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La refondation de la droite passe par une révolution conservatrice, gaulliste et souverainiste
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Cher Gaspard Koenig

Gaspard Koenig, candidat du Parti libéral démocrate à Londres pour les élections législatives 2012, estime que les libéraux sont les seuls à pouvoir refonder intellectuellement et politiquement la droite. Une analyse que ne partage pas Pierre-Henri d'Argenson. Pour lui la refonte de la droite ne pourra intervenir qu’à la faveur d’un recentrage sur sa composante conservatrice, gaulliste et « souverainiste ».

Pierre-Henri d'Argenson

Pierre-Henri d'Argenson

Pierre-Henri d'Argenson est haut-fonctionnaire. Il a enseigné les questions internationales à Sciences Po Paris. Il est l’auteur de "Eduquer autrement : le regard d'un père sur l'éducation des enfants" (éd. de l'Oeuvre, 2012) et Réformer l’ENA, réformer l’élite, pour une véritable école des meilleurs (L’Harmattan, 2008). Son dernier livre est Guide pratique et psychologique de la préparation aux concours, (éditions Ellipses, 2013).

 

 

 

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A (re)lire : L'article de Gaspard Koenig, "Comment j'ai fini par admettre qu'en étant libéral, j'étais de droite"

L’UMP est-elle partie trop à droite ? C’est l’opinion de Gaspard Koenig, candidat aux élections législatives de la 3e circonscription des Français à l'étranger, qui considère que la tendance libérale au sein de la droite a été complètement étouffée. Il en conclut que seuls les libéraux seront à même de refonder intellectuellement et politiquement la droite.

Adhérent moi-même à l’UMP, je ne partage pas cette analyse : au sein de l’UMP, c’est bien la tendance libérale qui a triomphé, et la tendance conservatrice qui a été marginalisée ! C’est d’ailleurs ce qui explique la poussée continue du Front national, qui a capté cet héritage, et la tentative parallèle de réappropriation de la thématique « souverainiste » par la Droite populaire, pour limiter l’hémorragie. Si Nicolas Sarkozy a perdu les élections, c’est entre autres parce que l’UMP a résisté jusqu’au dernier moment à la « droitisation » du discours de l’ancien président de la République, qui est intervenue trop tard pour convaincre qu’il s’agissait vraiment d’une réorientation idéologique de fond, partagée par son parti.

Les ténors actuels de l’UMP sont pratiquement sans exception des tenants d’un libéralisme décomplexé. En matière économique, ils refusent tout protectionnisme efficace, et ne semblent pas pressés d’imposer des restrictions aux excès des marchés financiers et des écarts de rémunérations entre le haut et le bas de l’échelle. Ils adhèrent au dogme bruxellois de la concurrence absolue et de la privatisation du maximum de secteurs. Ils sont globalement ouverts au mariage homosexuel ou à ses ersatz (statut du beau-parent). Ils se refusent à un discours ferme, et encore moins chiffré, sur la réduction de l’immigration. Ils sont de fervents adeptes du cumul des mandats et de la décentralisation, qui, faut-il le rappeler, a connu ses plus grandes avancées sous la droite avec Jean-Pierre Raffarin.

Soyons clairs, la plupart des cadres de l’UMP adhèrent parfaitement à la soupe d’eau tiède et bien-pensante du dogme libéral défendu par les institutions européennes… et par un certain nombre de Français confortablement installés à l’étranger, travaillant dans la Finance, habitant des quartiers privilégiés où l’on vit la mondialisation heureuse au quotidien, comme à Londres par exemple…

Je crois au contraire que la refondation intellectuelle et politique de la droite ne pourra intervenir qu’à la faveur d’un recentrage sur sa composante conservatrice, gaulliste et « souverainiste », qui constitue au demeurant le courant majoritaire du peuple de droite, qui se sent de moins en moins représenté par les élites de l’UMP. Il y a une raison à cela que Gaspard Koenig ne semble pas avoir perçue : c’est que le libéralisme tel qu’il est compris aujourd’hui est autant de gauche que de droite, parce qu’il est avant tout l’expression d’une génération politique, celle de mai 68. Or nous assistons aujourd’hui à l’échec du cycle politique du libéralisme, initié dans les années 1970, ayant connu son apogée dans les années 1980 et 1990, et s’effritant peu à peu à partir des années 2000, face à une mondialisation de plus en plus inégalitaire, oppressante, malheureuse pour tous ceux qui n’ont pas les moyens de suivre leur usine en Chine ou de déménager dans une banlieue moins sordide.

En réalité, la pensée 68 qui continue de régir notre sphère des représentations politiques et intellectuelles, est fondamentalement une pensée de gauche et une pensée libérale. C’est pourquoi je défends pour ma part une refondation générationnelle, politique et intellectuelle de la pensée qui assume son ancrage dans une révolution conservatrice de droite, pour sortir des nombreuses impasses du libéralisme tel qu’il est pratiqué depuis plus de trente ans : impasse de la confusion des valeurs, impasse de la déstructuration éducative, impasse de notre modèle de croissance prédateur, impasse de la destruction écologique planétaire, impasse de notre manière aliénante de travailler, impasse de l’absence de perspectives pour notre jeunesse, impasse du projet européen actuel et de l’effritement de souveraineté collective.

Ceci dit, je salue la candidature de Gaspard Koenig, dont l’UMP aurait bien fait de s’inspirer pour les investitures aux législatives en faisant émerger un peu plus de nouvelles têtes ! Beaucoup d’idées de son parti libéral démocrate me paraissent justes, en particulier celles qui ont trait au renouveau de la vie politique et à la libération des talents : j’en sais quelque chose. Ces idées doivent aussi alimenter la révolution conservatrice que j’appelle de mes vœux, qui n’est pas une révolution étatiste et réactionnaire. J’ai voyagé, j’ai aussi étudié à Londres, j’ai travaillé à l’étranger, et je sais que notre pays a besoin d’un grand coup de balai dépoussiérant. Mais si je suis un amoureux de la liberté, je sais également que celle-ci est d’abord un privilège que l’on ne peut offrir à tous sans de sérieuses protections : des repères solides, des cadres structurants, et un canevas national, qui, à preuve du contraire, constitue l’expression politique de la démocratie et de notre destin collectif.

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