Ces parties de la France que les chocs climatiques rendent de moins en moins assurables<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Environnement
Le village de Roquebillière, dans les Alpes-Maritimes, suite au passage de la tempête Alex. 3 octobre 2020.
Le village de Roquebillière, dans les Alpes-Maritimes, suite au passage de la tempête Alex. 3 octobre 2020.
©Nicolas TUCAT/AFP

Catastrophes Naturelles

Inondations, incendies, tempêtes ... Le changement climatique bouleverse et menace directement le monde de l'assurance. Alors que certains experts prévoient une hausse sans précédent des tarifs d'ici 30 ans, les assurances pourraient devenir inabordables voire tout simplement refuser de couvrir certaines zones ou certains types de risques

Thomas Carbonnier

Thomas Carbonnier

Thomas Carbonnier est Avocat, fondateur & coordinateur pédagogique du diplôme Start-up Santé (bac+5) à l'Université Paris Cité. Il est également Président de l'UNPI 95, une association de propriétaires qui intervient dans le Val d'Oise. Il est titulaire du Master 2 droit fiscal, du Master 2 droit financier et du D.E.S. immobilier d’entreprise de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne.

Voir la bio »
Guillaume Séchet

Guillaume Séchet

Guillaume Séchet est un météorologiste. Présentateur météo et prévisionniste à La Chaîne Météo (entre 1996 et 2007), puis à Météo News (entre 2007 et 2009) et depuis 2009 à BFMTV, il est également le créateur et responsable de la société Meteo-Villes qui englobe des sites de météo expertisée pour 19 grandes agglomérations. Il est également l'auteur de 4 ouvrages sur les évènements climatiques (les plus connus étant "Quel temps !" et "Y'a plus de saison").

Voir la bio »
Claude-Florence Chassain

Claude-Florence Chassain

Claude-Florence Chassain est membre qualifiée de l’Institut des Actuaires français où elle siège au Haut-Conseil, elle est également membre de l’Institut des Actuaires britannique (FIA) depuis 2001. Elle dispose d’une expérience de plus de 20 ans dans le secteur de l’assurance, à la fois en audit/conseil pour des acteurs français et internationaux et en compagnie d’assurance, où elle a occupé différentes fonctions dans le domaine de la finance et des risques au Royaume-Uni. Elle est en charge des activités Actuariat de Deloitte en France et de grands clients internationaux. Depuis 2021, elle est également responsable du secteur Assurances pour Deloitte en France et Deloitte Central Europe (DCE).

Voir la bio »

Atlantico : Aux Etats-Unis, la crise climatique semble aussi devenir une crise financière : certains des plus gros acteurs du secteur de l'assurance immobilière ont fait savoir qu'ils ne vendraient plus (en Californie, à tout le moins) de contrat d'assurance pour les propriétaires. En cause ? La gestion des risques devient de plus en plus coûteuse, notamment en cas de feu de forêt et d'incendies. Une telle situation est-elle envisageable en France ? Est-elle seulement possible au regard du droit ? 

Claude-Florence Chassain : Tout d’abord la cause aux US n’est pas vraiment la gestion des risques qui devient plus couteuse. C’est le cout du risque (le montant et la fréquence probable des sinistres) qui devient très / trop élevé et par conséquent les primes d’assurances nécessaires à la couverture du risque atteignent des niveaux économiquement inacceptables pour les assurés. Par conséquent certains assureurs décident de se retirer. Dans certains cas le risque n’est plus aléatoire, il est certain, et donc non assurable.

En France, il serait possible, et c’est déjà le cas, de ne pas couvrir certains risques. C’est le cas dans certaines parties de France pour les inondations (cf Gard et camping), les submersions (zones côtières), la sécheresse.

En effet ces risques se réalisent de manière beaucoup plus fréquente dans certaines régions. Pour la sécheresse par exemple, depuis 2016, les épisodes de sécheresse extrême (reconnaissance Cat-Nat) sont de plus en plus fréquents (Source : CCR). Entre 2016-2022 la charge de sinistre sécheresse pour une année moyenne a été multipliée par 4 (Source CCR).

Cependant il est important de noter

  • qu’il existe en France le système du régime des Catastrophes Naturelles (Cat-Nat). C’est une protection unique au monde
  • toute personne physique ou morale assujettie à une obligation d’assurance (ie uniquement pour les assurances obligatoires), qui s’est vu refuser la garantie par une entreprise d’assurance dont les statuts n’interdisent pas la prise en charge de ce risque, peut saisir le Bureau Central de Tarification (BCT). Le BCT a pour rôle exclusif de fixer la prime moyennant laquelle l’entreprise d’assurance désignée par l’assujetti est tenue de garantir le risque qui lui a été proposé.

Ces différences sont importantes dans la comparaison avec le système américain.

Thomas Carbonnier : Avant même de s’attaquer à la dimension juridique de votre question, il convient de rappeler les différences fondamentales entre les Etats-Unis d’Amérique et la France, notamment en matière de géographie. Il s’agit d’un territoire bien plus étendu que le nôtre, sur lequel on observe une variété de climats conséquente. Ils peuvent changer d’un état à l’autre. En France, ce n’est évidemment pas comparable. En matière de comparaison, surtout si l’on se limite à la France métropolitaine, il faut savoir raison garder. Il n’y a peut-être pas lieu, pour l’heure, de faire dans le catastrophisme.

Revenons maintenant sur la dimension plus juridique : aux Etats-Unis, il n’est pas rare de faire affaire avec des petites compagnies d’assurance. En France, ce n’est pas vraiment possible puisque l’on ne peut pas se lancer dans un tel secteur comme ça. Chez nous, cela implique un capital minimum, lequel se compte en millions d’euros, et il est ensuite soumis à agrément, ce qui signifie que l’on ne peut pas s’en contenter pour monter son entreprise. Pour obtenir cet agrément, il faut faire la démonstration de sa surface financière. Faute de quoi, si l’entreprise n’est pas jugée viable, il n’est pas possible de fonder une société d’assurance. C’est une différence importante.

Rappelons aussi qu’une réforme, entrée en application en janvier 2023, concerne précisément le domaine de l’assurance. Elle concerne davantage l’industrie agricole que l’industrie immobilière, puisqu’il s’agit de pérenniser notre souveraineté alimentaire. Sans rentrer dans trop de détails, elle comporte trois volets : 

  • Les aléas courants, qui correspondent aux mauvaises récoltes par exemple. Il existe une fiscalité particulière, dans le monde agricole, qui visent à tenir compte des aléas climatiques (justement), qui permet à tout agriculteur de demander un abattement fiscal de 50% sur son bénéfice au titre de l’aléa climatique. Et ce que l’on fasse de la céréale ou du cochon, par exemple.

  • Les aléas significatifs : les assurances indemnisent alors l’exploitation agricole. A la différences Etats-Unis, me semble-t-il, l’assureur peut être subventionné par l’Etat. Je ne suis pas certain que les assureurs américains soient subventionnés.

  • Enfin, les aléas dits “exceptionnels” : dans ce cas précis, on déclenche automatiquement une aide financière de l’Etat. C’est un dispositif tout neuf, dont il n’est pas encore possible de discuter de l’efficacité.

Cette réforme vise à rendre “assurable” ce qui, à terme, pourrait théoriquement ne plus l’être. Cela ne concerne pas le domicile, sauf peut-être la maison sur le terrain agricole.

Les assureurs en France tendent à être plus gros que les assureurs aux Etats-Unis, où le business model est divisé en davantage de sociétés moins importantes. D’une façon générale, cela veut dire que l’impact déclenché par un aléas, y compris climatique (on pourrait parler des inondations récurrentes à Paris, quand la Seine grimpe trop, par exemple) est mieux absorbé. Ces aléas sont connus : il existe une cartographie des risques ; quand on achète une maison, le notaire est tenu d’informer les nouveaux propriétaires de tous les risques et de tous les événements qui ont pu avoir lieu sur la parcelle… d’une façon générale, on est assez bien renseignés en France. Je ne suis pas sûr que ce soit aussi le cas aux Etats-Unis.

Les problèmes de rentabilité ne sont donc pas tout à fait les mêmes.


Dans quelle mesure, le "risque catastrophe" grandissant sans cesse avec le dérèglement climatique, faut-il craindre une évolution du business-model de l'assurance ? Quels pourraient être les principaux changements, tant pour les assureurs que pour les assurés ?

Thomas Carbonnier : C’est difficile à dire. Je ne suis pas convaincu que notre modèle d’assurance change drastiquement dans les mois où les années à venir… C’est une question de nombre d’assurés et de niveau de prime d’assurance, il me semble ; d’autant que certaines assurances se ré-assurent de leur côté. N’oublions pas non plus que nos assureurs sont très habiles sur le plan juridique : à l’aide de très bons avocats, ils insèrent tout un tas de clauses dans les contrats pour s’assurer, autant que faire se peut, de ne pas avoir à couvrir leur clientèle. Bien souvent, après un aléas, on réalise qu’on tombe dans une exception, parmi une liste conséquente, qui justifie une faible (voir l’absence totale de) couverture.

En théorie, si la situation climatique devenait beaucoup plus instable au point que se succèdent des catastrophes susceptibles d’abîmer les bâtiments, on pourrait tout à fait imaginer que les assureurs jouent sur ce levier et augmentent le nombre d’exceptions possible. Ce n’est pas le seul recours dont ils disposent : ils peuvent aussi jouer sur la prime d’assurance (laquelle deviendrait plus chère) où, s’ils y parviennent, le nombre d'assurés (pour mieux absorber le choc de leur côté). On peut tout à fait envisager un soutien financier de l’Etat (lequel impacterait, dès lors, l’économie en général et pourrait théoriquement peser sur les contribuables). Il y a plusieurs solutions envisageables.

C’est une différence de degré plus que de nature.

Claude-Florence Chassain : Dans les 30 prochaines années, le coût total des événements climatiques pourrait, d’après France Assureurs, doubler par rapport aux 3 dernières décennies (de 74 à 143 milliards d’euros).

Les évolutions à prévoir sont une hausse des primes d’assurance si le cout et la fréquence des sinistres continuent à augmenter. On peut également imaginer des partenariats entre assureur et état, dans la continuité du régime cat-nat qui serait étendu à d’autres périls.

L’assurance paramétrique peut être une solution pour simplifier l’indemnisation dans le cas de risques liés au changement climatique. Elle repose sur des indices, qui, lorsqu’ils atteignent un niveau prédéfini, déclenchent automatiquement le versement de prestations à un niveau également prédéfini dans le contrat.

L'une des solutions possibles, au moins en théorie, consisterait à réduire le risque auquel les propriétaires se retrouvent confrontés. Aux Etats-Unis, la situation parait complexe à ce niveau, particulièrement en Californie ou en Floride, des régions régulièrement mises à mal par des ouragans ou autres. Qu'en est-il de la France, où de tels événements sont plus rares (mais pas nécessairement impossibles, en témoigne le tremblement de terre de la semaine passée) ?

Claude-Florence Chassain : En effet, une solution possible est de mettre en place des mesures de prévention pour atténuer les risques. Ceci peut inclure des constructions réalisées différemment pour l’assurance habitation par exemple.

Quid des autres risques, peut-être plus indirects ? Le dérèglement climatique peut engendrer des évolutions sanitaires potentiellement dangereuses, faut-il craindre des hausses de tarifs à ce moment précis ?

Thomas Carbonnier : Rappelons d’abord que les assureurs refusent de prendre en charge le risque de pandémie. Cela s’explique assez simplement : tout cela dépasse les frontières des pays et, dès lors, devient beaucoup trop complexe à assurer. Il faudrait accepter d’assurer dans tous les pays (et donc afficher un nombre de clients suffisamment conséquent dans chaque nation du monde), ce qui peut effectivement paraître surréaliste. Ceci étant dit, je crois que cela soulève une autre question : le problème que l’on constate et que l’on évoque ici émane-t-il des assureurs en eux-même ou d’une situation sanitaire déplorable ? Vous connaissez comme moi le manque de médecins dans certaines régions de France, mais aussi le manque de moyens de notre système hospitalier.

Faute de traitement, la situation n’est pas nécessairement plus coûteuse pour les assurances (qui n’ont alors pas de nouvelles charges à couvrir). Et si traitement il y a, la situation ne saurait être la même qu’aux Etats-Unis d’Amérique, où les soins peuvent coûter des mille et des cents. Ces sommes sont considérablement moins chères en France, ne l’oublions pas. Dès lors, la problématique du coût (pour l’assurance), n’est pas la même. A coût stratosphérique (si tant est que cela soit le cas), oui il faudra s’attendre à une prime stratosphérique…

En France, dans quelles zones ce problème risque-t-il de se poser avec le plus d’acuité ? Avec quelles conséquences pour les (non)assurés ?

Thomas Carbonnier : Je serais bien incapable de répondre sur la dimension géographique du problème.

Il reste, ceci étant dit, un risque que nous n’avons pas encore évoqué : celui de la guerre. L’actualité européenne montre bien que c’est encore possible, en témoigne le conflit qui oppose l’Ukraine et la Russie. Si une bombe tombe sur votre appartement ou votre maison, que se passe-t-il ? Hélas, vous n’auriez plus que vos yeux pour pleurer, puisque ce cas de figure n’est tout simplement pas couvert. Ni par les assurances, ni par l’Etat… en revanche, il faudra tout de même s’acquitter du prêt que vous avez potentiellement contracté pour acheter. Ce n’est pas parce que le bien est détruit qu’il n’est plus nécessaire de rembourser la banque ! Aucun assureur n’est prêt à prendre ce risque.

En France, pour des grandes catastrophes, il y a souvent un soutien économique de l’Etat. L’épidémie de covid-19 l’a démontré. La problématique, en revanche, c’est l’effet boomerang : la distribution par l’Etat de tout cet argent pour contrer l’épidémie a engendré une forte hausse de la masse monétaire… laquelle est en partie responsable de l’inflation que l’on constate aujourd’hui. Pour la combattre, la BCE a largement augmenté ses taux directeurs et ses taux de refinancement. Cela a refroidi l’économie et limité le nombre de crédits. Tout ceci a un impact économique non négligeable, y compris sur les contribuables (puisqu’il faudra potentiellement les taxer un peu plus pour gérer la dette que cela a créé).

Guillaume Séchet : Il y a un certain nombre d'aléas dont on sait que le réchauffement climatique a un impact direct. Cependant, il est difficile d'avoir une vision claire des conséquences directes de la plupart de ces aléas, car cela fait relativement peu de temps que nous avons constaté une augmentation significative de la température depuis la fin des années 80. Nous n'avons donc pas encore suffisamment de recul pour déterminer si ces aléas augmentent réellement de manière significative. De plus, la mesure du nombre de plaintes ou de la somme remboursée par les assurances, qui semble augmenter de manière significative, n'est pas nécessairement liée à une augmentation des événements climatiques. Cependant, il est indéniable que les conséquences du réchauffement climatique sont présentes.

Les canicules sont fortement liées au réchauffement climatique. Les sécheresses sont également un problème, qui peuvent toucher presque toutes les régions de France, en particulier la moitié sud. Dans les prochaines décennies, la moitié sud sera probablement la plus touchée, bien que la moitié nord l'est également , comme on l’a vu récemment. Et ces phénomènes (chaleur + sécheresse) peuvent engendrer des incendies. 

La quantité moyenne des précipitations annuelles peut très bien rester assez stable dans les prochaines années, mais c'est plutôt leur répartition qui pose et posera des problèmes, d'où un risque croissant de sécheresses  importantes et de fortes pluies à certains moments. Des pluies fortes à répétition peuvent engendrer des crues de cours d'eau (inondations lente par étalement) alors que les précipitations intenses, engendrent plutôt des inondations dites "éclair". Il est probable que les orages sont plus fréquents ou plus puissants qu'auparavant, bien que l'on en parle davantage dans les médias qu'il y a quelques années en raison des réseaux sociaux et du développement des chaînes d'info. Les orages diluviens peuvent se produire partout en France, via deux phénomènes : d’une part les pluies méditerranéennes, qui empirent, principalement pendant les saisons froides. Les orages plus traditionnels, eux, peuvent avoir lieu partout.  Les régions du sud-ouest et du centre sont souvent touchées par la grêle (notamment le département de l'Allier). 

Les tornades sont relativement rares en France mais plus fréquentes qu’on ne le croit. Si elles ne sont généralement pas aussi puissantes qu'aux USA, elles peuvent causer des dégâts très importants sur des zones très restreintes. De vastes dépressions concernent des régions beaucoup plus étendues. Cet aléas fait partie intégrante de notre climat tempéré. 

Si ces tempêtes ont plutôt tendance à devenir moins fréquentes en raison de périodes anticycloniques plus longues, certaines sont plus puissantes qu'avant. 1999 reste du jamais vu en France en la matière. En 2001, la mise en place de la vigilance par Météo France depuis les tempêtes de 1999 a permis d'automatiser davantage les procédures d'indemnisation, ce qui est un progrès. 

Les tempêtes peuvent toucher l'ensemble du pays, en particulier les régions proches de l'Atlantique et de la Manche. Cependant, ces régions sont habituées à de telles situations, ce qui réduit les dommages. Les habitations sont mieux construites et résistantes, les arbres sont plus robustes grâce à leur adaptation. Il est également important de mentionner les tempêtes dans la moitié sud, près de la Méditerranée, car elles peuvent être puissantes. 

Parlons maintenant de la neige. Bien qu'elle soit moins présente qu'auparavant, lorsqu'elle tombe, elle peut encore causer des dégâts, notamment lorsqu'elle tombe à des températures proches de zéro degré Celsius. Elle est alors davantage chargée en eau, et cela peut alourdir les fils électriques, entraînant des coupures d'électricité. L'arrière-pays méditterannéen sont est plus susceptible d'être affecté.

En ce qui concerne le froid, il est moins fréquent qu'auparavant, bien qu'il puisse encore se produire. Les gelées tardives sont en revanche plus présentes. Après des hivers de plus en plus doux, ces épisodes de froid tardif au printemps peuvent être destructeurs. La végétation étant en avance à cette période, elle est plus vulnérable aux dommages causés par le froid.
Pour suivre l'évolution des aléas climatiques en France mois par mois, vous pouvez vous rendre sur cette page. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !