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La relation franco-allemande ne s’améliorera que si la France reconnait ses propres faiblesses
Paris et Berlin se sont donné un mois pour renforcer les bases de leur relation dont dépend finalement l’avenir de l’Europe. La France a beaucoup de reproches à faire à son voisin mais elle devrait commencer par reconnaitre ses propres responsabilités.
Paris et Berlin ont donc décidé de réchauffer leur relation. Tout a commencé hier soir par un dîner quasi-privé à Postdam. Emmanuel Macron était l’invité d'Olaf Scholz, le chancelier allemand et personne ne sait ce qu’ils se sont réellement dit. Dîner priver mais prélude à une série de rendez-vous pour aboutir à une visite d’État que le président fera en Allemagne du 2 au 4 juillet prochain. C’est une première depuis 23 ans et un évènement qui vise à relancer cette relation, parce que la France comme l’Allemagne se sont rendu compte que leur attelage qui domine l’union européenne toute entière était bancale. C’est une évidence que la guerre en Ukraine a souligné avec force , et que la géopolitique impose de réformer si on veut que l’utilité de l’union européenne profite à tout le monde et retrouve sa vocation première à savoir : la sécurité des peuples et leur prospérité partagée.
Les relations personnelles entre les dirigeants peuvent-elle traiter des dossiers que les services techniques et administratifs ne réussissent pas à gérer ? Peut-être qu’une amitié confirmée peut contribuer à rapprocher deux pays mais il y a des forces structurelles et politiques qui imposent un inventaire précis et une lucidité forte sur ce que chacun apporte à l’autre. Les déclarations d’amour sont importantes , les preuves le sont encore plus. Même dans la vie diplomatique.
L’attelage entre la France et l’Allemagne est bancale parce qu’en prenant du recul, il est évident que le déficit de coordination déséquilibre le couple et affaiblit son influence.
On sait exactement les dossiers sur lesquels il faudrait travailler : la défense nationale, la politique de l’énergie, les projets de décarbonation des industries, mais aussi des projets communs industriel, la synchronisation des politiques économiques.
On sait aussi à Paris, les avantages que l’Allemagne tire de son rôle dans l’union européenne, une industrie forte avec un euro dont la valeur lui permet d’exporter facilement dans le reste de l’Europe, le bénéfice de pouvoir profiter du parapluie nucléaire de la France et une plus grande maitrise de son modèle sociale, grâce à une culture syndicale qui fabrique des compromis et une politique migratoire beaucoup mieux choisi que dans les pays de l’Europe du sud.
Le problème qui perturbe beaucoup la relation avec l’Allemagne, c’est de penser que les avantages relatifs dont jouissent les Allemands sont indus. La classe politique française ne se gêne pas pour justifier nos difficultés par la surpuissance allemande. Attitude inaudible outre-Rhin bien sûr.
Les avantages Allemands sont relatifs. Ça n’est donc pas en rabotant les atouts des plus forts qu’on redressera la situation des plus faibles.
L’Allemagne et les pays de l’Europe du nord profitent de l’Union européenne qui lui offre un marché quasi-captif parce que sa compétitivité est meilleure.
Mais en contrepartie, les milieux d’affaires européens savent bien qu’ils profitent de la stabilité monétaire de l’Europe mais les pouvoirs politiques européens évitent de trop expliquer que cette stabilité est sécurisée par la puissance allemande qui garantit nos dettes. Et notamment la France qui accumulent les déficits sans beaucoup s’inquiéter de la façon dont ces déficits sont couverts ou amortis.
Alors au sein de gouvernement français et notamment à Bercy, on sait bien que si l’attelage est bancal, ce n’est pas parce que l’Allemagne est trop forte, c’est parce que la France est trop faible.
Et cette faiblesse structurelle tient à deux séries de facteurs que les politiques n’osent pas prendre en compte.
Le premier, c’est que nous avons des actifs que nous ne monétisons pas assez chèrement. Nos positionnements géographiques atlantiques, notre climat, nos équipements collectifs, notre système de santé, nos grandes écoles, notre énergie, notre parapluie nucléaire etc. L’Europe du nord en profite grandement.
Le deuxième facteur concerne nos coût de fonctionnement exorbitants. Nous sommes incapables de les réduire. Notre modèle social et notre machine étatique sont en cause. Entre les depenses sociale et les depenses publiques de fonctionnement, nous avons les deux raisons qui nous mettent en retard et surtout nous mettent en situation de dépendance a l’égard de l’Allemagne. Le déficit budgétaire atteint 7%, l’endettement près de 120 % du PIB. Nous sommes en Europe le pays (avec l’Italie) le plus lourd et le plus cher à faire fonctionner.
Olaf Scholz ne le dira jamais parce que son rôle n’est pas de donner des leçons à ses partenaires, mais si la France reconnaissait qu’elle a, au niveau de son administration de sérieux handicaps et qu’elle prenait des mesures pour alléger le poids de ces handicaps, l’avenir, de la vie quotidienne de l’Union européenne en serait plus serein.
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