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À quel point a-t-on nié la réalité de la chute de la natalité en France ?
À quel point a-t-on nié la réalité de la chute de la natalité en France ?
©CESAR MANSO / AFP

Chute de la natalité

Selon les données publiées par l’Insee ce mardi, les naissances sont au plus bas depuis 1946. Le nombre idéal d’enfants souhaité par les Français, lui, ne diminue pas. Cherchez l’erreur…

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Atlantico : Dans une étude publiée par l’INSEE, on apprend que la natalité en France est au plus bas. Quelles sont les causes de cette chute de la natalité ?

Laurent Chalard : La cause principale de la chute de la natalité en France qu’on observe depuis 2010, est la diminution de la fécondité, c'est-à-dire une diminution du nombre d'enfants. Et cette diminution du nombre d'enfants par femme s'explique principalement par l'augmentation de l'âge moyen de la maternité. Précisément, l'âge moyen de la première maternité des mères en 2022 est de 31 ans alors qu'en 2012 il était de 30,1 ans, donc il y a eu un décalage d'un an en 10 ans. 

À quel point a-t-on nié la réalité de cette chute des natalités et comment elle aurait pu être anticipée ?

Nous avions tendance à nier cette réalité, tout simplement parce que l'on sortait d'années qui étaient considérées comme plutôt positives pour la France en termes de natalité, puisque vers 2009-2010, l'indice de fécondité était quasiment revenu au seuil de remplacement des générations. Nous étions dans une situation qui s'était considérablement améliorée par rapport aux années 1990 puisqu'il faut rappeler que la fécondité en France a atteint son point le plus bas en 1993 avec 1,66 enfant par femme. Il faut savoir qu’en 2022, la France est à un niveau plus haut que 1,66 enfants par femme. En termes de fécondité, nous n’avons pas atteint le point le plus bas. Nous avons a atteint le point le plus bas en termes de natalité parce que les générations en âge d'avoir des enfants sont moins nombreuses. 

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Il y aurait eu un moyen d’anticiper cette situation. Il aurait fallu se dire que justement en 2010, on avait atteint un point haut et qu’il y avait plus de chances que la natalité reparte à la baisse qu’à la hausse. Tout simplement parce que lorsqu’on regarde l'évolution de la fécondité dans les autres pays développés, on constate qu’il est très rare, voire quasiment exceptionnel, que la fécondité dépasse le seuil de remplacement d'une génération. Cela sous-entendait qu’en 2010, la France était à un point haut et qu'il y avait plus de chances que la fécondité baisse que l'inverse. On peut considérer que nous nous sommes reposés sur nos lauriers à ce sujet. 

En dépit de ces informations, le nombre d’enfants souhaité par les Français ne chute pas. Selon l’Union nationale des associations familiales (Unaf). « Le nombre idéal personnel d’enfants des Français est de 2,39 au même niveau que dix ans auparavant ». Ou est-ce que ce problème bloque si l’envie d’avoir des enfants est toujours aussi forte ?

Premièrement, cela est lié au décalage de la première maternité. À partir du moment où vous faites un premier enfant plus tard, cela va limiter votre période de fécondité. Et si peut-être dans un projet de vie on souhaitera avoir 3 enfants, il n’y en aura certainement que 2. 

Et deuxièmement, il y a aussi des femmes qui ne vont pas arriver au nombre d'enfants qu'elles auraient espéré. En sondant les personnes, elles indiquent souhaiter avoir tant d'enfants, mais dans la réalité, ce n'est pas le cas. Quand vous prenez une jeune fille de 18 ans qui vous dit « moi, j'aurai 3 enfants », elle ne se rend pas bien compte de ce que cela signifie. Il y a un gros décalage entre le désir d'enfants affiché et la réalité.

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Dans quelles mesures les contraintes économiques expliquent-elles aussi la situation ?

Ce n’est pas tant l'augmentation ou la diminution du coût de la vie qui freine les gens, que la considération que l'on apporte à la maternité. C’est à dire qu'à partir du moment où la maternité est d'abord perçue comme une contrainte économique, mécaniquement la natalité s'adapte à ces contraintes économiques. Mais si la maternité est plus liée à une volonté de transmission de l’espèce etc…, la situation serait différente. Les gens feraient des enfants d'abord parce qu'ils en ont envie car c'est un moyen de se réaliser personnellement. À ce niveau, c’est réellement une question de perception. 

Plus largement que faut-il faire pour sortir de cette situation ?

Lorsque vous êtes un pays qui est surpeuplé tel que la Chine et plus globalement toute l’Asie orientale, ce n’est pas un problème parce que comme vous avez beaucoup trop d'habitants, le fait d’avoir moins de naissances va diminuer la population. C'est plutôt même positif. Ce qui est plus problématique, c'est quand vous avez une baisse de natalité qui s'inscrit sur des décennies. Avec un indice de fécondité inférieur au seuil de remplacement des générations sur un demi-siècle comme en Allemagne, vous allez arriver à un moment où vous avez une baisse de population. Mais ce n'est plus uniquement qu'une baisse de population. Toute la puissance du pays en revient même à être mise en cause. Il n'y a plus suffisamment de main-d'œuvre, etc… Un peuple économiquement moins puissant peut alors être en recul l'échelle internationale.

Pour la France, il faut bien se rendre compte que cette baisse n’est pas du tout inquiétante. Elle le serait si on constatait que cela perdurerait depuis trois à quatre ans. Dans ces conditions-là, on pourrait commencer à se poser sérieusement des questions pour l'avenir du pays.

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