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11 nouvelles métropoles en France : une bonne idée qui risque d’être affaiblie par les contextes politiques locaux
©DR

L'enfer est pavé de bonnes intentions

A compter de ce 1er janvier 2015, 11 villes françaises accèdent au statut de métropole. Une réforme qui répond à une réelle nécessité, mais qui dans les conditions actuelles n'est pas totalement satisfaisante.

Atlantico : A partir du 1er janvier 2015, 11 villes françaises accèderont au statut de métropole. Ce statut va-t-il permettre d'améliorer la gestion des territoires en question ? 

Laurent Chalard : En théorie, la réponse est positive, étant donné la situation actuelle de fragmentation institutionnelle des grandes agglomérations françaises, produite de l’héritage d’un morcellement communal très important (la France n’a jamais réussi à fusionner globalement ses communes, contrairement à ses pays voisins) et d’intercommunalités aux périmètres restreints et aux compétences relativement limitées par rapport aux enjeux d’aménagement. A l’heure actuelle, nos grandes métropoles se caractérisent par l’absence de "pilote dans l’avion" à l’origine de nombreux problèmes de gestion de leur développement (par exemple, un étalement urbain mal maîtrisé) et de leur fonctionnement (par exemple, les transports).

Le nouveau statut permet d’avoir des territoires plus grands (par l’intermédiaire de la fusion des intercommunalités existantes dans certains cas), plus proches de l’échelle des enjeux métropolitains (le territoire parfait n’existe pas, d’autant plus que les métropoles ont tendance à étendre leur aire d’influence au fur-et-à-mesure du temps), et surtout un niveau de compétences beaucoup plus important, permettant d’agir à une échelle globale, grâce aux transferts de compétences, essentiellement dans des domaines relevant de l’aménagement du territoire, venant de la région  et du département, ce qui permet aussi de réduire le nombre d’acteurs politiques. Désormais, en-dehors des communes, seule la métropole agira au sein de son territoire, ce qui limitera les « guéguerres » politiques entre les différents échelons administratifs (comme les conflits récurrents entre les présidentes des conseils généraux et les maires des villes-centre des métropoles), qui ont tendance à brider leur développement.

Ce statut peut-il permettre de réduire les disparités existantes dans les communes d'un même territoire ? 

Etant donné son plus grand niveau de compétences, il devrait permettre de mener des politiques visant à réduire les inégalités territoriales, particulièrement sensibles dans nos grandes métropoles, avec des territoires riches et d’autres qui le sont beaucoup moins. Cependant, il ne faut pas s’attendre à des miracles, dans le sens que, pour l’instant, l’échelon communal perdure et que le pouvoir d’urbanisme, à travers la délivrance des permis de construire, sauf cas particulier (comme les OIN), demeure du ressort des maires. Or, c’est l’élément indispensable si l’on veut réellement faire évoluer fortement les choses, en particulier concernant la résorption des inégalités socio-spatiales. Les maires conservent donc d’une certaine manière un droit de veto sur les projets de la métropole concernant leur commune qui ne leur conviendrait pas.

Les conditions en matière de transferts de compétences et le contexte politique local sont-ils propices ? 

Concernant le transfert de compétences, les conditions sont plutôt propices puisque la loi sur les métropoles s’inscrit plus globalement dans un projet de réforme territoriale, qui a conduit à la réduction du nombre des régions et au renforcement de leurs compétences. Il paraît donc opportun d’effectuer ces transferts au même moment.

A contrario, le contexte local n’est pas du tout propice à la réussite de cette politique. En effet, depuis les élections municipales de 2014, qui ont vu la droite largement l’emporter, de nombreuses métropoles se retrouvent dominées potentiellement par des communes de banlieues de droite, qui sont, en règle générale, réticentes à l’intercommunalité, alors que les communes de gauche, désormais minoritaires, ont peur de perdre le pouvoir dans des structures dominées par la droite et vont donc tout faire pour que les transferts de compétences se fassent a minima. Pour résumer, personne n’a intérêt à ce que cela fonctionne !

Quelles leçons peut-on tirer de l'exemple de Nice qui obtenu ce statut en janvier 2012 ? 

Cela fait à peine trois ans que la métropole Nice Côté d’Azur existe. Il est donc encore trop tôt pour en tirer un quelconque bilan, tout du moins, au niveau des actions, puisqu’il faut au moins une dizaine d’années, voire plus, pour mesurer l’efficacité ou non d’un nouvel échelon administratif, étant donné la longueur de maturation des projets.

Concernant le nouveau statut, il semblerait que les acteurs locaux en soient plutôt satisfaits, mettant en avant le fait qu’il permet d’exister et de voir plus grand (le maire de Nice se félicitait récemment de l’obtention d’un prêt de la BEI). Cependant, il convient de rappeler que le périmètre de la métropole Nice Côte d’Azur n’est pas du tout pertinent, ne comprenant qu’une partie de la métropole (au sens géographique) azuréenne (il n’y a pas le technopôle de Sophia-Antipolis par exemple) et incluant des communes très rurales. Son découpage paraît politique, en l’occurrence le regroupement des communes dominées par le "baron local" qu’est Christian Estrosi, plus qu’autre chose. Seule une métropole allant de Théoule-sur-Mer à Menton serait pertinente, mais elle remettrait en cause l’existence même du département des Alpes-Maritimes, dont elle regrouperait plus de 90 % de la population et de l’activité économique !

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