Au secours Raymond Aron, Jean-François Revel, des journalistes, en plein Paris, sont devenus fous<!-- --> | Atlantico.fr
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Eric Zemmour au coeur de la polémique
Eric Zemmour au coeur de la polémique
©Reuters

Pression confrériale

Eric Zemmour se trouve, ces derniers jours, très attaqué par ses confrères. Visiblement, il s’en moque, lui qui, sûr de lui, donne son avis sur tous les sujets. Il a fait école. Il suffit d’écouter et voir les Aymeric Caron, Natacha Polony et autres Lea Salamé ou Jean-Michel Aphatie.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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Que d’injures, d’insultes, proférées contre Eric Zemmour ! Jusqu’à ces confrères et quelques élus comme Bruno Le Roux, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale qui demandent que les rédactions boycottent le journaliste ! On se frotte les yeux pour le croire. Ainsi donc, ressurgit une mesure de triste mémoire, que l’on croyait oubliée : l’interdiction professionnelle. Et après, on nous rabâchera les oreilles avec la liberté d’informer ? Alors, Zemmour a –t-il dépassé la ligne jaune en recommandant, dans le Corriere della Sera du 30 octobre dernier, la déportation des Musulmans ? En réalité, c’est le journaliste italien, auteur de l’interview, qui a traduit le verbe deportare par celui de déporter à la connotation terrible. Il aurait dû traduire par partir vers, quitter, se déplacer en direction de… ou quelque chose d’équivalent… Zemmour a -t-il dépassé, dans son dernier ouvrage, "Le suicide français", la ligne jaune en affirmant, sans prendre la moindre précaution, que le maréchal Pétain n’a pas si maltraité que cela les Juifs pendant l’Occupation ? La réponse est tellement évidente qu’il suffit de répondre par quelques questions : qui a promulgué les lois antisémites interdisant les Juifs à exercer telle ou telle profession ? Qui a donné ordre de déporter les 75 000 Juifs de France, si ce n’est le régime de Vichy ?

Pour le reste, les écrits d 'Eric Zemmour se situent dans l’air du temps : celle d’une France frileuse, fracturée, angoissée, recroquevillée sur elle-même qui, par certains côtés, rappelle la France des années 30. Il est clair que Zemmour agace, énerve une partie de la France – celle des bobos- et qu’il en enthousiasme et séduit une autre, celle des gens un tantinet réactionnaires et surtout hostiles à François Hollande. Zemmour s’est fait surtout connaître avec Christophe Barbier (L’Express) puis Nicolas Domenach (Marianne) dans l’émission "Ca se dispute" sur I-Télé et surtout dans celle de Ruquier "On n’est pas couché". Il y a montré des réelles qualités de débatteur, éprouvant toujours un plaisir évident à contredire son interlocuteur… Mais au fil des ans, on a vu l’ancien journaliste au Quotidien de Paris, puis à Info-Matin et au Figaro, qui ne dit jamais avoir travaillé à L’Express à l’époque où Christine Ockrent dirigeait l’hebdomadaire- devenir de plus en plus sûr de lui, avec ce sourire ironique qui semble dire à son interlocuteur "Vous n’avez rien compris", bref se muer en une sorte de Torquemada du petit écran.

N’est pas Raymond Aron ou Jean-François Revel qui veut… Bien sûr, Zemmour rétorquera ne pas avoir cette prétention. Tout de même, ce n’est pas parce que l’on passe à la télé, comme on dit, que l’on est capable de parler de tout. De la guerre en Irak, de la politique économique d’Angela Merkel, de la situation à Cuba ou en Chine, du réchauffement climatique, des minorités de la Roumanie, du conflit israélo-palestinien, de la dernière pièce de théâtre de Florian Zeller et de Zinedine Zidane. Au fond, Eric Zemmour est devenue la victime d’un système de l’immédiateté qui jette par-dessus bord toute réflexion un peu sérieuse.

Evidemment, son dernier livre lui donne une tribune encore plus grande. Désormais, il fait le show. Il suffit de voir l’accueil qu’il a récemment reçu à Béziers ville dirigée par Robert Ménard. Il s’est mué, à son corps défendant, en une bête de cirque. Une sorte de saltimbanque de l’information. Aujourd’hui, Eric Zemmour est prisonnier d’un personnage dont il aura du mal à se défaire. Il n’est pas le seul… Regardez ses confrères qui viennent chez Ruquier le samedi soir à partir de 23 heures, et que vous pouvez voir… à condition que vous ne soyez pas couché. On y voit le végétarien-journaliste Aymeric Caron. Il sait tout. Il tire au bazooka sur toute personne qui n’est pas de son avis. C’est finalement assez pénible. Encore que le lendemain de l’émission on ne se souvient plus de ce qu’il a dit. On y a vu aussi Natacha Polony, journaliste longtemps spécialisée dans l’éducation qui croit qu’elle peut désormais avoir un avis définitif sur tous les sujets. L’autre lundi, je l’ai aperçue vers 15 heures sortir du café situé juste à côté de la Comédie-Française. Elle regardait autour d’elle afin de voir si …on la regardait. Eh bien non… Personne. Quant à la nouvelle venue chez Ruquier, Léa Salamé, journaliste-vedette sur I-Télé où elle bien réussi, elle minaude de sa voix acidulée et de son sourire enjôleur, montre ses belles dents blanches, et plait beaucoup au public. Jusqu’à quand ? Un cinquième confrère les rejoint dans les certitudes : Jean-Michel Aphatie, l’interviewer vedette de RTL que l’on peut voir chaque soir lors du Grand Journal de Canal + d’Antoine de Caunes… Nous l’avons côtoyé lorsqu’il était à L’Express il y a quelques années. Déjà perçait un côté grande gueule… Mais sympathique. Puis ce fut le départ pour Le Monde, France-Inter, RTL et Canal +… Des centaines de milliers de personnes l’écoutent chaque jour. Même si ses questions sont sentencieuses, parfois agressives. Eh oui, cher Jean-Michel, votre notoriété vous a fait, un peu, déraper. Rappelez-vous comment, lors de l’affaire Cahuzac, vous sommiez Plenel, le directeur de Mediapart, de fournir des preuves sur la réalité du compte suisse détenu par l’ancien ministre du Budget de François Hollande. Vous pensiez qu’il s’était planté !

Puissent ces cinq-là, grisés par la télévision, comprendre que le téléspectateur ou l’auditeur, un jour ou l’autre, les vouera aux gémonies, se lassera de voir leurs binettes et de les entendre égrener leurs certitudes. Peut-être alors se rendront-ils compte, qu’ils étaient devenus, sans le savoir, les Trissotin du journalisme… Oui, la télé rend fou… La radio, un peu moins. Les temps changent. Aujourd’hui, le journaliste doit être une vedette… Il se croit, parfois inconsciemment, investi d’une mission alors qu’il ne doit être qu’un vulgarisateur. Il ne doit jamais oublier que sans le journal qui l’emploie, il n’est rien. Dire qu’à la création de L’Express par Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroud, le 16 mai 1953, les journalistes ne signaient pas leurs papiers ! Mais nous étions dans la préhistoire…

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