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L’industrie manufacturière française, en particulier le secteur des biens intermédiaires et celui des biens d’équipement, s’est contractée durant la plus grande partie de l’année.
L’industrie manufacturière française, en particulier le secteur des biens intermédiaires et celui des biens d’équipement, s’est contractée durant la plus grande partie de l’année.
©REMY GABALDA / AFP

Désastreux ?

Les indices PMI sur la production industrielle ne sont plus très loin du niveau atteint lors du grand confinement Covid…

Michel Ruimy

Michel Ruimy

Michel Ruimy est professeur affilié à l’ESCP, où il enseigne les principes de l’économie monétaire et les caractéristiques fondamentales des marchés de capitaux.

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Atlantico : Les indices PMI de la France montrent que le secteur manufacturier (bleu) et les services (rouge) sont en forte baisse (voir le graphe ci-dessous). Ainsi, les indices PMI sur la production industrielle ne sont plus très loin du niveau atteint lors du grand confinement Covid. Comment expliquer cette baisse ?

Michel Ruimy : Le PMI (Purchasing Manager’s Index ou Indice des directeurs d’achat) manufacturier est un indicateur précieux très suivi par les opérateurs de marché car il permet de déterminer la santé économique d’un pays / zone géographique, d’anticiper les changements à venir et de prendre ainsi des décisions appropriées en matière d’investissement, de politique monétaire et de planification économique.

Cet indice mesure l’activité économique dans le secteur manufacturier en se fondant sur des données fournies par les directeurs d’achats des entreprises. En effet, il est supposé que ces dirigeants bénéficient d’un accès précoce aux données relatives aux performances de leurs entreprises, ce qui peut devenir, en agrégeant leurs opinions, un indicateur-clé avancé sur les performances macroéconomiques de l’économie du pays / zone. Un résultat au-dessus de 50 indique une expansion de l’activité manufacturière, en-dessous une contraction.

L’industrie manufacturière française, en particulier le secteur des biens intermédiaires et celui des biens d’équipement, s’est contractée durant la plus grande partie de l’année. La production et le volume global des nouvelles commandes reçues par les fabricants ont chuté à un rythme jusque-là inégalé, en dehors de la période de la pandémie de Covid-19 et celle de la crise financière mondiale de 2008-2009. Cet effondrement marqué s’explique par un niveau de stocks jugé suffisant chez les clients, de plus en plus moroses, et, en conséquence, par la faiblesse générale de la demande.

Qu’est-ce que cette baisse présage pour l’économie française ?

L’évolution de ces derniers mois du PMI brosse un tableau déconcertant de la deuxième puissance économique de l’Union européenne. La forte baisse continue des données met à l’épreuve l’optimisme des pouvoirs publics en matière de croissance.

L’économie française s’enfonce progressivement dans la récession. La contraction des secteurs des services et de l’industrie interroge leurs perspectives d’avenir d’autant que les commandes domestiques et internationales sont en chute libre, ce qui laisse présager des difficultés pour l’emploi.

A l’instar de celles concernant d’autres Etats-membres, ces sombres perspectives économiques rendent moins probable de nouveaux relèvements de taux d’intérêt par la Banque centrale européenne.

A quel point est-ce que la consommation française se porte mal actuellement ?

Dans un environnement international peu porteur, si la consommation totale des ménages français a progressé en valeur, mesurée en volume, elle se situe depuis le début de l’année 2022 à peu près à son niveau moyen de l’année 2019 (période pré-Covid 19). La vive inflation explique la différence des progressions en volume et en valeur.

Cet écart est encore plus marqué s’agissant de la seule consommation de produits agroalimentaires, dont les prix ont vivement augmenté. Cette diminution, en volume, peut refléter plusieurs types d’évolutions des comportements : baisses effectives des quantités consommées et / ou changements dans la qualité des produits achetés.

Dans le même temps, la propension à épargner des ménages reste élevée. Le taux d’épargne des ménages atteint près de 19%, soit presque 4 points au-dessus de son niveau de 2019.

La France est-elle en passe de devenir « l’homme malade » de l’Europe ?

La réponse à cette question dépend de la définition donnée de « l’homme malade ». Si nous considérons qu’il s’agit d’un pays dont l’économie est en déclin, alors la réponse est oui. La France a un risque de devenir « l’homme malade » de l’Europe.

L’économie française souffre, en effet, de plusieurs maux chroniques : une croissance atone depuis plusieurs années (autour de 1%), un chômage élevé (supérieur à 7% de la population active), une compétitivité en baisse, qui se traduit par un déficit commercial croissant, une dette publique élevée, qui atteint plus de 110% du PIB.

Cette situation est le résultat de plusieurs facteurs, notamment : un modèle économique et social rigide, qui rend difficile l’adaptation aux changements économiques, une bureaucratie pesante, qui freine l’innovation et l’investissement, une fiscalité élevée, qui pèse sur les entreprises et les ménages… Si la France ne parvient pas à résoudre ces problèmes, elle risque de perdre son attractivité pour les investisseurs et les entreprises, ce qui pourrait entraîner une détérioration encore plus importante de sa situation économique.

Malgré tout, il est important de noter que la France dispose également de nombreux atouts comme un marché intérieur important et dynamique, un capital humain qualifié, une Recherche et Développement de pointe….

Si la France parvient à mettre en œuvre des réformes visant à améliorer sa compétitivité et sa productivité, elle pourrait sortir de sa stagnation économique. Si elle a un risque de devenir « l’homme malade » de l’Europe, elle dispose également des atouts nécessaires pour éviter ce scénario. Le choix de la voie à suivre lui appartient.

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