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Elections 2020 : les enjeux du combat face à Donald Trump
©TIMOTHY A. CLARY

Bonnes feuilles

Jean-Eric Branaa publie "Joe Biden : le 3e mandat de Barack Obama" (VA Editions). A travers le parcours de Barack Obama et Joe Biden, les nombreuses facettes de leurs réalisations communes sont exposées et remises en contexte, afin de comprendre ce que Joe Biden compte proposer au peuple américain en 2020. Extrait 1/2.

Jean-Eric Branaa

Jean-Eric Branaa

Jean-Eric Branaa est spécialiste des Etats-Unis et maître de conférences à l’université Assas-Paris II. Il est chercheur au centre Thucydide. Son dernier livre s'intitule Géopolitique des Etats-Unis (Puf, 2022).

Il est également l'auteur de Hillary, une présidente des Etats-Unis (Eyrolles, 2015), Qui veut la peau du Parti républicain ? L’incroyable Donald Trump (Passy, 2016), Trumpland, portrait d'une Amérique divisée (Privat, 2017),  1968: Quand l'Amérique gronde (Privat, 2018), Et s’il gagnait encore ? (VA éditions, 2018), Joe Biden : le 3e mandat de Barack Obama (VA éditions, 2019) et la biographie de Joe Biden (Nouveau Monde, 2020). 

Voir la bio »

Joe Biden s’est déjà présenté à la présidence en 2008, et la politique étrangère avait dominé le débat politique cette année-là. Cela convenait parfaitement au président de la commission sénatoriale des Affaires étrangères qu’il était jusqu’alors et, bien que Joe Biden ait abandonné la course de 2008 après l’Iowa, sa réputation d’expert en politique étrangère lui avait permis de se rendre incontournable et d’être choisi par Barack Obama pour figurer dans le « ticket » avec lui.  

Le scrutin de 2020 se présente très différemment. La politique étrangère ne représente pas grand-chose dans la campagne électorale actuelle et, s’il devait y avoir un événement majeur qui se produisait, il y a de grandes chances pour que cela favorise plutôt Donald Trump, parce qu’il est aux commandes. Cette année, les électeurs démocrates sont plutôt préoccupés par des questions qui touchent leur quotidien comme les soins de santé ou les inégalités des revenus, ou qui engagent l’avenir comme le changement climatique. Par-dessus tout, il y a le défi de vaincre Donald Trump, qui est placé comme priorité absolue par une grande part de l’électorat. C’est dans ce contexte qu’une des toutes premières choses que Joe Biden a dites en entrant en campagne a été une phrase également prononcée par Elizabeth Warren : « En 2019, la politique étrangère est de la politique intérieure. Et la politique intérieure est la politique étrangère. Les deux sont profondément liés. » Joe Biden a ajouté un élément de plus par rapport à la déclaration de la sénatrice du Massachusetts : « Le premier pilier de la politique étrangère est de réparer et de revigorer notre propre démocratie ». Cette déclaration résume à elle seule la plate-forme de politique étrangère de Joe Biden et indique que le thème principal de sa campagne est de restaurer ce que l’administration Trump a passé ces deux dernières années et demie à déchirer. Mais elle cristallise aussi la manière dont la dynamique politique s’est modifiée, tant au sein du pays qu’à l’étranger, depuis que Joe Biden a quitté son poste. Si Elizabeth Warren et Bernie Sanders entendent développer la politique étrangère du pays dans le prolongement des réformes économiques, Joe Biden veut parler de choses très élémentaires, allant de la refonte du système éducatif à l’amélioration de la démocratie ou à la transparence du système politique. 

S’il y a des points à prendre avec la politique étrangère, Joe Biden les gagnera certainement. Dès le début de sa campagne, il a multiplié les discours dénonçant ce président qui « sape les alliances démocratiques du pays tout en embrassant les dictateurs qui font appel à sa vanité. » « Et ne vous y trompez pas, a-t-il ajouté dans un discours important prononcé à New York sur ce même sujet durant l’été 2019, « le monde voit Trump pour ce qu’il est : hypocrite, mal informé et impulsif. Parfois corrompu. Dangereusement incompétent, et incapable de diriger le monde et de diriger même sa propre maison. » On l’a dit : le président Trump a fait de l’annulation du bilan de l’administration Obama en matière de politique étrangère l’une de ses principales priorités. Il n’est donc pas surprenant que l’ancien vice-président Joe Biden – qui a joué un rôle clé dans la mise en œuvre d’accords aujourd’hui abandonnés comme l’Accord de Paris sur le climat et l’accord nucléaire iranien – considère la politique étrangère de Trump comme une catastrophe. Juste avant son discours de New York, l’équipe de l’ancien vice-président a publié une vidéo en ligne reprenant ses principaux objectifs. La vidéo commence par l’image de l’Assemblée générale des Nations Unies qui se moque du Président Trump lors d’un discours qu’il a prononcé dans cette enceinte en septembre 2017.  

L’avenir du monde 

Le tableau que Joe Biden brosse du monde sous Trump est d’une instabilité de plus en plus flagrante. Il explique à chaque fois que possible qu’il est rendu encore plus instable par la politique étrangère de l’administration Trump, que l’on connaît sous le titre-chapeau de « l’Amérique d’Abord ». Comme de nombreux autres démocrates, il estime que la confiance dans les institutions du monde entier est en baisse, et que la peur de l’autre est bien plus grande. Joe Biden analyse qu’il y a de dangereuses résurgences du nationalisme extrême et de l’illibéralisme, du protectionnisme et de la xénophobie. Cela est bien entendu dû au travail de Donald Trump et aux démagogues du monde entier qui agissent comme lui. 

Le cœur du programme de politique étrangère de Biden est de reconstruire les alliances mondiales que Trump a négligées ou mises à mal et d’utiliser ces coalitions pour repousser l’autoritarisme, le changement climatique et les autres menaces qui planent sur les États-Unis et le monde. Joe Biden est très clair sur certains points précis, tel celui de rejoindre l’Accord de Paris sur le climat – ce qui se fera sans délai –, de donner aux négociateurs les moyens de poursuivre les pourparlers visant à supprimer les capacités nucléaires de la Corée du Nord et de reprendre les pourparlers diplomatiques avec l’Iran pour tenter de sauver l’accord nucléaire de l’administration Obama.  

Dans la continuité du discours qui était celui du gouvernement auquel il a appartenu, il s’est également engagé à mettre fin aux « guerres éternelles » en Afghanistan, en Irak et ailleurs, et à se concentrer plus spécifiquement sur la lutte contre le terrorisme. Plus qu’une promesse de Barack Obama, dont c’était effectivement l’un des principaux axes, c’est la poursuite de ses propres objectifs que l’on retrouve. On se souvient que ces points étaient déjà très présents dans sa campagne présidentielle de 2008. Les reprendre tels quels peut sembler surprenant puisque les critiques lui reprochent toujours d’avoir retiré les troupes de combat américaines de l’Irak, ce qui aurait permis à Daech de se développer.  

Quant à l’Afghanistan plus spécifiquement, deux mandats de quatre ans n’ont pas permis au gouvernement auquel il a appartenu de retirer les troupes du terrain : elles sont toujours sur place aujourd’hui. Donald Trump a lui aussi échoué dans la finalisation d’un accord avec les talibans en septembre 2019, qui devait permettre de ramener le nombre de soldats américains sur place à 8500. Il le fera toutefois certainement avant les élections, même sans accord formel, car il lui faut un succès sur ce terrain pour contrer Joe Biden.  

Enfin, les opposants de Joe Biden lui reprochent aussi son vote en faveur de l’intervention en Irak, qui est fréquemment rappelé, même s’il était rapidement revenu dessus, ce qui est tout aussi régulièrement passé sous silence. Donald Trump saura appuyer sur cette question le moment venu. 

Extrait du livre de Jean-Eric Branaa, "Joe Biden : le 3e mandat de Barack Obama", publié chez VA Editions. 

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