa, par moments, l'alchimie parfaite. Son groupe forçait, en excédant ses moyens et en toutes circonstances, le succès. Qu'elle soit malmenée ou dominée, son équipe trouvait toujours la parfaite coagulation des volontés pour renverser les scores les plus défavorables. L'effectif était devenu capable d'arracher, dans la douleur et dans les dernières minutes, toutes les confessions, comme d'autres auraient fait avouer des innocents. La dynamique était portée par des joueurs qui sortaient du lot: Luiz Gustavo (la classe mondiale), Thauvin, Rami, Amavi et Payet accumulaient les bons matchs en ayant quasiment réponse à tout. Mais le propre du miracle est de ne pas pouvoir durer, et le club comme l'entraîneur ont semblé être certains de se reposer sur ce qui ne pouvait être pérenne. 

A bien y regarder, nous peignons là peu à peu, ce qui pouvait constituer un parfait trompe l'oeil. Car, finalement, quoi de plus inquiétant qu'une équipe totalement optimisée qui, tout en étant proche de tout rafler, finit par tout perdre ? Et on ne peut que reprocher à l'équipe dirigeante de ne pas avoir su cibler les manques et les perspectives à envisager, même en pleine réussite. Chercher les limites du système et avoir une vision lucide au moins à moyen terme, voilà ce qui a manqué aux têtes pensantes du club... Conséquence directe: le recrutement. Il est la pleine expression d'un échec d'abord politique, puis sportif. L'acquisition de Strootman en est l'illustration. Il faut dire qu'à ce prix-là, les rêves envolés ne sont vraiment pas bon marché. Pour justifier ses choix, Rudi Garcia s'est senti obligé de faire jouer ses recrues, pour un résultat catastrophique: Radonjic, Caleta-Car et donc Strootman empilent les prestations décevantes en perturbant l'équilibre de l'équipe. Le reste de l'effectif ne va désormais pas beaucoup mieux. En défense, Mandanda (à la forme physique douteuse) est très en dessous de ses standards. Si Amavi a perdu toute confiance, Rami, lui, n'a visiblement toujours pas digéré le succès de la Coupe du monde et semble être revenu à son niveau moyen le plus bas. Dans l'entre-jeu, Payet (aux formes physiques aléatoires) a l'inspiration en berne et le jeu triste. Luiz Gustavo joue, sans jamais se plaindre, les pompiers de services, mais change de poste bien trop souvent pour trouver assurance et repères. La ligne d'attaque n'est pas en meilleur état car Germain, qui a toujours eu besoin d'un bon collectif pour s'exprimer, a perdu son culot comme sa spontanéité. Mitroglou, quant à lui, semble finalement donner tout ce qu'il possède, et c'est bien peu. Nous finirons par Thauvin, lequel semble privilégier ses envies d'ailleurs au détriment du collectif et au profit de ses statistiques. En somme, il est facile de constater le mal-être des troupes et de le relier à un constat criant: une addition d'âmes en peines ne peut aboutir à l'épanouissement d'un moi collectif.

L'inventaire des forces en présence n'invite donc pas à l'optimisme. La solution la plus classique, en pleine crise, serait de changer le coach, puisque son discours semble ne plus passer... Seulement, et toujours à grands frais, celui-ci vient de prolonger son bail jusqu'en 2021 !

L'inviter à partir est donc possible, mais à quel prix ?! Autre possibilité envisagée, mercato d'hiver oblige, renouveler et régénérer l'effectif. Déjà en échec flagrant sur ce dossier lors de la dernière intersaison, l'OM semble toujours vouloir acquérir Mario Balotelli. Un poème à lui tout seul, tant il est lunaire, un joueur à éclipses et un homme à ellipses. Indéchiffrable et ingouvernable. Capable du meilleur, rarement, et bien souvent du pire. A part la vente de maillots, il est difficile de voir quelle plus-value il pourrait apporter au club tant il sort d'une première partie de saison cataclysmique avec Nice. Un joueur finalement à l'inverse de Dieu, partout visible mais rarement présent. Songer que ce type d'attaquant peut aider l'équipe à se relever donnera à la fois une idée des compétences de la gouvernance du club et des sueurs d'angoisses aux partisans les plus fervents.

Le tableau est donc complet, puisque le bilan à mi-parcours est déjà un constat d'échec et que les perspectives de redressement semblent, pour l'instant, inexistantes ou inappropriées. Le club est dans l'impasse. Nous aurons une pensée pour le public et les supporters marseillais car se sont eux qui semblent souvent être les plus inspirés. Un public aussi incroyable que versatile, autant capable de transcendance que d'intolérance.

Un public qui a le pouvoir de faire du Stade Vélodrome un lieu magique comme de le transformer en parc de loisirs concentrationnaires. Car ce peuple marseillais a désespérément besoin de victoires. Pour lui, une vie de défaites n'est pas une existence. Il faudrait également s'interroger sur l'aspect sociologique de la chose: ces "victoires qui font du bien" concernent d'abord, un public qui en a terriblement besoin... A part finir le championnat le moins mal possible, et redorer son blason, l'OM n'a donc rien d'autre à jouer d'ici la fin de la saison. Et Monaco, qui n'est pas en meilleur état, sera le prochain adversaire... La suite risque donc d'être bien longue sur la Canebière. Nous nous quitterons en citant et en méditant sur ces propos de Woody Allen: "L'éternité c'est long, surtout vers la fin".

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