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Emmanuel Macron osera-t-il annoncer l’obligation du port du masque dans les lieux publics ?
©ludovic MARIN / POOL / AFP

Atlantico Business

La relance et les milliards d’euros, c’est bien, mais l’obligation du port du masque serait mieux pour restaurer la confiance nécessaire au sauvetage de l’économie. La France sera-t-elle une fois de plus la dernière à l’imposer ?

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Il faut croire que les Français sont véritablement allergiques aux masques. Parce que même les ministres qui ont défilé à la télévision toute la semaine pour se montrer n’en portaient pas systématiquement. Quel exemple. 

Maintenant que la quasi-totalité des pays européens est en train de rendre le port du masque obligatoire, la France sera-t-elle une fois de plus la dernière à s’y résoudre

Alors que, pendant les mois de mars et d’avril, la France s’est retrouvée au bord de la guerre civile pour se procurer des masques qu‘on n’avait pas, voilà qu’aujourd’hui, quand les masques sont disponibles partout, les Français ne les portent pas. 

Or, il existe désormais un consensus dans le corps médical pour dire qu‘en l’absence de traitement efficace et surtout de vaccins, il va falloir s’habituer à vivre avec le virus et surtout s’en protéger. Ce qui veut dire porter un masque, se faire tester ou dépister, accepter la traçabilité et l’isolement pendant au moins 14 jours en cas de contamination. Il existe un consensus chez les médecins généralistes et spécialistes. La quasi-totalité des chefs d’entreprises et des responsables syndicaux en conviennent. Le respect des mesures barrières (dont le masque) est le seul moyen de contrôler la circulation du virus et de contribuer à l’éteindre, en attendant que les vaccins soient prêts. 

Ce qui est extraordinaire en France, c’est qu‘il y ait encore des hésitations et des désaccords sur la décision de rendre les mesures obligatoires. Ce qui est encore plus surréaliste, c’est que cette affaire soit politisée. Si l’ensemble de l’opinion (à quelques exceptions près) est d’accord avec la nécessité de porter le masque, cette opinion favorable est partagée en deux. 

Entre ceux qui considèrent que le port du masque relève de la responsabilité individuelle et donc de la liberté de chacun et une autre partie qui considère qu’il en va de la santé publique et que la mise en danger d’autrui justifierait amplement le caractère obligatoire pour tous. Faute d’avoir le courage d’imposer cette disposition, on se retranche derrière les appels à la responsabilité de chacun, à l’autodiscipline. Quelle arrogance ! Ou alors quelle naïveté ! L ‘autodiscipline, ça ne marche pas en France. 

Le problème est qu’il n’en va pas seulement de sa peau, mais de la peau des autres. Le masque sert non seulement à se protéger des autres, mais aussi à protéger les autres de soi –même. Pour les médecins, l’absence de masques met en danger tout le monde. Soi-même et les autres. 

Ça n’est pas la première fois que nous avons du mal à accepter une décision qui est vécue comme liberticide par certains alors qu‘elle s’avère indispensable pour protéger la vie des autres. Il a fallu des années de batailles pour obtenir l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Il a fallu des années de colloques et d’analyses pour prouver que le port de la ceinture de sécurité était bénéfique, non seulement pour le conducteur de voitures mais aussi pour les passagers de la voiture. 

Aujourd’hui, l’interdiction de fumer dans les lieux publics est passée dans les mœurs des Occidentaux (et pas seulement), tout comme le port de la ceinture. On pourrait multiplier ainsi les exemples de débats violents entre des partisans forcenés de la liberté individuelle et ceux qui considèrent que cette liberté met la vie des autres en danger. Ces débats sont souvent violés, et servent d’enjeux politiques, ce qui mériterait de s’interroger sérieusement sur les fondements idéologiques. 

En France, le masque est devenu un objet politique. Quand il n’y en avait pas, il servait à juste titre de marqueur des incapacités de l’Etat à gérer la crise. Maintenant qu’il y en a, rendre ce masque obligatoire serait la preuve supplémentaire du caractère autoritaire du régime politique, on rêve. 

Cette situation explique à elle seule les hésitations du gouvernement et du président de la République. Emmanuel Macron et son entourage ont passé tellement de temps à expliquer que l‘absence de masques n’était pas un problème, puisque les masques n’étaient absolument pas utiles et efficaces. Pourquoi en réclamer ? A quoi bon en porter ? 

Aujourd’hui, rendre le masque obligatoire reviendrait à reconnaître que la crise a été entachée au début d’un mensonge et d’une faute grave. 

Résultat, aujourd’hui, l’appareil d’Etat, à tous les niveaux, met l’accent sur les risques d’un retour de l’épidémie, en espérant que le climat anxiogène ainsi créé et entretenu par les médias, finirait par convaincre l’ensemble de la population qu’il faut porter les masques. La pédagogie, la sensibilisation ne suffisent pas. La peur non plus. Pour beaucoup, le virus n’attaque que les autres. 

Il faudra donc généraliser l’obligation du port du masque avec sanction et répression à la clef. Emmanuel Macron pourrait se résoudre à l’annoncer lors de son intervention publique du 14 juillet. 

Actuellement, le port du masque est recommandé et il est théoriquement obligatoire dans les transports publics (Sncf, Ratp, autocar, taxis) et dans les magasins. C’est à dire dans tous les espaces publics fermés. Dans la réalité, si la mesure est à peu près respectée dans le métro et le train, elle ne l’est pas dans la plupart des magasins. Or, il faudrait qu‘elle le soit dans les commerces, dans les salles de spectacles, les stades de football et dans tous les lieux de rassemblement. La grande majorité des entreprises respectent la pratique. Les industries agroalimentaires sont très scrupuleuses et pour cause, pour eux c’est une question de vie ou de mort. La contamination d’une chaine de transformation alimentaire aurait des conséquences catastrophiques pour leur business. Mais la plupart des entreprises industrielles ou de services sont liées par les conditions et les normes sanitaires très strictes qu‘elles doivent respecter. Elles vivent quotidiennement avec ces normes et sont en permanence contrôlées par l’administration et les personnels qui peuvent, à chaque instant, faire jouer leur droit de retrait. 

Dans la plupart des pays du monde, la question du masque n’a pas cette dimension idéologique qu’elle a en France. 

Dans les pays d’Asie, le port du masque est une habitude culturelle qui est rendue obligatoire sans discussion par l’opinion si besoin est. Actuellement, le masque est obligatoire pour tout le monde dans tous les pays dont on sait qu’ils se sont les mieux défendus du virus... En Chine, en Corée, à Singapour. 

En Europe, la plupart des pays de l’Union européenne sont en train de passer sur le mode obligatoire, compte tenu des risques d‘une deuxième vague épidémique. En Allemagne, en Belgique, aux Pays Bas, en Espagne, en Grèce, en Italie, on a commencé dans les régions où le virus s’est remis à circuler. 

Aux Etats-Unis, le masque est désormais obligatoire en Californie. En Grande Bretagne, il est fortement recommandé.

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