Ce qui se cache vraiment derrière l’auto-dissolution d’Extinction Rebellion<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Environnement
Des policiers tentent de déloger des militants du groupe Extinction Rebellion bloquant la route menant à Tower Bridge dans le centre de Londres, le 30 août 2021.
Des policiers tentent de déloger des militants du groupe Extinction Rebellion bloquant la route menant à Tower Bridge dans le centre de Londres, le 30 août 2021.
©Tolga Akmen / AFP

Extrémisme (pseudo) climatique

La branche britannique d'Extinction Rebellion a annoncé le 1er janvier renoncer à la désobéissance civile, son mode d'action historique.

Eddy  Fougier

Eddy Fougier

Eddy Fougier est politologue, consultant et conférencier. Il est le fondateur de L'Observatoire du Positif.  Il est chargé d’enseignement à Sciences Po Aix-en-Provence, à Audencia Business School (Nantes) et à l’Institut supérieur de formation au journalisme (ISFJ, Paris).

Voir la bio »

Atlantico : De quoi la décision d’Extinction Rebellion de renoncer aux actions de désobéissance civile au Royaume-Uni est-elle le signe ?

Eddy Fougier : Le communiqué indique une volonté de ne plus mener des actions d’obstruction mais se concentrer sur des manifestations plus classiques et notamment une grande manifestation prévue au mois d’avril. Après cette déclaration d’Extinction Rebellion canal historique, au Royaume-Uni, l’antenne française a fait savoir qu’elle continuerait à mener des actions d’obstruction et de désobéissance. Il est difficile de savoir exactement ce qui a guidé la décision au Royaume-Uni. Ce qui est sûr c’est qu’il y a une faible lisibilité du parcours militant de Extinction Rebellion.

En revanche, il est évident que les lignes bougent chez les militants du climat. Extinction Rebellion qui a été à l’avant-garde à partir du tournant de 2018 (en France après la démission de Nicolas Hulot, dans le contexte de l’émergence de la figure de Greta Thunberg et des marche pour le climat) est un peu débordé par d’autres mouvements et l’on assiste à un second tournant. On l’a vu avec les mouvements, comme ceux de Dernière rénovation ou de Just Stop Oil, dont l’action menée contre Les Tournesols de Van Gogh a fait réagir et aboutit à, si ce n’est ringardiser en tout cas réduire l’attractivité de leur action aux yeux des médias et des activistes. Et dans le même temps, on observe la montée en puissance de vraies opérations de sabotage, comme à Sainte-Soline avec les bassines ou à Bouc-Bel-Air dans l’Usine Lafarge. Derrière ces deux actions, on retrouve le mouvement des Soulèvements de la Terre. Et donc Extinction Rebellion qui était le fer de lance de la lutte militante contre le climat se retrouve sans doute un peu débordé par des moyens de lutte plus poussés. Aujourd’hui, chez les militants, la collusion entre le sentiment d’urgence climatique et celui d’inaction climatique amène à des passages à l’acte. 

À Lire Aussi

Derrière la désobéissance civile, le spectre de la décroissance pour tous

Ils ont été dépassés par plus radicaux ?

Je ne sais pas s’ils ont été dépassés en radicalité, mais en termes d’efficacité médiatique et d'impact sur la prise de décisions, les actions de Extinction Rebellion semblent avoir atteint une certaine limite. Extinction Rebellion, à ses débuts, était une nouveauté qui attirait les médias. Son action a permis de mettre le sujet climatique à l’agenda. Mais aujourd’hui leur impact est limité et leur efficacité aux yeux des militants a sans doute été contestée. Désormais, on désigne directement des cibles et on mène le combat contre ces dernières.

Extinction Rébellion a-t-elle eu des succès depuis sa création ?

Tout dépend ce qu’on appelle des succès. Les événements climatiques extrêmes ont amené à une prise de conscience climatique mais est-ce grâce aux actions du mouvement ou simplement au dérèglement climatique lui-même. Extinction Rebellion réclamait certaines actions concrètes pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, mais les COP ou les récents vœux du Président de la République montrent que cela n'a pas eu les effets escomptés. Et la sobriété énergétique est plus liée à la guerre en Ukraine qu’autre chose. Ce n’est pas nécessairement un échec, mais ce n’est pas une réussite. Extinction Rébellion se réfère souvent à d’autres épisodes de désobéissance civile qui ont réussi par le passé : Gandhi, les Suffragettes, le mouvement des Civil Rights. Nous en sommes loin.

Est-ce la philosophie de saturation par la désobéissance qui est remise en cause ?

L’un des objectifs de Extinction Rebellion est effectivement d’arriver à un seuil de soutien, en partant de l’hypothèse que passé un certain seuil de mobilisation, il y aurait un grand basculement. Pour certains, ce seuil est à 3,5% de la population. D’autres parlent de 10%. Sur ces bases-là, ils ont cherché à étendre au maximum leur influence directe et indirecte. Est-ce que c’est la source de leurs difficultés, c’est difficile à dire. Au Royaume-Uni, l’un des créateurs, Roger Hallam, a eu des propos controversés, ça a pu jouer aussi. Difficile de savoir exactement quelles sont les causes.

À Lire Aussi

Une étude menée dans 10 pays montre à quel point le dérèglement climatique angoisse les jeunes générations

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !