Déclaration d’impôts : quelles erreurs traquer dans les données pré-remplies par l’administration ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Quand vous recevez les documents et la déclaration sur Internet, il est possible d’effectuer les corrections facilement.
Quand vous recevez les documents et la déclaration sur Internet, il est possible d’effectuer les corrections facilement.
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Impôts

Alors que la campagne pour la déclaration des revenus vient de débuter, il est important de repérer les éventuelles erreurs laissées par l'administration française dans les données pré-remplies.

Thomas Carbonnier

Thomas Carbonnier

Thomas Carbonnier est Avocat, fondateur & coordinateur pédagogique du diplôme Start-up Santé (bac+5) à l'Université Paris Cité. Il est également Président de l'UNPI 95, une association de propriétaires qui intervient dans le Val d'Oise. Il est titulaire du Master 2 droit fiscal, du Master 2 droit financier et du D.E.S. immobilier d’entreprise de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne.

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Atlantico : Alors que la campagne pour la déclaration des revenus vient de débuter, quelles sont les principales erreurs à traquer et à vérifier dans les données pré-remplies par l’administration ?

Thomas Carbonnier : Pour débusquer d’éventuelles erreurs dans les données pré-remplies dans le cadre de vos déclarations de revenus 2023, il est déjà important de vérifier le quotient familial et de s'assurer qu'il n'y a pas un enfant qui a été oublié ou qu'il n'y a pas eu un statut appliqué qui pourrait ouvrir droit à un quotient familial plus important. Les enfants sont toujours déclarés mais il peut y avoir des oublis par rapport à la réduction liée à la scolarisation des enfants au collège, au lycée ou dans l'enseignement supérieur. Cela ne représente pas des sommes folles mais cela permet de bénéficier d’avantages. Il faut donc bien y penser et vérifier. Il y a aussi les dons aux œuvres, aux associations, aux associations ou même à des syndicats et des œuvres caritatives. Ces dons peuvent être déductibles. 

Quelles sont les démarches à effectuer pour les contribuables en cas d’erreurs dans les données pré-remplies par l'administration ?

Quand vous recevez les documents et la déclaration sur Internet, il est possible d’effectuer les corrections facilement. Sur Internet, il y a toujours une case en dessous du montant pré-rempli où il est possible d’inscrire un montant différent. Il est donc possible de procéder à des corrections si vous avez repéré l'erreur. Il est possible de corriger autant de fois que vous le souhaitez. 

Si par contre, vous avez déjà fait votre déclaration, que vous l'avez déjà envoyée et que vous êtes après la date de fin des déclarations, il faudra demander une correction en ligne en fonction d’un certain délai. Passé un certain délai, les démarches et les corrections devront être effectuées via le format papier de la réclamation administrative contentieuse.

Que faut-il faire dans des cas où l'administration fiscale contesterait une correction du contribuable ?

L'administration va rejeter la demande et dans ce cas-là, si le contribuable souhaite aller plus loin, il faut faire une procédure de contentieux fiscal. Dans un premier temps, cela consiste à faire un recours préalable devant l'administration elle-même, soit auprès du supérieur hiérarchique, soit devant l'auteur du refus. En cas de maintien du refus, cela aboutit à des actions en justice. 80 % du contentieux fiscal part devant le tribunal administratif. Il est primordial d’être accompagné d'un avocat fiscaliste. Il va permettre au préalable d’évaluer l’intérêt de mener ce type d'actions et s’il n’y a pas une erreur de jugement vis-à-vis de la potentielle faute dans la déclaration pré-remplie par l’administration. Souvent, certains contribuables se trompent eux-mêmes. Ils pensent qu'il y a des erreurs dans la déclaration pré-remplie alors qu'il n'y a pas d'erreur. Si on pense qu'il y a bien une erreur, l'avantage de l'avocat est qu’il va se baser sur les fondements juridiques pour justifier d'une nouvelle position. 

Dans le cadre des déclarations et des données pré-remplies, est-ce que les tranches d'imposition revalorisées par rapport à l’indexation du barème sur l’inflation ne risquent-elles pas de conduire à des erreurs ?

Tout est calculé de façon informatisée. Des bugs et des erreurs peuvent survenir. Le contribuable peut se retrouver avec un montant d'impôt supérieur à ce qu'il aurait dû payer. Cela peut arriver mais cela reste rare. Ces erreurs dans les déclarations pré-remplies vont concerner les déclarations dites complexes. Les personnes concernées ont généralement des revenus patrimoniaux issus de l'étranger, qui peuvent être des revenus immobiliers, des revenus dividendes, des obligations d'entreprises privées cotées à l'étranger. Ces situations deviennent plus complexes et sont susceptibles de contenir des erreurs dans les déclarations pré-remplies. 

Les Français, dans leur grande majorité, sont des salariés. Ils ont souvent une assurance vie, un Livret A. 

Quelles sont les niches ou les opportunités auxquelles le contribuable ne pense pas forcément pour la déclaration 2023 et qui permettraient de réduire son impôt sur le revenu ? 

Une des possibilités concerne les enfants. Lorsqu’ils sont grands et majeurs, il faut se demander s’il n’y a pas un intérêt à les détacher du foyer et à leur verser une pension alimentaire. Cela permet de déduire la pension alimentaire du côté des parents qui ont versé cette somme. Du côté de l'enfant, le revenu perçu doit être déclaré. Evidemment, les tranches d'imposition ne sont pas les mêmes car souvent l'étudiant n’a pas ou peu de revenus. Il est possible que les enfants ne soient pas imposables sur ces pensions alimentaires reçues. Mais elles étaient quand même déductibles du côté des parents. Ce calcul peut donc être fait par rapport au quotient familial. Depuis François Hollande, avec le plafonnement très important du quotient familial, détacher les enfants du foyer fiscal est souvent une option intéressante. Souvent, cela n’est pas automatique et tout va dépendre de la situation de votre enfant. Si vous avez par exemple quelqu'un qui est en alternance qui gagne 1.800 euros par mois, est-ce vraiment intéressant de lui verser une pension alimentaire ? Fiscalement, ce n’est pas certain. Le débat est ouvert pour ce cas précis.

Par contre, si votre enfant a travaillé seulement deux ou trois mois dans l'année, même à 1.800 euros, ou dans le cadre d’un beau stage à 1.000 ou 1.200 euros, les revenus annuels sont assez faibles. Il est alors très intéressant de lui verser une pension alimentaire. 

Quelles sont les solutions pour alléger facilement son impôt sur le revenu ? Certains dons défiscalisés auraient des taux plus intéressants cette année. Les dons versés aux « œuvres et organismes d’intérêt général concourant à l’égalité entre les femmes et les hommes » sont pour la première fois soumis à une réduction d’impôts de 66 %. Cette réduction sera augmentée à 75 % pour les dons effectués au profit de la Fondation du patrimoine pour la sauvegarde du patrimoine immobilier religieux, dans la limite de 1.000 euros par an. Ces dons défiscalisés sont-ils une opportunité pour réduire son imposition cette année avec ces dons ?

Ces dons sont un choix très altruiste. Cela permet de s'alléger effectivement mais cela va réduire  la valeur totale du patrimoine du contribuable. Cela doit conduire en réalité à s’interroger : est-il souhaitable de réduire son niveau d'impôt ou est-ce que les contribuables pourraient-ils espérer ne pas payer plus d'impôts et gagner plus ? Il est possible de réduire son impôt sans forcément gagner plus et sans perdre en revenus.

De nombreux dispositifs de défiscalisation autour du logement sont possibles. Les ministres du logement successifs ont d’ailleurs voulu mettre en place des dispositifs à leurs noms. Les effets positifs n’ont pas toujours été au rendez-vous. Les promoteurs vendent des biens immobiliers à des tarifs qui sont hors de prix et survalorisés car il y a un dispositif de crédit d’impôt et de défiscalisation. Le bien est alors surpayé. Des contraintes sur le profil du locataire sont appliquées également et elles empêchent parfois de trouver des locataires. Au final, la défiscalisation tombe à l'eau car si vous n'avez pas de revenus, vous ne pouvez rien déduire. Et si vous avez la chance de trouver un locataire, vous n'obtenez pas forcément le profil qui vous convient le mieux. Certains locataires vont avoir des difficultés à payer leur loyer à cause de fragilités sur le plan financier. Cette situation constitue un risque supplémentaire dans le cadre des décisions à prendre pour un investissement. Comme le bien immobilier a été surpayé initialement, le jour de la revente, il sera bradé et vendu à perte. Ce qui a été gagné en défiscalisation risque de ne pas se voir immédiatement.

La défiscalisation apporte une réduction d'impôt immédiate et contribue à une certaine satisfaction. Mais la potentielle perte de patrimoine liée à un investissement qui finalement ne se révèle pas aussi intéressant peut s’avérer extrêmement dommageable car le bien en question a généralement été surpayé.

Pour alléger son impôt sur le revenu, d'autres pistes existent comme les dons, un investissement dans une PME en souscrivant à son capital. Mais ces solutions sont risquées. Beaucoup de start-ups et de PME risquent de faire faillite. Il est possible de ne jamais revoir l’argent qui a été investi. 

Des solutions de défiscalisation existent. Elles permettent d’économiser sur l'impôt mais la réduction d'impôt ne sera pas suffisante pour couvrir la perte totale de capital. Il peut y avoir des investissements comme dans les SOFICA, les Sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel. Ces sociétés investissent dans des œuvres cinématographiques et participent à la production. Pour inciter les contribuables à investir dans ce type de projet, un avantage fiscal est proposé. 

Une autre nouveauté concernant l’impôt sur les revenus 2023 est le doublement, sous certaines conditions, du déficit foncier. Ce mécanisme est-il intéressant pour alléger les déclarations ? 

Il y a déjà eu par le passé des dédoublements du déficit foncier, pourquoi pas, ça peut être intéressant. Si vous êtes propriétaire d’un logement, et que vous le proposez à la « location nue », il est possible de déduire des travaux. S’ils concernent un projet de rénovation énergétique et que ces travaux permettent au logement de sortir du statut de passoire thermique, le plafond de la part déductible sur votre revenu global est doublé et passe donc de 10.700 euros à 21.400 euros. Cela peut permettre d’effectuer des travaux qui peuvent être onéreux tout en diminuant sensiblement son imposition globale.

Que faire pour alléger l'impôt sur le revenu pour les contribuables tout en bénéficiant de réductions ou de niches ?

Au-delà de la réflexion sur la réduction du montant de l’impôt, il est utile de s’interroger sur le revenu net après impôt. A l’ère du travailler plus pour gagner moins, il est urgent d’inverser la tendance. La bonne question est donc comment travailler moins pour gagner plus ?

Le statut de loueur meublé non professionnel (LMNP) a fait l'objet de nombreux débats à l'Assemblée nationale lors de la dernière loi de finances qui portait sur l'année 2024. Contrairement à la location vide  qualifiée de revenu foncier, la location meublée permet d'amortir le bien immobilier.

Avec le statut de loueur meublé non professionnel, vous n'imputez pas de déficit sur le revenu global, contrairement aux revenus fonciers. Vous n'allez pas réduire votre impôt réellement comme une réduction d'impôt, mais par contre vous augmentez votre revenu sans payer plus d'impôts.

Dans les dispositifs de défiscalisation, il ne faut pas oublier que cela doit vous faire économiser de l'impôt mais cela contribue à augmenter votre revenu imposable. Cela va compenser une partie de l'augmentation d'impôts. L'intérêt du statut LMNP est justement d'éviter une partie de l'imposition. Cela a fait bondir un certain nombre de parlementaires de la majorité actuelle. Ils ont précisé que cela entraînait un déséquilibre entre deux régimes entre d'un côté du revenu foncier (une location vide ou nue) et de l'autre un meublé. Nombreux sont ceux qui voudraient gommer ou supprimer cette différence avec l’instauration d’un régime unique.

D’autres pistes peuvent être intéressantes si l’on ne souhaite pas gérer soi-même le patrimoine. Un dispositif existe, la SCPI, la société civile de placement immobilier. Ces sociétés ont un agrément qui est donné par l'Autorité des marchés financiers et sont soumises à de nombreuses contraintes juridiques. Elles vont collecter l'épargne des gens, investir sur des ensembles immobiliers et gérer le tout. Des SCPI investissent, pas uniquement en France mais aussi à l'étranger, en Europe notamment. Si vous investissez par exemple au travers d'une SCPI qui achète des immeubles en Allemagne, vous aurez des avantages fiscaux indéniables, avec des taux d’imposition moindres (à environ 20 % au lieu de 47,20 % minimum).

Il y a un énorme engouement pour les SCPI européennes qui investissent maintenant en dehors de la France et qui au final représentent un dispositif plus intéressant pour le contribuable que la location vide en France mais moins intéressant que la location meublée. Si la scpi est un beau produit, elle comporte des inconvénients et risques. Elle doit donc s’inscrire dans une réflexion patrimoniale globale. C’est ce que j’incite à faire les adhérents de l’UNPI 95, Union Nationale des Propriétaires Immobiliers du Val d’Oise, que je préside. 

Cela pose donc la question de la compétitivité fiscale et de l’attractivité fiscale de la France par rapport à d'autres places financières. Emmanuel Macron a ouvert le débat en disant qu’il fallait réfléchir à l'attractivité financière de la France et qu’elle était indissociable de l'attractivité fiscale.

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