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Affaire Bygmalion : après l’explosion sur le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, quoi d’autre ?
©Reuters

Effet domino

Le tsunami Bygmalion, qui a déjà contraint Jean-François Copé à démissionner, pourrait continuer à balayer certains de ses proches, à l'instar de l'Association nationale pour la démocratie locale (ANDL), structure destinée à former les élus UMP.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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Jusqu’où ira le séisme Bygmalion ? Après Jean-François Copé contraint, mardi 27 mai, d’abandonner son poste de président de l’UMP à la suite d’un bureau politique houleux, un autre front s’ouvre qui pourrait conduire les limiers de l’Office de lutte contre la corruption de la direction centrale de la police judiciaire à s’intéresser à  l’Association nationale pour la démocratie locale (ANDL), structure destinée à former les élus UMP. Témoin, la perquisition conduite, ce mardi 27 mai au siège de cette association qui  pourrait avoir entretenu des liens avec Bygmalion

Fondée en 1983, l’ANDL  est présidée depuis 2011 par une très proche de Copé, Michèle Tabarot, député-maire du Cannet (Alpes-Maritimes) que nous avons tenté de joindre en vain. C’est le maire de Meaux qui avait poussé l’élue à briguer – sous Nicolas Sarkozy - la présidence de la Commission des affaires culturelles de l’ Assemblée nationale et promu Michèle Tabarot au poste de secrétaire générale de l’UMP.  Tabarot-Jérôme Lavrilleux, directeur de cabinet de Copé : deux intimes qui connaissent les grands et petits secrets du maire de Meaux. 

Aujourd’hui, selon Me Patrick Maisonneuve, des fausses factures  (d’un montant de 11 millions d’euros) auraient concouru au financement de la campagne présidentielle du candidat Nicolas Sarkozy. Le Point, pour sa part, estime que Bygmalion, dirigée donc par Bastien Millot et Guy Alvès aurait reçu 23,5 millions  d’euros de l’UMP… Une partie d’entre elles pourrait-elle concerner  l’Association nationale pour la démocratie locale ?  Bastien Millot se montre formel : « Bygmalion n’a jamais facturé un euro à l’ANDL ». Justement, qui règle ces formations ? Les mairies, communautés urbaines, conseils généraux et régionaux... "Le financement de la formation des élus constitue une dépense obligatoire pour les collectivités territoriales et par conséquent une obligation pour ces dernières. S'agissant, d'une dépense obligatoire, le préfet serait donc en droit d'inscrire d'office au budget de la collectivité les crédits nécessaires à l'exercice de ce droit, au cas où le budget ne les aurait pas prévus", écrivait l'ADNL dans ses statuts.Il n’empêche. Les enquêteurs qui ont saisi le 27 mai  différents documents, pièces comptables, factures, dépenses de l’Association veulent en avoir le cœur net. Une chose est sûre : la formation des élus – ils sont 560 000 en France - constitue une manne ahurissante qui permet toutes les dérives

Combien de députés, de maires, ou de simples conseillers municipaux ont participé à des séminaires ici, sur la sécurité, là sur les finances communales qui n’étaient en réalité que des prétextes pour gueuletonner dans de restaurants de qualité ! La formation, -plusieurs dizaines de millions d’euros- objet de toutes les dérives, est un sujet tabou en France. Alors qu’elle est financée par l’argent public.

Aussi n’est-il pas exclu que l’enquête préliminaire sur  l’affaire Bygmalion débouche non seulement sur une information judiciaire pour détournement  de fonds publics mais aussi pour abus de confiance. Ce dernier volet étant celui des conventions imaginaires – il y en aurait 55- passées entre Bygmalion et par exemple Pierre Lellouche, député UMP de Paris, furieux de s’être vu attribué une prestation  de 299 000 euros – qui n’a jamais eu lieu - devrait lui déboucher sur une information pour abus de confiance. D’autres conventions de ce style  auraient été identifiées.

Très prochainement, à moins d’une surprise, le Parquet de Paris devrait ouvrir une information judiciaire qui, en toute logique, devrait être confiée au juge Renaud Van Ruymbeke. Pour une raison simple : c’est lui qui est déjà chargé d’instruire, depuis juin 2013, les contrats passés entre France Télévisions, à l’époque où  Patrick de Carolis en était le président, et Bygmalion. Or, Van Ruymbeke aurait trouvé, selon Le Point, sur le compte bancaire de l’ancien journaliste, trace de deux versements datant de 2011 – en tout 120 000 euros - en provenance de Bygmalion. Ce que Carolis dément en annonçant son intention de porter plainte contre l’hebdomadaire…

Ce soupçon d’enrichissement personnel ne concerne pas qu’une personne. Loin s’en faut. Aussi, n’est-il pas exclu qu’un jour où l’autre, la toute nouvelle  Haute Autorité pour la transparence de la vie publique présidée par l’ancien procureur général près la Cour de Cassation, Jean-Louis Nadal, un proche de Martine Aubry s’intéresse à la déclaration de  patrimoine de quelques parlementaires. Certes on n’en n’est pas encore là. La justice a tout son temps. Déjà, le directeur de cabinet de Copé, Jérôme Lavrilleux, effondré, lors de son interview à BFM-TV, s’est mis à table en dédouanant Copé et Sarkozy. Un jour ou l’autre, si la PJ  entend Lavrilleux, il en dira un peu plus…

Reste une question capitale pour la suite : Jean-François Copé était-il au courant de toutes ces gymnastiques opérées par Bygmalion ? Ses amis  de l’UMP affirment que non. Ces ennemis que oui.  Il est vrai que Copé et Millot se connaissent depuis 1991. Mais surtout, Millot, depuis peu reconverti comme avocat au barreau de Marseille, est son plus proche collaborateur depuis cette date. Successivement comme directeur de cabinet à la mairie de Meaux, puis au secrétariat d'Etat au Budget, sous Jean-Pierre Raffarin, et enfin son directeur de campagne lors des élections régionales de 2004…

Une chose est certaine : depuis les révélations  du Point en février 2014, la stratégie de Jean-François Copé a considérablement évolué. Laissant entendre qu’il aurait pu être abusé. Pourtant, L’Express vient de publier le fac- simile d’une facture, signée de Copé, de 878 000 euros adressée le 1 er février 2012, par l’UMP à la société E-Makina, chargée de la stratégie numérique du candidat Sarkozy. Et dirigée par Manuel Diaz, un jeune self made man chargé de la stratégie  numérique comme Coca-Cola, Orange, la BNP ou Total. On remarquera néanmoins que dans le contrat avec E-Makina, le nom de  Bygmalion n’apparait pas… Et que Copé, en tant que numéro 1 du parti, a dû signer de nombreux chèques. Mieux vaut donc ne pas s'emballer sur chaque nouvelle pièce qui apparait, alors que des milliers de factures ont sûrement été saisies.

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