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11 septembre 2001 : 
honneur suprême d'Al-Qaïda
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Violence et propagande

A l'approche du 10e anniversaire des attentats du 11 septembre, François-Bernard Huyghe décrypte les méthodes, les modes d'action et les discours des membres du Jihad dans un livre "Le terrorisme : Violence et propagande". Extraits (1/2).

François-Bernard Huyghe

François-Bernard Huyghe

François-Bernard Huyghe, docteur d’État, hdr., est directeur de recherche à l’IRIS, spécialisé dans la communication, la cyberstratégie et l’intelligence économique, derniers livres : « L’art de la guerre idéologique » (le Cerf 2021) et  « Fake news Manip, infox et infodémie en 2021 » (VA éditeurs 2020).

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Au-delà de l’islamisme, qui est une volonté de soumettre les pouvoirs politiques à la loi coranique, le jihadisme développe une théologie délirante de la violence mimétique et de la légitime défense. Ses partisans interprètent à leur façon la prescription de la «guerre sainte», à rebours du sens noble du mot jihad («effort spirituel»), et prétendent qu’ils ne font que défendre la terre d’Islam contre des envahisseurs. Tout territoire rattaché au califat avant 1254, date de la prise de Bagdad par les Mongols, serait à reconquérir sur l’agresseur, juif et croisé. Leur champ de bataille couvre tout pays où des musulmans seraient opprimés, puis s’étend au cœur du dispositif ennemi (les États-Unis). Donc de fait à la terre entière. Le jihadisme est à la fois enraciné – il se réfère à la terre d’Islam et s’allie à des insurrections locales comme en Afghanistan – et mondialisé ; il trouve partout des cibles et des symboles de la persécution.

Le recours aux bombes et aux kamikazes naît dans le camp chiite, puis devient une manifestation monstrueuse du sunnisme salafiste le plus dur. Ce mouvement remonte aux Frères musulmans, de Hassan al-Banna, créés en 1928 et aux textes de Sayyid Qotb pendu en 1966 sous Nasser. Il monte en puissance dans les années 1980-1990, lors des luttes en Afghanistan, Bosnie, Tchétchénie, etc., avec des brigades internationales de moudjahidin. Les noms sont éloquents : «Communauté islamique» (Jeemah Islamiya indonésienne), Jamaa Islamiya égyptienne ou son concurrent Talaëh al-Fatah (Avant-garde de la conquête), Armée islamique du salut algérienne (origine du Groupe islamiste armé [GIA]), puis du Groupe salafiste de prédication et de combat, devenu finalement Organisation Al-Qaïda pour le pays du Maghreb islamique ([AQMI] par allégeance à l’«émir» ben Laden), Groupe islamiste combattant marocain…

La «résistance islamique globale» théorisée par al-Suri, la «lutte contre l’ennemi lointain» d’al-Zawahiri, et la rhétorique de Ben Laden, forment la ligne doctrinale du réseau qui a fini par s’appeler Al-Qaïda («la base»). Ce nom fut pourtant choisi par un juge new-yorkais qui voulait désigner les responsables des attaques au camion piégé en 1993 contre le World Trade Center. L’apparente cohérence d’Al-Qaïda en principe divisée en cinq «émirats», recouvre de fait des groupes locaux plus ou moins «franchisés», ou réunis sous la désignation vague de «proche d’Al-Qaïda», du groupuscule aux quasi-armées de talibans.

Al-Qaïda, après le 11 septembre 2001, accède à l’honneur suprême : être nommée ennemi principal de l’hyperpuissance américaine pour une «guerre globale au terrorisme», qui suscite de «vraies guerres» en Afghanistan comme en Irak.

Très significativement, en 2009, l’administration Obama hésite entre une stratégie de «contre-terrorisme» en Afghanistan, préconisée par le vice-président Biden, et la «contre-insurrection» chère au général Petraeus. Les États-Unis choisissent la seconde, ce qui implique l’envoi d’environ cinquante mille nouveaux soldats sur place, tout en rebaptisant la guerre au terrorisme «lutte contre l’extrémisme violent».

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Extraits de Le terrorisme : Violence et propagande, Éditions Gallimard (août 2011)

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