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Inquiétude maximale sur l’Arabie saoudite, MBS, le prince héritier qui s’est volatilisé
©LUDOVIC MARIN / AFP

Disparition angoissante

Depuis 38 jours quand s'écrit ce texte, le tout-puissant et médiatiquement hyperactif prince Mohammed bin Salman ("MBS") a disparu. Depuis, nulle personnalité crédible n'a vu le prince-héritier, régent du royaume d'Arabie saoudite ; ni photos, ni vidéos significatives, ni vision publique.

Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

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Depuis 38 jours quand s'écrit ce texte, le tout-puissant et médiatiquement hyperactif prince Mohammed bin Salman ("MBS") a disparu. Depuis, nulle personnalité crédible n'a vu le prince-héritier, régent du royaume d'Arabie saoudite ; ni photos, ni vidéos significatives, ni vision publique. Un bruit de fond envahit les réseaux sociaux saoudiens et arabes - moins anxieux désormais que dans l'attente d'une grave révélation - MBS est-il mort ? Blessé ? Victime d' un coup d'état familial - classique dans la péninsule arabe ?
Ce, dans cette électrique seconde part du Ramadan, où les masses - celle de La Mecque en tête - basculent aisément de l'élan mystique à l'émeute fanatisée - la barrière est fragile. D'où, dit-on à Riyad, un gouvernement désemparé jouant la montre  - faute de mieux.
Plus inquiétant encore, la révélation dès le 15 avril d'une disparition inexpliquée de MBS par le quotidien iranien Kayhan proche des Gardiens de la révolution, eux et leur redoutable appareil de renseignement et d'action.
Si la question agite désormais le monde, notons l'étrange absence des médias français de cette grave affaire. Sont-ils si déshabitués d'observer et d'enquêter ? Si asservis par les service officiels que, quand ceux-ci ratent une information importante, leurs zélés journalistes l'ignorent aussi ? Pourtant, le pire advenant, l'élimination de MBS déclencherait la crise moyen-orientale la plus sévère depuis l'invasion du Koweït par Saddam Hussein en août 1990.
Or loin d'être une brutale surprise, cette "occultation" suit, depuis début 2018, maints faits inquiétants. Faits qui, combinés comme l'enseigne le décèlement précoce, avaient conduit l'auteur à prévenir ses interlocuteurs officiels.  Ces faits, les voici.
Début 2018, une amie et ex-étudiante revient affolée de La Mecque. Depuis des années, cette Sahélienne y accompagne en pèlerinage (Haj) des femmes africaines. Le Haram, ce territoire sacré (interdit aux non-musulmans) entourant La Mecque, cette amie le visite tous les ans et le connaît bien. Début 2018 dit-elle, le Haram bruisse d'une rumeur : MBS s'est vendu aux israéliens... Il a confié la gestion du Haj à des sociétés de sécurité israéliennes... Ses gardes du corps sont désormais "des Juifs"... Vrai ou faux ? Comme l'éclair, la rumeur parcourt les trois millions d'habitants du Haram... Indignation, rage, haine - pour les durs du Haram, le "traître doit mourir". Or le Haram est le cœur du réacteur nucléaire islamique, le sismographe d'un milliard de fidèles.
Peu après, le président Trump - novice sur la scène moyen-orientale - adoube en vociférant son copain MBS... Ils feront ensemble de grandes choses. Ce programme des deux compères, Benjamin Netanyahu en coulisse, menace clairement l'axe Téhéran-Damas. 
Une folie : les intéressés ont oublié que de longue date, qui touche à l'axe Téhéran-Damas le paie cher et vite. Retour à la décennie 1980 : la guerre Irak-Iran s'éternise... Téhéran tire la langue... La France suréquipe l'armée irakienne ? Des bombes éclatent dans les rues de Paris, les enlèvements de Français se multiplient au Liban... La France comprend et rééquilibre... Attentats et kidnappings s'arrêtent net. 
En 1990, une guerre civile ravage le Liban depuis 15 ans. Saddam Hussein envahit le Koweït. Pour éviter la guerre sur deux fronts, George Bush senior informe Hafez al-Assad (père de Bachar, l'actuel président syrien) que désormais, le "méchant" du Moyen-Orient, c'est Saddam et non plus lui.  Le lendemain, au coup de sifflet, l'interminable guerre libanaise - massacres, attentats, sournoises trahisons et scissions brutales - s'arrête net. Plus un coup de feu au Liban, les 17 années qui suivent.
Retour en France et aux périlleuses vantardises de M. Fabius en décembre 2012. Pour lui, l'opposition au régime syrien, terroristes y compris, fait "du bon boulot". A-t-on une fois encore marché sur la queue du serpent ? En janvier 2015, une sanglante vague d'attentats débute en France, 240 morts en 18 mois. Coïncidence ? Réponse du berger à la bergère ? Face à de tels adversaires, les meilleurs experts officiels d'Europe conseillent tous une immense prudence et beaucoup de doigté.
Or là, le duo Trump-MBS provoque clairement l'Iran, interdit d'armes balistiques et de séjour au Moyen-Orient arabe ; embargos, sanctions... "changement de régime" si besoin.  
Attendons: retour de MBS au bercail - mais alors, pourquoi cette durable et fort chi'ite "occultation" ? Si c'est bien l'élimination, les cajoleries de Donald Trump à MBS auront bien plutôt été un foudroyant baiser de la mort.

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