Forces spéciales et unités d'élite : plongée au coeur d’une mission au sein de l’escouade de contre terrorisme et libération d’otages marines (CTLO)<!-- --> | Atlantico.fr
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Le livre « Forces spéciales et unités d’élite » est publié chez Solar éditions.
Le livre « Forces spéciales et unités d’élite » est publié chez Solar éditions.
©jody amiet / AFP

Bonnes feuilles

L’ouvrage « Forces spéciales et unités d’élite Des parcours d'exception » est publié chez Solar éditions. Comment une personne ordinaire peut-elle basculer dans l'extraordinaire vie d'un groupe d'élite qui intervient dans des situations extrêmes de dernier recours ? Quelle volonté, quelles compétences, quel parcours est-il nécessaire de suivre ? 14 opérateurs des meilleures unités militaires et des forces de l'ordre françaises témoignent. Extrait 2/2.

Forces Spéciales Coaching

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Forces Spéciales Coaching est la seule association à avoir réussi à réunir des opérateurs d’autant d’unités différentes. Ce positionnement unique lui permet d'attirer des milliers de personnes en recherche d'optimisation physique et mentale pour développer leur efficacité opérationnelle.

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JULIEN, CONTRE-TERRORISME ET LIBÉRATION D’OTAGES MARINE (CTLO)

« C’était loin d’être gagné d’avance… » Cette nuit déjà bien avancée est propice à mener notre action. L’adrénaline coule dans mes veines et j’ai hâte d’en découdre, même si au fond de moi je ressens comme une petite appréhension. La peur, j’essaie de la maîtriser en la mettant de côté et je fais confiance à chacun des membres de l’équipe du CTLO. Cette loyauté est toute réciproque. En cas de coups durs, je sais qu’ils ne me lâcheront pas. Chaque membre de l’équipe est comme le maillon d’une chaîne articulée qui dirait : rester soudés et infrangibles et vivre coûte que coûte.

Voilà quarante-huit heures que nous sommes au taquet. J’ai pu mémoriser les moindres détails de la cible : un compound afghan. Avec mes potes, nous avons analysé la structure de cette habitation, ses moyens d’accès, et jaugé la hauteur de son mur d’enceinte. Puis, nous avons listé le matériel d’investigation le plus efficace. Je me sens prêt à faire mon job.

Sur le terrain, les TE (tireurs d’élite) sont en place. Leur soutien fournit de précieux renseignements que je capte dans mon oreillette : tout semble calme et conforme aux prévisions. Les TE confirment qu’aucune activité ennemie n’est apparente.

Le chef de la mission chuchote dans le micro de sa radio pour solliciter le « vert action » au commandement qui suit l’opération grâce à un drone américain. Le but est de cueillir un petit groupe de talibans et de les saisir par surprise. L’assaut des bâtiments devrait se passer normalement, en « souplesse » et en toute discrétion, comme des félins. Si tout fonctionne, aucun coup de feu ne devrait briser le silence de la nuit.

Mes JVN (jumelles de vision nocturne) me permettent de distinguer les silhouettes de mes coéquipiers lourde‑ ment équipés. Je sais qu’ils sont vifs et rapides. Tous sont à l’affût, des chasseurs prêts à en découdre, « dans les starts », comme on dit. En cette saison d’hiver, les températures peuvent dégringoler bien en dessous de zéro. Mais les morsures du froid ne m’atteignent pas, sous la tension et la concentration, je transpire même légèrement.

Le « vert action » tombe. C’est parti, Gabriel et moi saisissons chacun une échelle. L’infiltration vers le mur d’enceinte est lancée. Quelques centaines de mètres sont à franchir. Plus questions de se poser, il faut agir comme prévu, presque par automatisme. Il y a cette foutue lune qui nous éclaire tel un phare. J’ai l’impression d’être aussi visible qu’un nez au milieu du visage. Si une sentinelle ennemie se pointe, elle ne manquera pas de nous repérer aussitôt, et cela ne fait aucun doute ! Afin de maintenir l’effet de surprise, et pour fondre nos silhouettes, nous exploitons les moindres zones d’ombre. Si jamais le mur est trop haut, nous devrons passer à un plan B. Au pied de l’enceinte : ça va le faire ! Nos estimations étaient bonnes. Gabriel, César, Pierre apposent les deux échelles et nous grimpons. Le reste de l’équipe lance alors la procédure. Sans mot dire, ils se déplacent en direction de la porte principale : chacun sait ce qu’il a à faire. Il leur reste à attendre que nous ouvrions la porte d’accès depuis l’intérieur.

Je me déhale le long d’un abri en torchis de l’autre côté de l’enceinte puis je foule le sol à pas feutrés en compagnie de César qui trimballe un coupe-boulon dans son dos. Il cisaille le cadenas de la porte. Moi, j’assure sa protection le temps de l’effraction. Mon cœur frappe ma poitrine à rompre. La pression est maximale car le moindre faux pas aurait des conséquences désastreuses. Le claquement sec du cadenas marque l’ouverture de la porte. Canon de fusil en avant, en un instant toute l’équipe s’engouffre dans l’enceinte. Je me dirige vers la zone à clarifier. Apercevant une petite lumière, je décide de relever ma JVN car le service des renseignements indiquait la présence possible de femmes et d’enfants. Je confirme l’info. Dans le bâtiment, des personnes dorment paisiblement : une femme, un enfant, et un homme dont le visage est orienté vers nous. L’individu a les yeux fermés et ne bouge pas. Je ne distingue pas d’arme.

Encore quelques pas et je serai sur lui. C’est alors que d’un seul coup, l’homme ouvre les yeux et se redresse. Il n’émet aucun son et, ébloui, reste paralysé de peur. Il ne discerne de nous que les lampes tactiques fixées au canon de nos armes. En afghan, je lui ordonne de mettre les mains en l’air. Il obtempère sans opposer de résistance.

Ce peu de dérangement finit par réveiller la femme et l’enfant. Ils ne bougent pas. En quelques secondes, les trois personnes sont menottées et isolées. La progression reprend. Un homme, situé à seulement une vingtaine de mètres de nous, dort comme un bébé ! Avec Vivien, nous lui tombons dessus et nous l’immobilisons. Puis, mètre après mètre, pièce après pièce, le groupe continue d’investiguer et arraisonne une dizaine d’hommes suspectés d’être des talibans. La fouille de la maison livre du matériel destiné à la conception d’IED (mines artisanales). Au final, aucun coup de feu n’a été tiré. Je ne dois toutefois pas me relâcher, la nuit n’est pas finie et l’ennemi peut encore frapper : la mission se termine seulement après notre retour à la base.

177 FRANÇAIS AVAIENT PARTICIPÉ

Ma vocation pour l’armée a débuté en 1976 près du Havre. Enfant, les avions de chasse me passionnaient et je ne dérogeais jamais au défilé du 14 Juillet pour voir le cortège des unités de la Légion étrangère. J’imaginais leurs missions. Je recherchais des informations sur les unités des commandos de renseignement et d’action dans la profondeur (CRAP), l’équivalent des GCP d’aujourd’hui, (acronyme qu’ils conserveront jusqu’en 1999). La revue mensuelle NAM, spécialisée dans l’histoire de la guerre du Vietnam, affichait des photos de combats, expliquait les moyens d’extraction des unités spéciales. J’avais déniché des livres, comme La Main coupée de Blaise Cendrars, œuvre autobiographique dans laquelle il évoque son expérience de la guerre durant 14‑18 ; Opération Daguet, d’Erwan Bergot, qui relate les faits des soldats de l’Armée française sous la chaleur du désert koweïtien, et la conquête du territoire face à une armée irakienne déterminée et prête à repousser les forces de la coalition.

Je me suis intéressé au débarquement en Normandie au travers du film Le Jour le plus long, auquel Philippe Kieffer avait participé comme conseiller militaire. 177 Français avaient pris part à cette aventure. L’armée me passionnait, même si je ne connaissais pas les commandos marine.

Dans ma famille, le goût pour les sports était omni‑ présent. À 2 ans, mes grands-parents maternels, qui possédaient un appartement à Pra-Loup dans les Alpes du Sud, me donnèrent mes premières leçons de ski. Le soir, je refusais catégoriquement de délaisser les pistes et je m’acharnais à enchaîner les descentes, qu’elles soient vertes, bleues, rouges ou noires. Je me devais de toutes les dévaler, même avec perte et fracas.

Pendant les vacances d’hiver et d’été à la montagne, les adultes gravissaient les GR des Alpes (chemin de grande randonnée), et j’en profitais pour réaliser des allers-retours entre eux. Dans la station, inscrit aux Jeunes Loups, je pratiquais escalade, rafting, canyoning, hydro-speed, etc. Un jour, nous avions quitté de nuit un refuge et atteint, après deux jours de marche, le sommet d’un pic rocheux encore couvert de quelques plaques neiges pour observer un splendide lever de soleil. À 10 ans, je venais de vivre une expérience que je ne retrouverais que de nombreuses années plus tard dans les montagnes afghanes, mais avec un équipement spécialisé très différent.

A lire aussi : Forces spéciales et unités d'élite : plongée au cœur d'une mission périlleuse de Tatiana, ancienne négociatrice du RAID

Extrait du livre « Forces spéciales et unités d’élite Des parcours d'exception », publié chez Solar éditions

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