Jean-Marie Le Pen candidat aux européennes à 84 ans : à quel âge doit-on arrêter la politique ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Trop vieux ? La moyenne d’âge de la nouvelle Assemblée nationale est de 54,6 ans.
Trop vieux ? La moyenne d’âge de la nouvelle Assemblée nationale est de 54,6 ans.
©Capture d'écran

Date de péremption

Jean-Marie Le Pen a annoncé dans une interview au Point qu'il se verrait bien de nouveau candidat aux européennes de 2014. L'ancien président du Front national est pourtant âgé de 84 ans...

Anne Muxel

Anne Muxel

Anne Muxel est docteure en sociologie et directrice de recherches en science politique au CEVIPOF.

Elle fait partie du comité de rédaction de la Revue française de sociologie.

Elle est l'auteur de plusieurs livres sur le rapport entre les jeunes et la politique : La politique au fil de l'âge, Paris, Presses de Sciences Po, 2011
Avoir 20 ans en politique. Les enfants du désenchantement, Paris, Seuil, 2010
Toi, moi et la politique. Amour et convictions, Paris, Seuil, 2008

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Atlantico : L'ancien président du Front national, 84 ans, qui fête les quarante ans de son mouvement, a annoncé  dans une interview au Point qu'il se verrait bien de nouveau candidat aux européennes de 2014. Ne devrait-il pas y avoir un âge limite pour arrêter la politique ?

Anne Muxel : Cette annonce de Jean-Marie Le Pen est d'ailleurs assez surprenante dans la mesure où il a passé la main à sa fille et s'est placé lui même dans une situation de transmission du leadership au Front national.

En Afrique, il y a une sorte d'habitude de rester très tardivement en politique chez les dictateurs qui ont beaucoup de mal à laisser le pouvoir. Pour autant, en France, fixer des bornes en matière d'âge me paraît difficile. Mieux vaut faire appel à la raison, même si à l'autre bout de l'échelle des âges, il est vrai qu'il y a des limites : il existe un âge d’éligibilité et un âge à partir duquel on peut voter...

La moyenne d’âge de la nouvelle Assemblée nationale est de 54,6 ans et devrait approcher les 60 ans en fin de législature. De manière générale, nos élus ne sont-ils pas trop vieux ?

En tout cas, comparé aux autres pays européens, notre classe politique est beaucoup plus âgée que la moyenne. Dans la dernière Assemblée nationale, 6% des députés ont plus de 70 ans. Dans les autres pays, c'est quelque chose qui n'existe pas.

Par ailleurs, les hommes politiques restent en place assez longtemps, les mandats sont répétés. En France, un député fait en moyenne trois mandats. Cela fait au minimum une quinzaine d'année de vie politique. A l'inverse, les jeunes ont des difficultés à entrer sur la scène politique et à y occuper des fonctions. Le cumul des mandats est aussi un obstacle au renouvellement de la classe politique.

Peut-on parler de coupures générationnelle entre les dirigeants et les électeurs ?

Il y a de la part des électeurs et des citoyens, un désir de renouvellement de la classe politique. D'ailleurs, les partis commencent à le comprendre. Il y a aussi besoin d'une meilleur représentativité de cette classe politique par rapport à ce qu'est la société française, y compris en terme d'âge.

En France, il y a un vrai problème d'usure de la classe politique, d'usure du pouvoir... C'est un trait dominant de cette crise de représentativité française qui taraude la société. Il y a l'idée que le pouvoir est entre les mains de quelques uns et que le jeu démocratique fonctionne mal. Cela dit, la société française est vieillissante. On ne peut donc pas raisonner uniquement en terme de représentativité.

De très importants dirigeants politiques comme le général de Gaulle ou François Mitterrand ont arrêté la politique à 80 ans passés. Cela a-t-il eu des conséquences sur la fin de leur présidence ?

Le général de Gaulle était une figure emblématique et héroïque de notre Histoire nationale. Il a décidé de se retirer après un échec politique.

Pour, François Mitterrand, la situation était différente. Il était malade et est allé jusqu'au bout de son second mandat  dans de très mauvaises conditions. L'usure du pouvoir a peut-être joué un rôle dans sa "fin de règne" difficile.

En février 2012, le député UMP du Var, Jean-Pierre Giran avait remis un rapport à Nicolas Sarkozy. Parmi ces « 42 propositions pour améliorer le fonctionnement de la démocratie locale », il préconisait «d'interdire la candidature à toute fonction élective après l’âge de 70 ans ». Est-ce une bonne solution ?

Encore une fois, je suis pas forcément favorable à cette idée. Je pense qu'il vaut mieux fixer des limitations au cumul des mandats : encourager le renouvellement plutôt que d'instaurer des limites. le risque serait d'exclure de la scène politique des  personnalités qui auraient beaucoup à apporter par ailleurs.

Mais de la même façon qu'on a insisté sur la parité homme/femme, il faudrait insister sur une forme de parité générationnelle. Il faut permettre à la nouvelle génération d’occuper des postes de responsabilité. Cela ne suppose pas forcément l'exclusion des anciens. 

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

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