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Trump, son show, son attaque : l’art du catcheur sur le ring ; Macron : "Pour restaurer la compétitivité… Il faut continuer à baisser les charges et les impôts des entreprises"
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Revue de presse des hebdos

Le ministre de l’Economie inspire la presse hebdomadaire. A commencer par Charlie Hebdo qui propose en Une sa caricature, petit regard mesquin et mâchoire carnassière, un brin poseur, en train de se recoiffer "Coucheriez-vous avec Macron pour sauver la France ?".

Sandra Freeman

Sandra Freeman

Journaliste et productrice, Sandra Freeman a animé des émissions sur France Inter, LCI, TF1, Europe 1, LCP et Public Sénat. Coautrice de L'École vide son sac (Éditions du Moment, 2009), elle est la fondatrice du média internet MatriochK.

 

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En Trump, en Nosferatu, ou en suppositoire : la tête de Macron inspire !

« Coucheriez-vous avec Macron pour sauver la France ? » Le ministre de l’Economie inspire la presse hebdomadaire. A commencer par « Charlie Hebdo » qui propose en Une sa caricature, petit regard mesquin et mâchoire carnassière, un brin poseur, en train de se recoiffer. Face à lui, Coco dessine un petit homme en bleu de travail qui répond « pas plus de 35 heures ! ». Et ce n’est qu’un début, dans « les couvertures auxquelles vous avez échappé » proposées par « Charlie », on en trouve pléthore, « Macronifiées » : celle de Riss pour qui Macron est « un Donald Trump français avec des cheveux en plus ». Riss encore : « Macron, l’homme qui monte » - le ministre gravit des marches qui sont des têtes de salariés. Une autre de Juin, qui propose face au chômage : « les socialistes lancent leur suppositoire » dessinant un Macron en tête de suppo. Une autre enfin ironisant sur l’ambition du ministre (à tête de vampire sur-denté cette fois), « 2017 : Macron, candidat des sans-dents » !

Macron, en Une de « L’Express »… à la recherche de la nouvelle formule

L’image de Macron ? Elle est ici en plan serré et incarne un autre symbole en couverture de « L’Express » cette semaine. Le magazine qui propose ici sa nouvelle formule papier, affiche par là même, un autre grain, une autre dynamique, une forme nouvelle… et c’est le ministre de l’Economie qui porte tout ce changement. Sans guillemet, le titre : ce que je veux pour 2017. Ce n’est pas Macron qui le dit. C’est L’Express.

Par contre, au sujet de 2017 et de « l’offre Macron », ce que dit vraiment le ministre au cours de cette dizaine de pages d’entretien (à lire dans son intégralité, car bien nourri et bien dense), c’est qu’il veut « faire réussir la France dans un monde ouvert. Mon combat, c'est celui pour le progrès et la mobilité ». Et à « L’Express » de saisir la balle au bond : « Mais quel véhicule prend-elle ? », le plus simple serait d'annoncer « je suis candidat à la présidentielle ». Réponse de l’actuel patron de Bercy : « En France on est obsédé par le flacon, au lieu de s'intéresser au contenu ». Et pour clore le volet « flacon » (ou « ambition »), cette question du magazine : « Où serez-vous dans 10 ans ? » à laquelle il répond tout aussi nettement : « Pas la moindre idée ».

Clairement «  en faveur d'un libéralisme économique et politique »

Pour ce qui concerne le « contenu du flacon », qui constitue les 90% de l’échange, « Emmanuel Macron esquisse pour la première fois un projet global pour réformer le pays ». La mondialisation, l'Europe, l'innovation, la manière de concilier la justice et la liberté, il fait cas de tous ces sujets majeurs et déclare : « à cet égard, j'ai toujours exprimé un choix clair en faveur d'un libéralisme économique et politique, avec un socle de solidarité collective, de régulation, et la conviction que le principe de liberté rend plus fort. Remettre en question les rentes et les corporatismes, c'est ainsi redonner de l'énergie au pays, permettre à celles et ceux qui sont le plus loin de l'emploi, le plus loin du système, d’y revenir ».

« Pour restaurer la compétitivité… Il faut continuer à baisser les charges et les impôts des entreprises »

Revenant sur la première étape du CICE, en 2012, qui a permis de « baisser le coût du travail pour restaurer à cours terme cette compétitivité sans laquelle les entreprises ne peuvent pas investir, innover », il poursuit : « Pour restaurer la compétitivité… Il faut continuer à baisser les charges et les impôts des entreprises (…) en trouvant la manière de financer notre système de protection sociale (…) Mais la compétitivité, c'est avant tout l'investissement et la formation pour gagner de nouveaux marchés et inventer de nouveaux produits et de nouvelles solutions ».

Autre conviction affirmée lors de cette interview : « On ne peut pas avoir une vraie souveraineté industrielle économique si l'on n’a pas un capital français ». Et donc, un programme politique en découle… qu’il déroule d’ailleurs : « On doit pour cela favoriser trois types d'actionnaires. D'abord, l'État, qui doit (…) accepter de renoncer à ses dividendes lorsque la situation de l'entreprise le justifie et que c'est bon pour le long terme. (…) Deuxième type d'actionnaires, l'entrepreneur. Le gouvernement a été fiscalement celui qui prend des risques. Nous devons encore favoriser le réinvestissement plus fortement. La création du compte entrepreneur, pour lequel j'ai plaidé, y contribuera. » Et puis, il évoque de privilégier l'actionnariat salarié, et, pour cela, « il nous faut renouer avec cette belle idée de la participation » avance-t-il.

« En France, on confond souvent patron et manager »

Conviction affichée, cette fois sur les patrons : « En France, on confond souvent patron et manager. Les premiers, nous n'en avons pas assez, les seconds, nous en avons beaucoup ». Et d’aller un peu plus loin, dans l’entretien sur ce sujet, avec une distance lucide : « Le système est fait pour des gens comme moi, qui ont réussi dans les concours académiques, peuvent devenir managers de groupe, construire leur propre rente. C'est trop souvent le système de l'entre soi, des retraites chapeaux, de la cooptation dans les conseils d'administration et d'une noblesse d'entreprise et de l'État qui tourne entre elle, produit de véritables sinistres industriels parce qu'elle ne se contrôle plus de manière efficace, et qu'elle vit avec certains avantages du marché sans en avoir toutes les contraintes. Ce temps-là est fini, et depuis quelques années, c'est en train de changer. »

Carlos Tavares : le patron qui a sauvé Peugeot

De son côté, patron parlant, « Le point » (qui fait une énième fois sa Une sur Michel Onfray, sa pensée et ses livres) propose un passionnant portrait de « Tavares : L'homme qui a sauvé Peugeot ». Ce « geek de l'automobile » est arrivé en poste il y a deux ans et demi, rappelle le magazine. Dans ce laps de temps, il a remonté l’entreprise, mais n’a rien changé, en apparence, à la déco de son bureau. « Pas une touche personnelle, pas une photo de famille, pas un de ces beaux livres que les PDG aiment mettre en évidence pour montrer qu'ils ont d'autres lectures que les seules comptes de résultat. Non rien du tout.  Du fonctionnel, rien que du fonctionnel ». Et à la journaliste de se raviser en citant Carlos Tavares, lui-même : « En fait, si, quelque chose a changé ici. Vous voyez ces placards ? Ils sont vides. Plus un papier. Comme dans tout ce bureau ».

« Le Point » explique la mécanique Tavares. En l’occurrence, sur la fin du papier, « il l'a pensée, théorisée, organisée ». Pourquoi ? Parce que « la bureaucratie nuit à la performance » ! Toute sa mécanique avance vers cette dite « performance ».

Après 32 ans passés chez le rival de toujours Renault, « il est venu sauver » Peugeot en fin 2013. L’article rappelle que le constructeur automobile perdait 250 millions d'euros par mois, « quelques 5000 € en fumée chaque minute (…) C'était il y a tout juste 30 mois. Une éternité, car PSA vient d'afficher, fin février, son premier bénéfice annuel depuis cinq ans ».

Comment a-t-il réussi son plan de redressement baptisé « back in the race » avec deux ans d'avance sur le calendrier initialement prévu ? « Le Point » explique le fonctionnement de ce patron hors norme : « Tavares, c'est un dingue d'automobiles ». On y comprend que c’est sa vie, depuis toujours, au travers des courses et de l’industrie. Faisant un parallèle entre son entreprise et la course, il déclare : « Je suis un sportif dans l’âme. J'aime me surpasser. j'ai des objectifs hyper ambitieux. J'essaye de transmettre cela ». Puis… « Le secret, c'est que les gens de PSA ont compris le bon sens de ce plan », et enfin d’avouer : « peut-être que ma mauvaise réputation de dirigeant intraitable a aidé en ce sens » !

Quand la Loi El Khomri « menace », la presse hebdo décode : en 2015, 87 % des embauches ont été des CDD

Et côté salarié, quelle température dans la presse cette semaine. Avec la Loi El Khomri, les voyants sont au rouge et les magazines hebdos revêtent leurs manteaux d’informateurs didactiques cette semaine encore. Ainsi, « Challenges » titre à ce sujet « une menace ? » pour en décoder dans ses pages le pourquoi du comment de la limitation des indemnités ou son effet sur l'emploi.

De son côté, « L’Obs », parle aussi d’emploi et choisit de titrer sur la précarité. Photo d’un français lambda en pleine couverture (beau, jeune et digne) pour témoigner de la « vie sans CDI » et son impact sur le quotidien, le travail, le logement, l’emprunt, les soins. Le magazine, ainsi, dans ses pages propose de nombreux témoignages, ceux de Madeleine, en CDD à temps ciel, d'Aurélien intérimaire qui n'a jamais été inscrit à Pôle emploi, de Natacha qui est saisonnière, de Catherine qui est contractuelle, de Martina et Fanny qui sont entrepreneuses, de Loïc qui est apprenti, ou de Olivier qui est free-lance et travaille tout le temps. Chacun raconte sa vie, sans CDI.

Et à « l’Obs » de rappeler ce chiffre : « En 2015, 20 millions des 23 millions de contrat de travail signés ont pris la forme d'un CDD, soit 87 % des embauches ».

Internet, le « baron noir » : deux agitateurs de protestation (difficiles à identifier) ?

Alors dans ce cadre, comment expliquer cette mobilisation « pour sauver le CDI » qui semble pourtant trop rigide aujourd’hui pour que les employeurs l’utilise ?

« L’Obs » explique le sens de  cette mobilisation et ce qui l’anime. Le magazine montre déjà la puissance du net : « En une semaine, la vidéo été vue plus de 220 000 fois sur YouTube. « Face au projet abject et absurde de réforme du code du travail, nous avons décidé de montrer à ceux qui prétendent gouverner que, nous tous, on vaut mieux que ça » disent les YouTubeurs du collectif #OnVautMieuxQueÇa qui se mobilisent sur les réseaux sociaux. Et au magazine de parodier le slogan : « Manuel Valls, c'est foutu, les YouTubeurs sont dans la rue » face à la pétition postée sur le site Change.org qui a été « signée en un rien de temps par 1,1 million d'internautes, un chiffre sujet à caution ».

Aujourd'hui donc, « la protestation en ligne rejoint la lutte, plus traditionnelle » mais le magazine apporte une autre piste avec laquelle la réalité rejoindrait la fiction : le spectre du « baron noir ». On y explique, en substance, que le gouvernement croit  déceler la main de « grands frères » socialistes, « un scénario daté, plus proche d’une série télé que de la réalité aujourd'hui », puisque dans la série « baron noir », récemment diffusée sur Canal+, Kad Merad incarne un député qui tire les ficelles d’un mouvement lycéen dirigé contre un gouvernement tout aussi socialiste que lui. Alors, où se cacherait le « baron noir » aujourd’hui ? À moins que cette réalité soit devenue une fiction.

« L'expulsion : le nouveau modèle de nos sociétés ! »

Au de-là des manœuvres politiques, le sens global des choses.

« Vous connaissiez « l'exclusion ».  Bienvenue dans « l'expulsion » ». « Télérama », sur ce même sujet, mais vu de façon plus globale, décrypte un « capitalisme qui est rentré dans une nouvelle phase : il expulse les hommes hors de la société ». Cette thèse de la sociologue néerlando-américaine qui enseigne à Columbia, Saskia Sassen, est « radicale » et néanmoins intéressante. Elle est expliquée dans les pages « autrement » du magazine. D’un mot : « Au-delà des traditionnelles inégalités, un nouveau phénomène mondial, transversale et bien plus vorace a pris place (…) Le capitalisme globale est entré dans une phase radicale. L'expulsion est devenue le nouveau modèle de nos sociétés. La complexité de notre monde mondialisé, son extrême sophistication laisse paradoxalement place à une brutalité primaire qui touche les hommes autant que les terres (…). Les exclus étaient jadis des victimes rejetées par un système (…) ; Les expulser sont aujourd'hui produit par le système lui-même ».

Trump, son show, son attaque : l’art du catcheur sur le ring

A lire aussi cette semaine dans vos hebdos ce passionnant parallèle entre la politique de Donald Trump et la mise en scène d’un combat de catch. « Les Inrockuptibles » qui titrent en couverture sur Yann Moix («  l'écrivain devenu dézingueur de la télé », interroge par ailleurs : « et si le catch faisait gagner Donald Trump ? ». Pourquoi ? D'abord, parce qu’il « a longtemps baigné dans le business du catch. Manipulation, sens du show et violence : le désormais favoris de la primaire républicaine use de tous les codes de ce sport de combat pour parvenir à faire main basse sur la Maison-Blanche ».

Le magazine compare les ingrédients du catch et ceux de la politique de Trump :

1. « le catcheur fait une entrée fracassante et grandiose ; c'est ce que Trump a fait lorsqu'il a descendu l'escalator de sa Trump Tower pour annoncer sa candidature. »

2. « Alors que le politicien moyen essaye de trouver un terrain d'entente, le consensus, Trump fait exactement l'averse. Il conspue le public à son tour et les traite de vendus. Pour ses soutiens qui le regardent à la télé, il restera un héros ».

3. « Un bon lutteur communique avec la foule par des appels et contre appels : c'est ce qu'il fait : « qui va payer pour le mur à la frontière ? Le Mexique ! Le Mexique ! Le Mexique ! »

4. « Aussi, il fait tout pour attirer l'attention, héros ou pas : la salle doit se remplir. C'est la seule chose qui compte ».

5. Trump « n'a aucun jeu de jambes, aucun souffle. En revanche, il plante une chaise sur la tête ».

6. « Il explique que ce monde n'est pas la vérité, mais l'action, la passion ».

Et aux « Inrocks » de rappeler ce que disait Roland Barthes, le premier intellectuel à avoir théorisé l'effet du catch sur les foules : « Le public se moque complétement de savoir si le combat est truqué ou non, il a raison. Ce qui lui importe, ce n'est pas ce qu'il croit, c'est ce qu'il voit. »

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