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7,2 milliards d’euros de hausse d’impôts : mais qui va vraiment payer ?
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Toujours les mêmes...

Le projet de loi de finances rectificative, présenté mercredi par le gouvernement, prévoit des hausses d'impôts censées rapporter 7,2 milliards d'euros cette année, et 6,1 milliards supplémentaires en 2013. Si les résidents étrangers, les grandes entreprises et les riches contribuables sont supposés figurer en première ligne, un rapide calcul laisse entrevoir une autre réalité...

Michel Taly

Michel Taly

Michel Taly est avocat fiscaliste au sein du Cabinet Arsene Taxand. Il est spécialiste de la politique fiscale à l’Institut de l’entreprise. Il a supervisé la réalisation du rapport de l'Institut de l'entreprise Mettre la fiscalité au service de la croissance.

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Il est très difficile de juger une loi de finances rectificative pour deux raisons :

  • Tous les chiffres sont présentés en différentiel par rapport à la loi de finances initiale ;

  • L’effet structurel des différentes mesures est faussé par leur application en cours d’année et leur caractère récurrent ou non.

C’est encore plus vrai lorsque le projet fait suite à une alternance politique forte. Dans ce cas, les recettes nouvelles mélangent l’ajustement des prévisions initiales et le financement des dépenses nouvelles.

Le projet adopté mercredi par le Conseil des ministres ne déroge pas à la règle, et on peut en avoir deux lectures...

Après une première lecture rapide du dossier remis à la presse, on retient deux messages :

  • Les augmentations d’impôts correspondent presque exactement aux surestimations de recette dans la loi initiale (7,2 milliards d’un côté, 7,1 de l’autre). Il n’y a donc pas, contrairement à ce qu’affirment certains, des impôts nouveaux pour financer des dépenses nouvelles à un moment où la situation du pays exigerait plutôt des baisses de dépenses ;

  • Les ménages à revenus moyens ou modestes ne seront pas mis à contribution. Les recettes nouvelles pèseront à 47 % sur les entreprises (3 milliards) et à 53 % sur les ménages (3,4 milliards). Et sur les 3,4 milliards demandés aux ménages, 73 % (2,5 milliards) seront demandés aux ménages « aisés » (("aisé" au sens du dossier de presse remis par le gouvernement, ndlr). Les autres ne supporteront donc que 900 millions, soit 12,5% du total.

Mais, en relisant le document, plusieurs détails obligent à nuancer le diagnostic :

  • D’abord, on remarque que dans les 7,1 de pertes de recettes, il y a 1 milliard pour les collectivités locales. Or, ces recettes ne font que transiter dans les comptes de l’État et il n’y a pas lieu de compenser leur surestimation. L’équilibre est en trompe l’œil et il y a bien un excédent d’impôts nouveaux qui finance des dépenses nouvelles. Le dossier précise d’ailleurs que le coût de l’augmentation du Smic et de l’allocation de rentrée scolaire est financé par cet excédent ;

  • Ensuite, le total entreprises + ménages cité ci-dessus ne fait que 6,4 et non 7,2. La différence provient sans doute des 800 millions de rendement de l’augmentation des prélèvements sociaux sur les revenus du capital. Cette augmentation faisait partie du paquet de février dernier dit « TVA sociale », car la hausse de TVA ne suffisait pas à compenser la baisse de cotisations sociales. Or, il est prévu d’annuler la hausse de TVA et la baisse de cotisations, mais de garder la hausse de prélèvements sociaux. Mais comme elle a déjà été votée, elle n’est pas reprise dans les hausses d’impôt ;

  • Enfin, la hausse de cotisations retraites qui finance le retour partiel à 60 ans n’est pas reprise non plus dans le tableau récapitulatif.

Pour 2012, si on ajoute les 800 millions de prélèvements sociaux et qu’on n’en affecte que la moitié aux ménages « aisés » (car ces prélèvements ne concernent pas que les riches !), la part ménage passe de 53 % à 58,5 dont 68 % (au lieu de 73) pour les ménages aisés. Et ce calcul serait encore plus défavorable en année pleine, car l’effet des prélèvements sociaux triplerait et il faudrait ajouter l’effet des cotisations retraites (qui concernent tout le monde), alors que l’effet ISF resterait inchangé.

Finalement, les faits sont têtus : il y aura bien financement de dépenses nouvelles par des impôts nouveaux et il ne sera pas possible d’épargner les classes moyennes qui subiront les changements suivants : perte de l’exonération des heures supplémentaires (impôt sur le revenu et cotisations sociales), augmentation de la cotisation retraite et passage de 13,5 à 15,5% du prélèvement social sur les revenus locatifs, les revenus de l’épargne (notamment l’assurance-vie) et les plus-values immobilières.

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