Guerre Ayrault/Bartolone : mais qui dirige aujourd'hui la majorité ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Marc Ayrault assure n'avoir aucun problème avec Claude Bartolone.
Jean-Marc Ayrault assure n'avoir aucun problème avec Claude Bartolone.
©Reuters

C'est la guerre

Le Premier ministre a affirmé mercredi ne pas avoir de "différend" avec Claude Bartolone à propos du projet, contesté par le président de l'Assemblée nationale, de la publication des patrimoines des parlementaires. Pourtant la tension entre les deux hommes semble bien réelle et la majorité parlementaire apparaît plus divisée que jamais.

Nicolas Barotte

Nicolas Barotte

Nicolas Barotte est journaliste au service politique du Figaro. Il couvre l'actualité du Parti socialiste depuis 2004. Il a suivi l'ascension de François Hollande, de sa traversée du désert à la campagne présidentielle de 2012. 

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Atlantico : Le Premier ministre a affirmé mercredi ne pas avoir de "différend" avec Claude Bartolone à propos du projet, contesté par le président  de l'Assemblée nationale, de la publication des patrimoines des parlementaires. Néanmoins, la tension entre les deux hommes semble bien réelle et la majorité parlementaire apparaît plus divisée que jamais. Qui est le vrai chef de la majorité : le Président de la République, le Premier ministre ou le président de l'Assemblée nationale ?

Nicolas Barotte : Souvent les députés se donnent un chef ou acceptent d’en suivre un lorsqu’ils savent où celui-ci va les conduire. Aujourd'hui faute de direction claire, ils apparaissent divisés. Il y a les partisans du sérieux, notamment sur le plan budgétaire et ceux qui ,au contraire, estiment qu’il faut desserrer les contraintes, qu’il faut être moins strict sur la réduction du déficit.  De même, la transparence que veut imposer François Hollande à travers la révélation des patrimoines, la réforme du non cumul des mandats ne fait pas l’unanimité au sein de la majorité.

Les courants traditionnels du PS ont explosé ces dernières années, très peu de chapelles existent. Les soutiens hollandais forment un tout petit groupe de fidèles, même si tout le monde se réclame officiellement de François Hollande. L’aile gauche du parti est aussi très dispersée : Benoît Hamon et Arnaud Montebourg ont des personnalités et des sensibilités très différentes. Il y a globalement une interrogation sur le sens du mouvement socialiste et la démocratie aujourd’hui. Cela devrait  conduire à la constitution de différentes sensibilités. Il y a encore une hésitation au sein de la majorité entre ce qu’il est possible de faire et ce qui est souhaitable de faire.

Institutionnellement, Jean-Marc Ayrault est le chef de la majorité, mais ses positions ne sont pas majoritaires. Lorsque Claude Bartolone défend un statut particulier pour l’élu, il est populaire auprès des élus qui veulent défendre leur situation, leur tranquillité. Quant  à François Hollande, il reste très discret sur ce qu’il compte faire, car institutionnellement ce n’est pas à lui de tenir le discours de chef de la majorité.

Cette situation de confusion est-elle inédite dans la Ve République ?

Nicolas Barotte : Il y a souvent eu des débats au sein de la majorité, à droite comme à gauche. Entre chiraquiens et balladuriens, entre les sarkozystes et ceux qui l’étaient moins. De même à gauche, entre fabiusiens et jospinistes…  Mais la logique du quinquennat a accentué cette tendance en dévitalisant la fonction de Premier ministre. Celui-ci n'est plus le leader naturel de la majorité puisque les législatives se déroulent dans la foulée de la présidentielle. S’ensuit une majorité de la même couleur. Le Premier ministre n’est que sa traduction. Sous le septennat, les législatives étaient distinctes des présidentielles. Le Premier ministre avait donc une plus forte légitimité. C’était lui qui menait la bataille de l’élection, et donc lui qui faisait gagner son camp. En 1997, c’est Lionel Jospin qui a remporté les élections tandis que Jean-Marc Ayrault n'a pas directement mené la bataille électorale des législatives en 2012.

François Hollande qui a voulu rompre avec l'hyper-présidence de Nicolas Sarkozy. A-t-il compris la logique du quinquennat ? Peut-il vraiment rester en retrait comme le faisaient par exemple François Mitterrand ou Jacques Chirac ?

C’est ce qu’il aurait voulu faire, mais les institutions sont plus fortes que sa volonté et ses choix. Il s’est rendu compte dès les premières semaines de son mandat que les Français attendaient une parole forte de sa part et a dû revenir au premier plan. Dès qu’il  y a une difficulté, c’est lui qui est mis en cause. Le Premier ministre ne joue plus le rôle de fusible. Il peut avoir un rôle de porte-parole, il va expliquer la politique du gouvernement, animer une équipe . Mais , celui qui prend les décisions et les assume, c’est le Président. C’est la logique du quinquennat. Nicolas Sarkozy, en son temps, a assumé totalement, voire un peu trop, cette tendance en voulant être un "omniprésident", ce qui avait déplu aux Français. Hollande a voulu revenir en arrière. Le juste milieu n’a pas été trouvé car le quinquennat est encore récent. On pourra juger à la fin de son mandat s’il a su imposer un style, un équilibre. Pour l'instant, il a deux faiblesses : Jean-Marc Ayrault, dont la parole est peu audible et le PS, qui est inexistant aujourd’hui, et qui pourrait avoir un rôle de relais. Harlem Désir a des qualités, mais pas celle d’être un leader qui emporte les foules et peut mener des batailles. François Hollande se retrouve donc isolé dans son dispositif.

Propos recueillis par Alexandre Devecchio 

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