L'arme secrète de Romney et des républicains…<!-- --> | Atlantico.fr
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L’argent a pris une place démesurée dans les campagnes électorales américaines. Il mérite plus que jamais son surnom de « nerf de la guerre ».
L’argent a pris une place démesurée dans les campagnes électorales américaines. Il mérite plus que jamais son surnom de « nerf de la guerre ».
©Reuters

Trans Amérique Express

Pour l'élection américaine, l'argent est plus que jamais le nerf de la guerre. Les républicains, grâce à leurs "super pacs", ont constitué d'importantes réserves à être dépensées dans les dernières semaines de la campagne.

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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A lire certains et écouter les autres, l’élection américaine serait jouée. Le président Obama sera réélu dans un fauteuil.

Tandis que début septembre Mitt Romney et le président sortant étaient à égalité dans les sondages, avec 46% des intentions de vote chacun, le président aurait désormais une avance de quatre points, 49% contre 45%, au plan national, et un avantage encore plus décisif dans certains « swing states », comme la Floride, le Nevada, le Missouri, le Wisconsin et l’Ohio. De quoi lui assurer une réélection confortable avec une majorité du vote populaire et plus de 320 voix au Collège électoral, où 270 suffisent à l’emporter!

Ce sont les incidents de la semaine dernière qui auraient poussé les Américains, encore indécis, à se ranger derrière le président.

L’affaire libyenne d’une part. C’est-à-dire l’assaut contre le consulat de Benghazi qui s’est soldé par l’assassinat de quatre Américains dont l’ambassadeur Stevens. Romney aurait payé le prix de son empressement à titrer un profit politique de cette tragédie humaine. Il n’aurait pas non plus démontré à l’occasion une maîtrise convaincante des questions de politique étrangère.

L’affaire des « 47% » d’autre part. C’est-à-dire la vidéo pirate de Mitt Romney, filmée durant un diner avec de riches donateurs, où il s’en est pris à la mentalité d’assistés de 47% des électeurs américains. Une suite de remarques dédaigneuses  qui lui auraient valu la désaffection définitive des électeurs indépendants.

Cependant, de passage à Paris à l’invitation de la Fondation Franco-Américaine Norman Onrstein, chercheur à l’American Enterprise Institute et fin observateur de la vie politique américaine depuis trente ans, s’est bien gardé d’entériner la victoire d’Obama. « Les républicains n’ont pas encore dégainé leur arme secrète », a-t-il même ajouté.

Et ce 25 septembre, un cadre du Quai d’Orsay qui suit la campagne au jour le jour me confiait, de façon « confidentielle » et « anonyme », à peu près la même chose. Les républicains n’ont pas dit leur dernier mot. Ils ont « des réserves ».

Quelles sont donc ces « réserves » ? Quelle est donc cette « arme secrète » ? De l’argent bien sûr. Beaucoup d’argent. Qui va être dépensé tout au long du mois d’octobre dans les « swing states ».

D’où vient cet argent ? Des « super pacs » ! En particulier de « Restore our Future » le « super pac » lié à Mitt Romney, et d’ « American CrossRoads », le « super pac » géré par Karl Rove, l’ancien conseiller du président Bush, crédité de sa victoire à l’arrachée en 2000.

Les « Super pacs » sont nés à la suite de la décision de la Cour Suprême de 2010, de déplafonner les contributions financières aux campagnes politiques. Désormais quiconque, personne, entreprise, association, syndicat, etc, souhaite soutenir, promouvoir, ou attaquer une cause, peut le faire sans limite. La loi ne permet même pas d’établir systématiquement l’origine des fonds. Du coup les opérateurs des deux partis se sont empressés de mettre en place de nouvelles structures pour collecter ces fonds. Les « PACs », « Political Action Committees » sont devenus des « super pacs ». Les Démocrates et Obama ne sont pas en manque qui ont lancé Priorities USA, géré par Bill Burton un ancien de la campagne de 2008.

Quelques quatre cent soixante-cinq millions de dollars provenant des « super pacs » ont déjà été dépensés dans la campagne. Et American Crossroads disposerait de plusieurs autres centaines de millions de dollars. Certains parlent de trois cent millions et peut-être plus. Les républicains ont non seulement un trésor de guerre important, mais aussi un « pool » de donateurs très riches et prêts à remettre la main à la poche pour la bonne cause…

Le 30 septembre, en pleine convention républicaine à Tampa en Floride, Karl Rove avait d’ailleurs organisé un petit-déjeuner avec plusieurs dizaines de ces très généreux donateurs pour leur rappeler les enjeux de l’élection et l’importance d’une victoire républicaine. Avec d’autant plus d’insistance qu’à l’époque les républicains étaient convaincus que la victoire leur tendait les bras.

Depuis quelques jours, les électeurs de Pennsylvanie font l’objet d’un barrage de messages publicitaires favorables à Mitt Romney. Cet Etat du nord–est qui abrite les villes de Pittsburgh et Philadelphie, dispose de vingt sièges au Collège électoral. Au printemps il faisait partie des « swing states », mais au cours des dernières semaines Obama y a été accumulé une avance telle, dans les sondages d’opinion, que l’Etat est devenu « bleu » c’est-à-dire acquis au candidat démocrate. L’avalanche de messages payés par les républicains signifie que ces derniers ont décidé de contester l’Etat de Pennsylvanie et disposent des moyens financiers de mener bataille.

Les observateurs ont également constaté un barrage de messages similaires à Washington D.C., pourtant largement acquise aux démocrates. A croire que les républicains ont entamé leur offensive d’automne…

Le Washington Times, le quotidien conservateur de la capitale américaine,  souligne que c’est une réplique de la stratégie suivie par Bush en 2000 : aller défier l’adversaire jusque dans ses fiefs pour insinuer le doute dans sa campagne, dans l’esprit des électeurs et l’obliger à réagir, c’est-à-dire dépenser de l’argent là où il n’avait pas l’intention de le faire et en être privé ailleurs

Or la campagne Obama a beaucoup dépensé cet été. Et si le président sortant a récolté plus de cent millions de dollars pour le seul mois d’août, son super pac Priorities USA est à la peine, avec une dizaine de millions seulement. 

L’argent a pris une place démesurée dans les campagnes électorales américaines. Il mérite plus que jamais son surnom de « nerf de la guerre ». Mais l’argent seul ne suffit pas. Il faut aussi des candidats capables de convaincre. Dans son discours aux donateurs de Floride, Karl Rove avait souligné que l’objectif des républicains était double. Remporter la Maison Blanche, d’une part ; retrouver une majorité au Sénat, d’autre part. Pour ce second objectif, il leur faudra reprendre quatre sièges aux démocrates parmi les trente-trois mis en jeu en novembre (dix détenus par des républicains et vingt-trois par des démocrates). Etaient ciblés en particulier les Etats du Nebraska, du Nord-Dakota, du Wisconsin, de Virginie, ainsi que du Montana.  

La désignation de cet objectif s’accompagnait d’une mise en garde claire. S’il apparait, dans les dernières semaines de la campagne que la Maison Blanche est définitivement hors de portée, les réserves de cash d’American Crossroads se reporteront sur les candidats républicains aux sénatoriales dans ces Etats. Bref, si dans le courant du moins d’octobre le barrage de messages favorables à Mitt Romney cesse brutalement, c’est que les républicains auront entériné sa défaite annoncée. Pour l’instant c’est loin d’être le cas.

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