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Après New York, l'Allemagne : Marine Le Pen est-elle maudite dans son tour du monde des populistes ?
©Reuters

Mauvaise passe

La présidente du Front national se déplace en Allemagne ce samedi mais ne rencontrera pas les dirigeants de l'AfD qui contestent sa ligne.

Jean-Yves Camus

Jean-Yves Camus

Chercheur associé à l'Iris, Jean-Yves Camus est un spécialiste reconnu des questions liées aux nationalismes européens et de l'extrême-droite. Il est directeur de l'Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès et senior fellow au Centre for the Analysis of the Radical Right (CARR)

Il a notamment co-publié Les droites extrêmes en Europe (2015, éditions du Seuil).

 

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Marine Le Pen se rend samedi 21 janvier en Allemagne à Coblence pour le Sommet l'Europe des Nations et des Libertés. En marge de ce déplacement s'est posée la question d'une rencontre avec les dirigeants de l'AfD, le parti de droite populiste allemand. Mais Frauke Petry, figure du parti a déclaré quelques jours après l'annonce de ce déplacement "je trouve que le FN ne nous correspond pas du tout. Le FN est en fait un parti socialiste. Moi personnellement, j'ai des réserves". Après avoir été éconduit -comme il le semble- par Donald Trump et son équipe, la tournée des "populistes" est-elle en train de tourner court pour Marine Le Pen ?

A ma connaissance, c'est le dirigeant de la branche berlinoise du parti, Georg Pazderski, qui a critiqué la tenue de cette rencontre en qualifiant  le FN de "socialiste". Il s'agit d'une manifestation de refus venant de la fraction nationale-libérale qui était à l'origine de la création de AfD et qui, effectivement, avait d'autant moins l'intention de s'allier au FN qu'outre-Rhin, pour des raisons historiques évidentes, les polémiques partent vite sitôt que les origines historiques du FN viennent sur le tapis. Mais le tandem Frauke Petry/Markus Pretzell est favorable à ce rapprochement, précédé en juin dernier par un accord entre Afd et le FPÖ, ainsi que par le passage de Pretzell au sein du groupe parlementaire présidé par MLP au Parlement européen. Si les personnalités annoncées sont effectivement présentes à Coblence, on ne pourra pas parler d'échec. Par contre, aucun rapprochement n'a été opéré avec UKIP et les populistes scandinaves de droite restent en-dehors du jeu. Le cas américain est très simple, au fond : Donald Trump a été élu pour "rendre l'Amérique forte" et "assécher le marigot" de la classe politique. Pour ramener des emplois industriels et construire le mur avec le Mexique. Pas pour faire la courte échelle à des partis politiques européens, quels qu'ils soient. Le nouveau Président aura à rencontrer, dans les mois qui viennent, ses homologues européens lors des grands sommets. Il n'est déjà pas évident que l'ambience soit bonne, il est inutile de son, point de vue, d'ajouter un motif de discorde en soutenant des partis dont la victoire reste incertaine.

Vous avez publié un ouvrage sur les droites extrêmes en Europe. Quels ont été les liens entre le Front national et les partis équivalents en Allemagne ? Quel rapport le FN entretient-il habituellement avec le pays ?

Dès les années 80 le FN de Jean-Marie Le Pen a construit des liens avec une petite formation nationale-conservatrice, Die Republikaner, dont le dirigeant Franz Schonhuber avait été, pendant la guerre, un des instructeurs des volontaires français de la Waffen SS, avant de devenir un présentateur vedette de la télévision bavaroise. Mais le succès des "reps" a fait long feu: de 6 élus européens en 1989, il est passé à zéro en 1994. Dès 1990, miné par des dissentions internes,plusieurs élus des Republikaner s'éloignaient du Groupe technique des droites européennes, formé autour de Le Pen. comme sa fille celui-ci n'a jamais voulu entendre parler de la moindre alliance avec le NPD allemand, trop imprégné de néo-nazisme. C'est le petit Parti Nationaliste Français qui aujourd'hui travaille avec le NPD au sein d'une structure pan-européenne appelée Alliance Pour la paix et la liberté (APF)qui comprend aussi l'Aube dorée grecque. Le FN ne cesse de tonner contre l'hégémonie allemande au sein de l'UE et la politique migratoire de la chancelière Merkel. Mais au-delà des convergences tactiques qui peuvent exister avec AfD, il n'existe guère, à ma connaissance, de bon spécialiste de l'Allemagne au FN, en tout cas depuis le départ d'Aymeric Chauprade.

Au final comment comprenez-vous ces déplacements de Marine Le Pen, et plus généralement ce soutien énergique en faveurs des mouvements dits "populistes" en Occident ?

Il s'agit tout simplement de montrer que le FN, qui reste isolé en France par une sorte de cordon sanitaire, n'est pas sans alliés à l'étranger. Que sa présidente travaille avec des partis qui peuvent, comme le FPÖ ou la Lega nord, être centraux dans le jeu politique de leurs pays, qui gèrent des régions et des villes, siègent parfois au gouvernement. Il s aussi d'"établir l 'Alliance Européenne pour la Liberté comme un grand parti transnational, à l'instar du PPE, de ALDE et du PSE. En somme, de bien montrer que ce n'est plus la droite libérale-conservatrice qui est hégémonique en Europe, les nationaux-populistes étant plus dynamiques.

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