Fin de l’anonymat en ligne : la pente dangereuse sur laquelle s’engage le gouvernement <!-- --> | Atlantico.fr
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Le ministre du Numérique ne défendra pas finalement l'amendement proposé par des députés de la majorité imposant de prouver son identité auprès des plateformes en ligne.
Le ministre du Numérique ne défendra pas finalement l'amendement proposé par des députés de la majorité imposant de prouver son identité auprès des plateformes en ligne.
©Chris Delmas / AFP

Dérives

Dans le cadre de l'examen en commission du projet de loi sur la sécurisation et la régulation de l'espace numérique, des députés Renaissance ont déposé plusieurs amendements visant à mettre fin à l'anonymat sur les réseaux sociaux.

Pierre Beyssac

Pierre Beyssac

Pierre Beyssac est Porte-parole du Parti Pirate

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Atlantico : Dans le cadre de l'examen en commission du projet de loi sur la sécurisation et la régulation de l'espace numérique, des députés Renaissance ont déposé plusieurs amendements visant à mettre fin à l'anonymat sur les réseaux sociaux. Quels sont les principaux points à retenir de ce projet de loi ? 

Pierre Beyssac : Certaines choses sont pas mal, notamment la souveraineté en matière de code. 

Les parties problématiques sont celles sur le bannissement des comptes des réseaux sociaux, c’est-à-dire de demander aux sites de bloquer un compte suite à des abus. Le tout avec différentes mesures pour empêcher la recréation d’un compte. 

Il y a la partie extension des possibilités de blocage. Extensions qui deviennent très large aussi bien par le nombre d’administrations compétentes que par le nombre d’intermédiaires techniques concernés. Aux fournisseurs de noms de domaines s’ajoute les fournisseurs de resolver. Les fournisseurs de navigateurs devraient être impliqués également. 

Et puis il y a des affirmations du rapporteur qui souhaite à mettre fin à l’anonymat sur les réseaux sociaux. Sachant que l’anonymat est assez relatif puisque les procédures de justice sont en mesure de remonter aux détenteurs des comptes. Le problème n’est pas tellement là. Le problème c’est surtout les moyens accordés à la justice pour faire les enquêtes. 

Quelles peuvent être les dérives consécutives à l’adoption d’une telle loi ?

Elles sont déjà là ! Jusqu’à maintenant, les dérives que l’on pouvait craindre c’était la fin de l’anonymat en ligne et là c’est littéralement ce que souhaite le rapporteur. Il veut carrément mettre ça dans le projet de loi en se rebranchant sur les systèmes d’identité numérique. Il y en a deux. Le premier est en train d’être monté par le ministère de l’intérieur pour les relations des français avec l’administration. Le deuxième est une filiale de la poste qui fournirait un service d’identité en ligne. Avec ce projet, il y a la volonté d’interdire la création de comptes sur les réseaux sociaux qui ne seraient pas associé à une personne physique. Les comptes avec les photos du chat ou des robots qui postent la météo, ce ne serait plus possible. La fin de l’anonymat peut aussi poser problème pour les lanceurs d’alerte, notamment ceux qui travaillent dans l’administration. Il y aura des conflits d’intérêts si tout cela est voté. 

De plus, il y a des incompatibilités manifestent avec la loi européenne. L’Etat français dépasse ses prérogatives. Thierry Breton lui-même l’a fait remarquer. Les Etats membres ne peuvent pas faire n’importe quoi vis-à-vis des grosses plate-forme. Ils sont obligés que ça rentre dans le cadre de la directive, notamment en matière de blocage et de censure. Difficile de dire ce que ça va donner. Mais il y a beaucoup de choses qui ne passeront pas

Porté par le député Renaissance Mounir Belhamiti, un amendement visait « à interdire à tout utilisateur d’un réseau social de publier, de commenter ou d’interagir en utilisant un réseau privé virtuel ». Le gouvernement a finalement fait machine arrière. Dans quelle mesure peut-on malgré tout y voir une dérive liberticide de la majorité ? 

Il y a quand même eu une prise de conscience citoyenne. L’amendement VPN, c’était un symbole. Ça a fait du bruit. L’amendement a été retiré par le député qui l’avait déposé.

Peut-être une prise de conscience ? Même les deux députés qui connaissent le mieux le sujet du numérique, Philippe Latombe (Modem) et Eric Bothorel (Renaissance), se sont exprimés pour dire que ça allait trop loin. Reste à voir si cela va dissuader la majorité de voter n’importe quoi.

Cette poussée liberticide était-elle prévisible ?

Il y a une poussé du côté d’Emmanuel Macron qui n’a pas caché son intention de cadenasser internet. On a une majorité un peu en roule libre sur ce sujet. Au fond ce projet de loi sur le numérique, c’est un peu une commande gérée par le ministre. C’est du technosolutionisme ! Au sens où on a l’impression qu’o va tout résoudre par la technologie. La technologie de la censure. Donc oui, c’est une pente préoccupante. 

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