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Gabegie financière des régions contre recentralisation manu militari : mais qui sera capable de trouver un nouvel équilibre ?
©LOIC VENANCE / AFP

Un partout, la balle au centre ?

La tension entre le Gouvernement et les élus ne s'estompe pas. Ce jeudi 27 septembre, Edouard Philippe s'est rendu au Congrès des régions de France à Marseille face à des élus locaux en colère et inquiets d'une « recentralisation ». Le premier ministre a tenté de calmer les esprits.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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Atlantico : Comment trouver un moyen de gérer ces deux visions qui entrent en collision, celle de l'état et des collectivités ? Comment renouer le dialogue entre l'Etat et les collectivités ?

Les Arvernes : Une telle conciliation et un tel dialogue sont extrêmement difficiles. La raison est simple : la décentralisation a été très mal menée depuis mars 1982.
L'Etat a battu la bataille intellectuelle et morale. Que ce soit à l'égard de l'Union européenne ou à l'égard des collectivités locales, bien que l'essentiel des compétences juridiques demeure bien au niveau de l'Etat, ce dernier est en permanence inhibé et incapable d'assumer ses prérogatives à l'égard de ces deux autres niveaux de collectivités publiques, qui pourtant, contrairement à lui, ne sont pas le siège de la souveraineté.
Dans ce contexte, l'Etat est pris en étau entre des nécessités budgétaires et financières, notamment vis-à-vis de l'Union européenne, et des collectivités locales qui ne sont pas responsables. Il faut le dire et le répéter : depuis 15 ans, en matière budgétaire, c'est l'Etat qui s'est serré la ceinture, alors que les collectivités locales continuaient à dépenser, notamment en matière de recrutement de personnels.
Naturellement, tous les torts ne sont pas du coté des collectivités locales. Celles-ci, à bon droit, soulignent en permanence que de plus en plus de missions leur sont confiées. Plus fondamentalement, si l'Etat fait des efforts, il est patent que ces efforts sont toujours très en deçà de ce qui est nécessaire pour remettre l'économie française sur le bon chemin et les services publics au niveau de cout/ service rendu que les français réclament. Enfin, l'Etat est à l'origine de plusieurs réformes territoriales absolument catastrophiques. Que l'on songe à la loi Chevènement sur l'intercommunalité qui devait réduire le nombre de collectivités locales, mais qui en fait l' a augmenté. Que l'on songe aussi à la réforme ubuesque des régions sous le quinquennat Hollande, faite dans la précipitation et en dépit du bon sens.

Faire en sorte à la fois que l'enjeu des finances publiques locales soit géré et que les collectivités territoriales retrouvent une forme d'autonomie ne semble pas un pari facile. Qui pourrait tenir ce rôle de "juge de paix" selon vous ?

L'idée d'autonomie des collectivités territoriales est un totem, mais n'a pas beaucoup de sens. Bien sûr, chacun comprend qu'un maire de village est mieux placé pour traiter de certaines situations qu'un fonctionnaire dans un bureau à Paris ! Pour autant, l'autonomie des collectivités locales ne s'entend que dans le respect du caractère unitaire de la République, et donc des prérogatives que le peuple français exerce au travers de son Etat. L'augmentation de la dépense depuis quarante ans doit beaucoup aux excès des collectivités locales ! Pourtant, personne n'est capable de les mettre réellement sous tension budgétaire et financière.
Ceci amène à l'autre volet de la question : qui pour être le juge de paix ? Il y a en a deux. 
D'une part la loi, c'est à dire la représentation nationale, où les collectivités locales sont représentées par le Sénat. La loi peut faire évoluer la fiscalité locale. Elle peut modifier les compétences des collectivités locales etc. 
D'autre part, les citoyens. C'est aussi à eux, lors de l'élection, de demander des comptes - y compris de bonne gestion - à leurs édiles. Si l'on considère Paris, par exemple, il nous semble que le moins que l'on puisse dire est que depuis trop longtemps les parisiens se sont désintéressés de la qualité de leurs élus, jusqu'à bilan catastrophique de Mme Hidalgo.

Sans accord, quels sont les risques auxquels Emmanuel Macron pourrait-être confronté ?

Emmanuel Macron n'a pas de problèmes graves : contrairement à Mme Merkel ou May, il ne peut être démis. Donc il peut accumuler les erreurs, à l'instar de ses prédécesseurs, les institutions le protègent ! 
Il est vrai, en revanche, qu'une crise avec les collectivités locales est une difficulté de plus pour un Président dont l'échec - prévisible avant mai 2017 - est, hélas pour la France, en train de se matérialiser. Depuis son élection, il s'est en effet mis à dos méthodiquement une série de catégories de personnes - ce qui en soit serait plutôt bon signe si c'était le prix à payer pour des réformes ambitieuses, mais ce n'est pas le cas. Les militaires, avec la déplorable "affaire Villiers". La presse, qu'il méprise ouvertement, bien que cette dernière ait joué un rôle essentiel dans sa victoire. Les policiers, avec l' "affaire Benalla" et l'insupportable "qu'ils viennent me chercher". Les chefs d'Etat et de gouvernement européens, d'abord impressionnés par sa fougue, et qui n'y voient désormais plus que de l'arrogance. Les retraités, avec la CSG. Les entrepreneurs, pigeons ou non, qui ne sont pas mystère de leur déception. On pourrait continuer. Désormais, ce sont les élus locaux. Tout est en place pour une "hollandisation" que nous avons crainte et par avance dénoncée...en vain.

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