Efforts budgétaires : entre ceux qui en sont dispensés par François Hollande et ceux qu’on ne peut plus mettre à contribution, qui sera vraiment concerné ?<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande a évoqué la possibilité d'alléger les cotisations des personnes "ni pauvres, ni riches" ce qui va encore réduire le nombre de contribuables.
François Hollande a évoqué la possibilité d'alléger les cotisations des personnes "ni pauvres, ni riches" ce qui va encore réduire le nombre de contribuables.
©Reuters

Chasse au trésor

François Hollande a laissé entendre que ceux qui ne sont "ni pauvres, ni riches" verraient les prélèvements sur leurs revenus allégés. Les exceptions sont de plus en plus nombreuses pendant que d'autres classes sociales, elles, sont au bord de la saturation fiscale. Le gouvernement va donc devoir trouver de nouvelles sources pour remplir ses objectifs budgétaires.

Jean-Philippe Delsol

Jean-Philippe Delsol

Jean-Philippe Deslol est avocat fiscaliste et président de l’Institut de Recherches Economiques et Fiscale, IREF, essayiste dont le dernier ouvrage est Civilisation et libre arbitre paru en 2022 cher Desclée de Brouwer.

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Atlantico : François Hollande a évoqué la possibilité d'alléger les cotisations des personnes "ni pauvres, ni riches" ce qui va encore réduire le nombre de contribuables. Qui sont ceux qui aujourd'hui sont "dispensés" de la pression fiscale ?

Jean-Philippe Delsol : Dans l'absolu, tout le monde paie des impôts, puisqu'il suffit d'acheter un bien pour payer au moins de la TVA. Nous sommes par contre dans un pays où les personnes dispensées de l'impôt sur le revenu forme 50% de la population, ce qui est bien plus élevés que dans d'autres pays comme l'Allemagne (40%) et les Etats-Unis (35%). De plus, les Français dispensés de l'impôt sur le revenu sont en général dispensés de payer la taxe d'habitation (ou bénéficient d'un abattement). Donc la moitié de la population ne paie pas les impôts "qui font mal", c'est-à-dire ceux pour lesquels il faut faire la démarche de payer. Cela créé une sorte de défaut d'adhésion à la société : celui qui ne paie pas n'a pas forcément conscience du coût des services que lui délivre la société. 

A l'inverse, qui sont aujourd'hui ceux pour qui la pression fiscale a atteint son maximum ? 

Nous sommes clairement au-delà de la courbe de Laffer, celle qui montre qu'au-delà d'un certain niveau d'imposition, le produit de l'impôt décroît. La preuve : en 2013, par rapport au budget de la France, il manque 23 milliards de recettes brutes alors que les impôts ont augmenté. Je ne pense pas qu'il y a un "profil type" de celui qui est arrivé au maximum de la taxation possible. En réalité, c'est plus un état d'esprit de catégories de la population très différentes qui, face à un niveau de fiscalité jugé insupportable, vont adopter des attitudes de fuite. Le plus caractéristique, c'est le riche qui fuit la France. Mais le phénomène le plus important, c'est ceux qui vont être dans des attitudes de rejet : celui qui aurait aimer continuer à travailler mais qui ne gagnerait pas plus après impôt que s'il prenait sa retraite, celui qui va travailler moins (une profession libérale qui va arrêter un ou deux jours par semaine), les jeunes qui veulent partir à l'étranger pour y faire leur carrière (et qui sont généralement les plus dynamiques de leur classe d'âge), voire même ceux qui sont dans des situations modestes mais qui sont désincités à travailler, car travailler rendra leur situation économique encore plus difficile. On peut même évoquer ceux qui travaillent au noir : les recettes de l'URSSAF ont chuté de 8% en 2013...

Entre les Français qui échappent encore à la contribution et ceux qui ont atteint la limite en termes d'imposition, où se situent les marges de manœuvre sur lesquelles faire reposer les efforts budgétaires voulus par le gouvernement ? Que représente approximativement ce qu'il est encore possible de ponctionner ? 

Il ne sert plus à rien de vouloir augmenter les niveaux d'impôts. Le défaut des gouvernements est de croire que la sortie de l'endettement viendra de l'augmentation de la fiscalité. Mais nous avons dépassé la courbe de Laffer donc cela ne sert à rien. Par contre, plus la fiscalité apparaît insupportable, plus des lobbys se créent pour réclamer des niches, pour leur propre compte. Cela rend d'ailleurs l'impôt encore plus injuste, et donc encore plus insupportable. Selon le sénateur Philippe Marini, ces niches fiscales "apparentes" et "cachées" représentent 230 milliards d'euros par an. Il faudrait donc envisager la suppression de ces niches, mais non pas comme le propose les idéologues socialistes pour augmenter les impôts, mais pour simplifier l'impôt, en réduire les taux et le rendre plus juste. 

Même si le nombre de Français imposables à l'impôt sur le revenu a augmenté, est-il crédible, ou souhaitable, de penser que l'Etat pourrait décider d'augmenter fortement la population des contribuables à l'IR (bien qu'il semble se positionner sur une approche contraire) ? Est-ce une vraie solution de financement ou cela resterait-il symbolique ?

Si vous aviez en France un taux d'impôt sur le revenu de 15% au-delà de 8000 euros et de 2% en-deçà, avec une situation où tout le monde doit s'acquitter de l'impôt (ce qui rétablirait la démocratie fiscale), l'IR aurait un produit supérieur à ce qu'il est actuellement. Et on pourrait supprimer toutes les niches. Je vous indiquais précédemment que les niches représentent 230 milliards d'euros. Donc, en simplifiant l'impôt et en supprimant toutes les niches vous pouvez non seulement augmenter ce que rapporte l'impôt, mais il y aura également une augmentation indirecte, tout en supprimant une partie de la fraude, car un impôt simple est très difficile à contourner, et il quasiment impossible de frauder.  

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