Emeutes urbaines : la solution passe-t-elle par les bibliothèques ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Elisabeth Borne a annoncé en fin de semaine dernière "un plan d'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques, en particulier le dimanche, dans 500 collectivités".
Elisabeth Borne a annoncé en fin de semaine dernière "un plan d'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques, en particulier le dimanche, dans 500 collectivités".
©Amelie QUERFURTH / AFP

Incongruité

Elisabeth Borne a annoncé en fin de semaine dernière "un plan d'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques, en particulier le dimanche, dans 500 collectivités".

Michel Villard

Michel Villard

Michel Villard est universitaire. Il écrit sous pseudonyme.

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Soyons honnêtes : reconnaissons que le plan du gouvernement ne se résume pas à cette mesure très symbolique, dont le but est évidemment d’équilibrer un plan qui comporte des dispositions nettement plus répressives et sécuritaires, lesquelles ont été présentées la veille à la Sorbonne.  

Le message sur les bibliothèques vise à plaire à la gauche. « Ouvrez des bibliothèques et vous fermerez des prisons », disait Victor Hugo. Cette formule bien naïve continue d’émoustiller. Pour le gouvernement, cette initiative sur les horaires sera probablement indolore puisque le coût sera en grande partie supporté par les collectivités locales.

Si la dimension tactique de cette annonce est claire, on reste quand même interrogatif : par quel mystérieux cheminement une telle idée a-t-elle pu émerger dans les cercles dirigeants ? A qui veut-on faire croire que les émeutiers ont brûlé des bibliothèques parce qu’ils voulaient protester contre des horaires trop restrictifs ?

Si l’incongruité de cette mesure n’échappe à personne, elle soulève néanmoins un vrai problème, et ce problème est très similaire à celui que posent les attentats islamistes. Il a été très bien présenté par Isabelle de Mecquenem à la suite de l’assassinat du professeur Dominique Bernard au lycée d’Arras. On peut le résumer ainsi : doit-on considérer que l’école a échoué dans sa mission, ou au contraire qu’elle a trop bien réussi ? Autrement dit, Dominique Bernard a-t-il été tué parce que le djihadiste accusait l’école de lui avoir vendu du rêve, ou bien parce qu’il rejette le message même de l’école ?

La première interprétation considère que la cause des violences réside dans une promesse non tenue. En somme, les jeunes des quartiers aspirent à s’intégrer ; ils approuvent les valeurs de la République, mais ils constatent qu’elles ne sont pas réalisées dans la vie quotidienne. Leur violence est donc une révolte qui, loin d’être menaçante, n’est qu’un appel au secours : tout ce qu’ils veulent, c’est davantage de République. Les valeurs républicaines ne sont pas en cause ; simplement, elles sont insuffisamment visibles lorsqu’il s’agit de trouver un emploi ou un logement. Dès lors, la solution est toute trouvée : il suffit de lutter contre les discriminations, comme propose de le faire le gouvernement. Selon la formule utilisée par Elisabeth Borne, désormais classique, « nos quartiers sont une richesse et ne demandent qu’à exprimer leur potentiel ». Avides de République et de savoir, les jeunes des quartiers vont donc se précipiter dans les bibliothèques.

Se pourrait-il cependant que cette analyse soit inadéquate, voire carrément fausse ? Se pourrait-il qu’une partie de ces jeunes ne veulent tout simplement pas des valeurs républicaines ? Dans ce cas, le problème est autrement plus grave et les solutions proposées risquent de tomber à l’eau. Il est alors à craindre que les bibliothèques peinent à se remplir le dimanche.

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