L’incroyable enquête ayant permis de comprendre que la cause de la disparition des lions de mer d’Alaska se cachait en fait dans les mesures visant à les protéger<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Science
Le lion de mer est une espèce d'otarie
Le lion de mer est une espèce d'otarie
©Reuters

Mystère marin

Des chercheurs américains ont placé des sondes sur des jeunes lions de mer. Celles retrouvées sur des animaux morts ont enregistré un passage dans les grosses profondeurs de l'océan et laissent penser qu'un prédateur insoupçonné a désormais le champ libre pour dévorer les lions de mer.

Que s'est-il passé avec le lion de mer de Steller, présent sur les côtes de l'Alaska ? En 1997, le Service national de la pêche maritime (SNPM), un organisme fédéral américain, estimait que la population était passée de 250 000 à 100 000 individus en 30 ans dans toute la mer de Béring. L'hypothèse était simple : la surpêche a privé les lions de mer de leur nourriture. Des mesures de restrictions sont donc instaurées dans le golfe d'Alaska afin d'éviter de décimer une espèce désormais en danger. Une décision mal comprise par les pêcheurs qui s'étonnaient que leurs prises de poissons étaient pourtant encore plus nombreuses qu'auparavant et que les lions de mer ne pâtissaient pas de la pêche.

Depuis, les populations ont pourtant augmenté de nouveau mais se sont rapidement stabilisées. Dans le Golfe de l'Alaska, on comptait plus de 65.000 animaux à la fin des années 1970 avant que le nombre ne tombe à 10.000 au début des années 2000, selon les chiffres de la SNPM. Depuis, la population de lions de mer reste relativement stable à ce score.

Une étude menée par le zoologiste Markus Horning de l'Université d'Etat de l'Oregon a donc tenté de comprendre si la surpêche était bien responsable de ce déclin. En effet, les lions de mer restent des animaux mystérieux. Il est très rare de voir un cadavre et difficile de déterminer les raisons de leur mort.



Pour comprendre cette énigme, les chercheurs ont installé un petit espion informatique sur 45 jeunes en pleine forme. "Nous avons installé des moniteurs directement dans leur ventre" précise l'auteur de l'étude, dans un article de Popular Science. La capsule, qui tient dans la main, permet d'envoyer des informations importantes aux scientifiques une fois qu'elle se retrouve à l'air libre. En détails, elle enregistre la température, la quantité de lumière et la présence ou non d'air au moment de la mort. Puis une fois qu'elle remonte à la surface, elle transmet ses données par satellite.  "Quel que soit l'endroit où se situe le lion de mer, nous finissons par recevoir un triste email qui nous confirme la mort" explique Markus Horning.

Depuis 2005, 17 animaux sont morts. "C'est le à peu près chiffre que nous attendions" commente le chercheur. "Les jeunes lions de mer ont une vie difficile et beaucoup meurent avant d'avoir atteint l'âge de la reproduction." L'équipe a pu récupérer les données complètes de 15 d'entre eux, tués sans doute par des prédateurs. Pour déduire cela, les scientifiques ont remarqué que le moniteur enregistrait un brusque changement de température, de 37 degrés (celle du lion de mer) à celle de la surface de l'océan. Au même moment, il perçoit une forte lumière et la présence d'air, signe que la capsule est donc  brusquement remontée à la surface. "Tout laisse croire que le lion de mer a été démembré par un prédateur et que le moniteur est remonté à la surface".



Les principaux accusés sont les orques, les requins blancs, le requin saumon et dans une moindre mesure le requin dormeur. Les orques sont souvent observées en train d'attaquer les otaries, ce qui en font les principales suspectes de ces attaques.

 Mais trois autres capteurs ont révélé des détails intrigants. Cette fois, pas de changement de lumière ni de présence d'air au moment de la mort. Surtout, la température a chuté mais ne coïncide pas avec celle de la surface de l'océan mais plutôt avec celle du fond des océans, et cela dure entre 5 et 11 jours.

Pour les chercheurs, ça ne fait aucun doute : "nous pensons que les capteurs ont été avalés par des animaux à sang froid et régurgités au bout de quelques jours." Les orques sont mises hors de causes puisqu'elles ont le sang chaud. Même les requins blancs et les requins saumons peuvent moduler leur température. Cela ne colle donc pas avec les données récupérées. Reste le requin dormeur, une grande espèce mal connue et à sang froid.

Et c'est là que l'histoire prend toute sa saveur. Le requin dormeur était régulièrement récupéré dans les filets des pêcheurs. "Une des conséquences inattendues des restrictions de pêche décidées est qu'il y a plus de requins dormeurs dans l'eau." En laissant ces prédateurs proliférer, les restrictions ont donc paradoxalement participé au déclin du lion de mer qui trouvait là un nouveau prédateur. En revanche, l'étude ne dit finalement pas si ces restrictions sont bien la cause de l'énorme baisse de la population.

Une autre étude de l'anthropologiste Herbert Maschner donne peut-être une clé. Ce déclin serait… naturel et provoqué par la température de l'eau. Des courants chauds ont privilégié une explosion des populations  à la fin du XIXème siècle puis dans les années 1940.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !