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L'ancien président François Hollande prononce un discours lors de la Fête de la Rose, à Venarsal, dans le centre de la France, le 6 novembre 2021.
L'ancien président François Hollande prononce un discours lors de la Fête de la Rose, à Venarsal, dans le centre de la France, le 6 novembre 2021.
©PASCAL LACHENAUD / AFP

Campagne électorale

Invité dans une classe de lycéens et devant les caméras de France 3, François Hollande a indiqué qu'un « ancien président peut très bien refaire de la politique » et qu'il va « prendre la parole bientôt ».

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer est née en 1962. Elle est diplômée de l’ESSEC et a travaillé dans le secteur de la banque et l’assurance. Depuis 2015, elle tient Le Blog de Nathalie MP avec l’objectif de faire connaître le libéralisme et d’expliquer en quoi il constituerait une réponse adaptée aux problèmes actuels de la France aussi bien sur le plan des libertés individuelles que sur celui de la prospérité économique générale.
 
https://leblogdenathaliemp.com/

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Question pas si subsidiaire que ça : mais où est donc passé le Parti socialiste ?

Suspense intenable ! François Hollande va-t-il bientôt nous annoncer sa candidature présidentielle ? Des propos habilement équivoques tenus récemment par l’ancien chef de l’État devant des lycéens relancent la machine à spéculation politico-médiatique : « pour l’instant », il n’est pas candidat. Mais comme « ça ne va pas bien » – sous-entendu, à gauche, vous l’aurez immédiatement compris – forcément, il s’interroge :

« Est-ce qu’une candidature de plus serait utile ? Je ne sais pas. Je ne le pense pas, d’ailleurs. J’ai les mêmes idées qu’avant, donc je continue à les défendre. Un ancien Président peut très bien refaire de la politique et, c’est arrivé, être candidat à l’élection présidentielle. »

Et d’annoncer ensuite, en réponse à un élève qui lui demande s’il va prendre une décision bientôt, qu’il va « en tout cas, prendre la parole bientôt » (vidéo ci-dessous, 31″) :

Bien joué ! Que va-t-il nous dire ? Quelle nouvelle pincée de division prétendument rassembleuse va-t-il jeter dans les décombres d’une gauche qui réussit déjà très bien sans lui à être à la fois éclatée et sans éclat ? On en parle, on suppute, on s’interroge, et surtout, pour être tout à fait honnête, on s’en amuse grandement. Et donc, si vous voulez mon avis « amusé », le voici : François Hollande ne sera pas candidat car tout montre qu’il n’a pas du tout commencé son régime minceur, ce marqueur absolument indispensable (avec l’adoption d’une nouvelle monture de lunettes) d’une candidature présidentielle sérieuse, moderne et dynamique !

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D’ailleurs, ce n’est pas la première fois qu’il laisse « planer le doute » sur ses intentions. Déjà en 2020, déjà l’automne dernier, il confiait vouloir mettre son expérience de chef d’État et ses convictions démocratiques au service de la Nation. Il n’est pas le seul. Mais plus qu’un projet politique personnel précis, j’y vois surtout une forme de « ségolénisation » des anciens responsables politiques, c’est-à-dire un souci frénétique de ne pas tomber complètement dans l’oubli après avoir connu les sommets, à l’image d’une Ségolène Royal qui cherche par tous les moyens à exister, à faire croire qu’elle est indispensable et à créer du buzz à son profit.

Oh, bien sûr, pour un hiérarque socialiste tel que François Hollande, qui est parvenu à l’Élysée en 2012 avec 28,6 % des voix au premier tour et 51,6 % au second contre Nicolas Sarkozy, il y a largement de quoi s’inquiéter de l’état de décomposition avancée de la gauche en général et de son ex-vaisseau amiral socialiste à deux mois et demi de l’élection. Sept candidats, 25 % au total dans les sondages, la candidate du PS à 3 %, Taubira qui débarque, une primaire populaire imminente mais rejetée par les principaux candidats, des grèves de la faim de militants déboussolés par les divisions – tout ce charivari reflète des candidatures « lilliputiennes » qui se livrent à « des batailles aussi picrocholines que microscopiques », avait déjà averti Hollande en octobre dernier.

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Et puis lui, contrairement à d’autres qui alignent les mesures bassement catégorielles et « les plans à plusieurs dizaines de milliards auxquels personne ne croit », il peut se flatter d’avoir un programme digne de ce nom à proposer aux Français. Il a déjà été Président et n’a donc plus rien à prouver ; du reste, le PS a déjà sa candidate. Mais enfin, si jamais, à toutes fins utiles, voici ce qu’il proposerait : renforcement du Parlement et de la parole populaire, retour de la planification étatique pour réussir les mutations énergétiques et économiques qui s’imposent, redistribution via des chèques décarbonation, dotation universelle de 10 000 euros pour tous les jeunes de 18 ans et congé paternité à l’identique du congé maternité. 

Du planisme, des dépenses publiques et de la redistribution – quelle fabuleuse innovation ! Heureusement qu’il nous précise que tout ceci doit intervenir « dans un cadre budgétaire maîtrisé ». Mais comme l’on connaît la définition très élastique que son ministre des Finances Michel Sapin accordait à la notion de « sérieux budgétaire » quand il était « aux affaires », on voit mal en quoi son programme serait très différent de celui de Mme Hidalgo.

Il est certain que la personnalité de cette dernière, mélange détonant d’idéologie progressiste et d’incompétence totale dans la gestion d’une grande capitale, n’est pas pour rien dans les difficultés actuelles des socialistes.

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Mais François Hollande gagnerait nettement en crédibilité s’il voulait bien se souvenir qu’il ne s’est pas représenté parce que plus personne dans son camp ne voulait de lui, parce que son « bon bilan » n’était bon que dans l’esprit de ses derniers soutiens, et qu’au final, il a laissé le PS avec un (déjà) tout petit score de 6,36 %, écologistes compris, au premier tour de la présidentielle de 2017.

Au moment de son élection en 2012, François Hollande bénéficiait d’une cote de popularité de 55 %. Deux ans plus tard, deux ans marqués par un matraquage fiscal mémorable, il avait plongé sous les 20 %, niveau qu’il conservera jusqu’au 1er décembre 2016, date de son renoncement à un second mandat (hormis deux pics très nets correspondant aux attentats islamistes de janvier et novembre 2015). Depuis, il oscille sans conviction entre 20 et 30 % :

Que s’était-il passé ? Interrogé au début de son quinquennat sur ses années militantes à l’UNEF et dans le comité de soutien de François Mitterrand, il avait expliqué :

« Je n’étais pas communiste, pas révolutionnaire. Je cherchais une voie originale pour un socialisme possible. »

.
La fameuse « troisième voie », la social-démocratie peut-être, qui prendrait au capitalisme et au communisme ce qu’ils ont de meilleur en laissant le reste de côté. Une orientation que le SPD allemand avait prise dès 1959 en abandonnant toute référence au marxisme lors de son Congrès de Bad Godesberg.

Sauf que François Hollande a été élu en 2012 sur un programme très à gauche d’autant plus facile à proposer qu’on sortait à peine de la crise financière de 2008. On se souvient notamment de ses diatribes contre les riches et le monde de la finance et de sa mesure surprise, symbolique, de taxe à 75 % sur les très hauts revenus. Il suivait en cela la trace de François Mitterrand qui fut élu en 1981 sur un programme de rupture avec le capitalisme adopté lors du Congrès d’Épinay de 1971.

En 2012, cette barre à gauche toute avait permis d’attendrir l’électorat mélenchoniste ; en 1981, les communistes étaient dans le coup.

Et puis, dans les deux cas, l’utopie fut promptement rattrapée par l’inéluctable réalité : d’où le tournant de la rigueur pour Mitterrand en 1983 ; d’où une prise en compte du « ras-le-bol fiscal » pour Hollande avec une certaine volonté de lancer des réformes plus en phase avec l’évolution du monde, notamment la loi Travail El Khomri et les exonérations de charges sociales via le mécanisme du CICE.

Après Mitterrand, le Parti socialiste a cherché à survivre du mieux qu’il pouvait à l’aide du concept de « gauche plurielle » qui lui a permis de placer Lionel Jospin à Matignon en 1997 suite à la dissolution étourdie de l’Assemblée nationale voulue par Jacques Chirac. Un concept plus électoral que programmatique qui s’est finalement évanoui avec l’éviction du Parti socialiste lors du premier tour de l’élection présidentielle de 2002, dans un contexte, déjà, de candidatures plurielles, donc multiples.

Quant à Hollande, il dut composer sur sa gauche avec les « frondeurs » qui, à leurs griefs anticapitalistes, ajoutaient un désaccord profond sur l’État d’urgence prolongé et sur le projet de déchéance de la nationalité pour les terroristes. Et sur sa droite, avec la nouvelle tentation macroniste. Un hollandisme, en réalité, mais qui a réussi à se démarquer d’un Président terne et sans élan par assaut de « printanisation » politique surjouée.

Au sein du PS, ces deux courants furent représentés par Hamon et Valls respectivement, avec la victoire du premier sur le second lors de la primaire de gauche de 2017, mais leurs espaces avaient déjà été préemptés hors du parti par Mélenchon et Macron. D’une certaine façon, le Bad Godesberg du Parti socialiste français, c’est Macron qui l’a réalisé en 2017.

À partir de là, le Parti socialiste façon haute époque de Solférino n’avait plus aucune raison d’exister. Si ce n’est pour satisfaire les nombreux égos en quête d’avenir qui peuplent encore ce parti fantôme et si ce n’est pour donner de loin en loin des tribunes médiatiques passagères à d’anciens champions oubliés atteints de « ségolénisation » aggravée.


Pour une biographie plus détaillée de François Hollande, je suggère la lecture de « Y a-t-il un mystère Hollande ? » (2 octobre 2015)

Cet article a été initialement publié sur le site de Nathalie MP : cliquez ICI

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