Alerte à la sécurité défaillante des laboratoires de recherche biologique à travers le monde ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Photographie prise à l'intérieur du laboratoire P4 à Wuhan, capitale de la province chinoise du Hubei, le 23 février 2017.
Photographie prise à l'intérieur du laboratoire P4 à Wuhan, capitale de la province chinoise du Hubei, le 23 février 2017.
©JOHANNES EISELE / AFP

Epidémies

L'hypothèse de la fuite du SARS-CoV-2 d'un laboratoire chinois a ravivé le débat autour des mesures de sécurité encadrant les centres de recherche les plus sensibles à travers le monde.

Etienne Decroly

Etienne Decroly

Etienne Decroly est virologue spécialiste du VIH. Directeur de recherche au CNRS dans le laboratoire Architecture et Fonction des Macromolécules Biologiques (AFMB) de l’Université d’Aix-Marseille. 

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Atlantico : Comment se produit concrètement un accident de laboratoire ?

Etienne Decroly : Il est important de rappeler qu’un accident de laboratoire ne signifie pas que le virus a été transformé ou génétiquement modifiée. Le plus souvent, on travaille sur des virus totalement naturels. Quand on essaye de répertorier des nouveaux virus on voit que les causes possibles sont multiples lors de la collecte ou de la mise en cultures des virus par exemple. Certains accidents n’ont pas directement lieu en laboratoire mais sont liés à des déchets qui ont été incomplètement désactivées, comme des eaux usées ou l’air qui est extrait dans des condition de sécuritées varable en fonction du type de laboratoire (BSL2, BSL3 ou BSL4). Normalement tous les extrants sont censés être stérilisés avant leur sortie de laboratoire BSL3 ou BSL4 mais parfois il y a des erreurs humaines. Cela peut donner lieu à des contaminations en aval autour des instituts de recherche. Dans d’autres cas, comme pour les accidents liés aux expériences sur le SARS-Cov-1, c’est le personnel qui a été contaminé lors d’expériences réalisées sur les virus. Il est très délicat de travailler sur les virus respiratoires comme les coronavirus, en particulier dans les expériences sur des modèles animaux, car les contaminations par aérosols sont possibles si l’on n’est pas dans des conditions de sécurité type BSL 4 (également appelés P4). Il y a donc différentes voies potentielles et les risques dépendent de la nature de virus, du type d’expériences conduites, et il es essentiel d’adapté les mesures de confinement et de biosécurités en fonction du degrés de risque.

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Les virus respiratoires comme les coronavirus sont-ils plus à risque de créer des fuites ?

La grosse difficulté avec les virus respiratoires c’est que les expériences sur animaux comportent des risques intrinsèques, liés aux contaminations potentielles par aérosol, qui sont assez élevés. En BSL 3, lorsqu’on travaille sur des cellules, l’expérimentateur travaille sous une hotte à flux laminaire qui le protège très efficacement des contaminations. Mais lorsqu’on travaille sur des animaux, une fois infectés, ils peuvent excrèter des virus sous forme d’aérosols. La protection est notamment assuré par de masques FFP2 mais elle peut être imparfaite si les masque sont mal utilisées. C’est pour cela qu’il y a des niveaux de sécurité supplémentaires. En BSL 4, les expérimentateurs utilisent des scaphandres pour mieux s’affranchir de ces risques.

Il y a donc différents niveaux de sécurité pour les laboratoires. Est-ce que ces fuites de laboratoires révèlent des dispositifs qui ne seraient pas assez sécurisés ?

Chaque niveau de sécurité, classé de BSL 1 à 4 comporte un niveau croissant de mesures de sécurité qui protègent chaque fois d’avantage l’expérimentateur avec notamment des procédures de décontaminations qui vont être de plus en plus rigoureuses. La question n’est pas de savoir si certains laboratoires sont moins ou pas assez sécurisés mais de savoir quelles sont les indications que l’on définit pour travailler sur tel ou tel type de virus ainsi que le type de manipulations effectuées, comme je vous l’ai expliqué plus haut. Si j’expérimente au niveau cellulaire plutôt que sur des animaux ou sur un virus qui ne peut pas se transmettre à l’homme, alors un niveau de sécurité moins important peut suffire. On présente beaucoup dans les hypothèses d’accidents de laboratoire la responsabilité des BSL 4, mais les virus qui étaient échantillonnés dans la faune sauvage étaient travaillés dans des laboratoires de sécurité moindre, notamment les BSL 2. La plupart des expériences publiées étaient en BSL 2 ou 3. Il faut donc s’interroger sur le type niveaux de confinement requis en fonction de la nature des expériences réalisées et évaluer l’équation risque/bénéfice des expériences au regard de leur potentiel risque pandémique. On sait aujourd’hui que des virus comme les coronavirus on des risque pandémique avérés, il est donc nécessaire d’adapter les mesures de confinement au niveau international concernant certains virus.

Propos recueillis par Guilhem Dedoyard 

Retrouvez la première partie de cet entretien : Le Covid échappé d’un laboratoire de Wuhan ? Petit historique des précédents en matière de fuite de virus

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